_: Les syndicats à l' épreuve des retraites On savait le dossier des retraites explosif . Il risque de tourner à la foire d' empoigne . Le « niet » des agents d' EDF et de GDF à la réforme qui leur était proposée -elle n' était pourtant pas très douloureuse si on la déconnecte de la question de l' avenir du statut de l' entreprise-s'avère de mauvais augure pour le gouvernement . En persistant à vouloir faire de l' accord EDF-GDF , signé par trois syndicats ( CFDT , CFTC , CGC ) mais désavoué par la base , un projet de loi qui sera soumis au Parlement en juin , le pouvoir veut montrer sa détermination à mener à terme une réforme difficile au risque d' y perdre une bonne partie de sa popularité . Souvent taxé d' habileté , Raffarin cherche dans cette épreuve un brevet de courage politique . Ira -t-il jusqu'au bout ? Il est encore trop tôt pour le savoir . Mais le passage en force à EDF et GDF pourrait provoquer une résistance plus forte de la part de l' ensemble du secteur public comme du secteur privé . D' autant que le gouvernement apparaît en contradiction avec sa méthode du « dialogue social » qu' il ne cesse de prôner . Ce prologue ne se révèle guère plus encourageant pour les syndicats , comme on l' a trop peu souligné . En effet , il met en lumière leurs profondes divisions et surtout le décalage d' une partie d' entre eux avec les salariés . Certes , le 6 janvier , ils ont signé une déclaration commune sur l' ensemble du dossier des retraites , ils admettent tous la nécessité d' une réforme , ils sont aussi d' accord pour revendiquer la consolidation du système par répartition . Mais il s' agit surtout là d' une unanimité concernant les principes . Sur les modalités de la réforme , les divisions restent fortes . Ainsi , la retraite à soixante ans est défendue âprement par la CGT , alors que la CFDT , la CGC et la CFTC mettent davantage l' accent sur la durée de cotisation pour appréhender l' âge de la cessation d' activité professionnelle . De même , l' harmonisation public-privé provoque des nuances de taille . A priori , la grande majorité des syndicats n' est pas hostile à l' idée d' une réforme des régimes publics de retraite . Mais FO fait bande à part en s' arc-boutant sur la préservation des régimes spéciaux et du système des pensions . Les syndicats manifesteront ensemble le 1er février . Mais ils risquent d' opposer au gouvernement une unité au mieux de façade , au pire écornée . Pour eux , l' enjeu est de taille , car ils pourraient faire de cette bataille des retraites une occasion de redynamiser leur action et leur cohésion . S' ils échouent sur un dossier aussi cher au coeur des Français , ils continueront à s' enfoncer dans un affaiblissement dangereux pour la démocratie sociale . Déjà , le rejet par les agents d' EDF de l' accord signé par certains syndicats discrédite en partie ceux -ci et provoque une polémique au sein de la CGT . Bref , ce dossier des retraites met presque autant en difficultés les organisations syndicales que le gouvernement . Raffarin doit s' en réjouir secrètement , pensant qu' il arrivera plus facilement à ses fins . La formule « diviser pour régner » demeure inusable .