_: Jeu de dupes Jean-Pierre Raffarin s' est entouré d' un maximum de précautions . Afin de ne pas être accusé de partialité , il a confié l' audit sur les finances publiques aux deux magistrats de la Cour des Comptes qui avaient déjà effectué celui commandé par Lionel Jospin en 1997 . Certes , il n' est pas question de mettre en doute l' honnêteté du travail accompli par les deux auteurs du rapport . Mais comme il fallait s' en douter , cet audit suscite la polémique . Non pas sur son contenu , mais sur les interprétations politiques qu' il engendre . Raffarin accuse Jospin d' avoir surévalué les recettes et sous-évalué les dépenses , ainsi que d' avoir laissé filer les déficits pour des raisons électorales . La gauche rétorque que le gouvernement noircit le tableau pour revenir sur ses promesses et préparer le terrain à des coupes claires dans les dépenses sociales . Postures respectives classiques de la part de la majorité et de l' opposition . Que les socialistes aient tiré sur la corde au cours de l' année pré-électorale et minoré l' ampleur des déficits , c' est une évidence , même si la politique du gouvernement de l' époque a été plombée surtout par une croissance tournant au ralenti . En réalité , l' audit n' apprend rien . Il ne fait que confirmer une tendance que la droite avait elle- même dénoncée lors de la campagne électorale . Dès lors , ses promesses , notamment celles concernant les baisses d' impôts , n' en apparaissent que plus imprudentes . Car la droite les a faites en sachant qu' elle aurait à gérer « l' héritage » socialiste . L' audit est devenu une pratique courante à chaque alternance , quel que soit le niveau de la collectivité , qu' il s' agisse de l' Etat ou de certaines communes . Mais sous ses apparences d' opération vérité , il se révèle être un jeu de dupes permettant à l' équipe au pouvoir de se défausser sur la précédente et à celle -ci de lancer ses premières offensives sur les nouveaux maîtres des lieux . Pour le gouvernement , l' alibi de l' audit n' aura qu' un temps . Il sera bref . Surtout à la veille des vacances . Le gouvernement Raffarin en fera rapidement l' expérience . S' il imagine qu' il pourra faire passer d' éventuels reniements de ses engagements électoraux ou quelques mesures sociales douloureuses sous prétexte de « l' héritage » , il se trompe . Car les Français exigent des résultats , quel que soit le contexte économique . Et Jospin qui s' attendait à un minimum de reconnaissance envers un bilan jugé honorable , a payé brutalement leur manque d' indulgence . Qu' il le veuille ou non , Raffarin devra avancer sous la triple pression de ses promesses électorales , des Français , et de Bruxelles , gendarme des comptes de l' Europe . Le chemin s' avère étroitement balisé .