_: TENDANCE . DIFFICILE DE PRÉDIRE SES ÉVOLUTIONS EN 2004 . MAIS LES SPÉCIALISTES COMMENCENT À ENVISAGER L' IDÉE D' UN EURO FRANCHISSANT LA BARRE DES 1 , 30 DOLLAR . SANS PARLER D' UN SCÉNARIO QUI LE PROPULSERAIT À 1 , 50 DOLLAR . DU JAMAIS VU . L' euro , toujours plus haut Depuis plusieurs semaines , la hausse quotidienne de la monnaie européenne face au billet vert nourrit les interrogations des spécialistes . Et à quelques jours du cinquième anniversaire de la devise , « europessimistes » et « europtimiste » n' en finissent plus d' égrener les dangers ou les mérites d' un euro fort . Pour les premiers , cette envolée historique , si elle perdure , va entamer le potentiel de reprise du vieux continent , hypothéquant du même coup la croissance européenne en 2004 . Pour les seconds , au contraire , une devise européenne au sommet du marché des changes doit asseoir la puissance économique de l' Union . Les plus positifs rappelant qu' après tout , le taux de change actuel de l' euro face au dollar marque un retour à celui retenu pour son introduction . ( L' euro a fait son entrée le 1er janvier 1999 sur le marché des changes au cours de 1 , 1667 dollar ) . LA HAUSSE JUSQU'OÙ ? Un argument qui a toutefois du mal à convaincre , d' autant que l' ascension de l' euro face au dollar ne semble pas encore arrivée à son maximum . Et c' est bien là le problème majeur désormais . Jusqu'ou peut grimper la monnaie unique ? Difficile de prédire quoi que ce soit , et les spécialistes commencent à sérieusement envisager l' idée d' un euro franchissant la barre des 1 , 30 dollar . Sans parler d' un scénario catastrophe qui propulserait la devise à 1 , 50 dollar en 2005 ... Pour l' heure , l' euro flirte avec les 1 , 25 et ça suffit à contrarier la conjoncture . Le dernier rapport de la Banque Centrale Européenne l' affirme : l' envolée de la monnaie unique occasionnera cette année une baisse de 2 % des exportations . Récemment , Philippe Camus , coprésident d' EADS , a clairement averti que son groupe , qui vend en dollars mais dont l' essentiel des coûts est libellé en euros , tirerait « des conséquences radicales » d' une hausse à 1 , 30 . En clair , si l' hypothèse d' un euro durablement supérieur au billet vert se confirmait , la maison mère d' Airbus n' hésitera pas à aller chercher ailleurs qu' en Europe des prix bas pour rester compétitif . Déjà , on évoque l' implantation de nouvelles unités ... aux États-Unis . MARCHÉ AMÉRICAIN ATTRACTIF Une démarche pragmatique envisagée par de nombreux autres groupes . Idem pour le géant de la publicité , Publicis Group , dont le président , Maurice Lévy , vient d' expliquer que les écarts entre le dollar et l' euro rendraient plus attractives les acquisitions sur le marché américain . Ici réside une des principales menaces que fait peser la crue de l' euro . L' emploi est désormais en première ligne avec la tentation des grands groupes européens de répondre aux incertitudes du marc hé des changes par l' intensification du mouvement de délocalisation . En particulier vers l' Asie dont beaucoup de monnaies nationales évoluent dans le sillage du dollar . DES EFFETS SUR LA CROISSANCE Bref , pour beaucoup , le dollar s' annonce déjà comme le grain de sable qui pourrait enrayer l' embellie de ces dernières semaines . Les statisticiens préviennent : une appréciation de l' euro de 10 % amputerait la croissance de 1 point . L' Insee , qui vient de claironner un retour à 1 , 7 % de croissance pour 2004 , a d' ailleurs pris soin d' ajouter : « Si l' euro devait continuer à s' apprécier au cours des prochains mois , le déroulement du scénario retenu serait infléchi » . Reste à savoir comment on perçoit la situation outre-Atlantique . Mis à part la hausse des produits made in Europe , l' inflation de la devise européenne y a apporté de nombreux avantages . Depuis six mois , les exportations flambent . Exemple , des entreprises comme Procter & Gamble , affiche une hausse des ventes de plus de 12 % . Idem pour un secteur sinistré et sous la pression internationale comme celui de l' acier , pour qui la chute du dollar est une véritable bouffée d' oxygène . UN DOLLAR VOLONTAIREMENT BAS ll n' en faut pas plus à certains pour soupçonner le pays de l' oncle Sam de laisser volontairement filer sa monnaie . Un raisonnement qui pêche cependant par sa courte vue . Car si la faiblesse du dollar provoque un ralentissement de la reprise dans toute la zone euro , mais également au Japon , le phénomène ne manquera pas de déclencher un mouvement de boomerang en direction des États-Unis . Les entreprises y sont en effet extrêmement dépendantes des marchés européens pour leur développement . Et une Europe dépressive ne tarderait pas à rendre la monnaie de sa pièce à l' économie US .