_: Pays-Bas . La littérature est pour cette pianiste et cantatrice une vocation tardive . Elle cherche dans le romanesque la tragédie de l' homme jouet du hasard . Margriet De Moor : " Ma profession est la musique " Personnalité à part dans le monde des lettres néerlandaises , cette jeune romancière , dont la carrière connaît ces dernières années une réelle consécration , s' est livrée par Internet pour les lecteurs de l' Humanité à un entretien en forme d' autoportrait . Interrogée sur son autobiographie littéraire " étendue " , Margriet De Moor évoque la dualité de ses sources . D' une part , parce qu' elle a " commencé assez tard à être écrivain " , " les longues années de lecture ingénue des chefs-d'oeuvre de la littérature internationale " , d' où est résultée " une double vie remplie de personnages , d' intrigues , de personnages fictifs " . D' autre part " une éducation musicale " . " Ma profession est la musique . " À dix-sept ans , Margriet De Moor est entrée au Conservatoire royal de chant de La Haye en classe de chant . Avec un point d' encrage , primordial , " la musique contemporaine " : Pierre Boulez ( les Improvisations sur Mallarmé ) , Arnold Schönberg , Alban Berg , Anton Webern , Luigi Dallapiccola , Igor Stravinski . Pensant la littérature sous la catégorie de cette modernité turbulente , de l' abstraction musicale , elle veut son écriture " comme un art abstrait " ; c' est-à-dire " un art qui obéit , comme la musique aux lois du mouvement , du rythme , du mode , du tempo , de la composition , de l' harmonie " . " La Hollande est un pays " ouvert " ; le peuple hollandais est un peuple de marins , de commerçants " , donc habitué par son histoire à toutes sortes d' influences étrangères . Par ailleurs , on y parle une langue européenne dite " minoritaire " . Les Pays-Bas sont donc par tradition un pays où l' on publie et lit beaucoup de littérature traduite ; ce qui signifie , pour Margriet De Moor , comme pour nombre de ses compatriotes , qu' il n' y a pas de distinction entre son " propre monde littéraire et les traditions narratives d' autres cultures " : " J' ai l' habitude de lire des romans russes , français , allemands , sud-américains , etc. comme s' il s' agissait de romans de ma propre culture . " Dans ce contexte , la culture française a toujours joué un rôle prépondérant : son père n' était -il pas professeur de français ? Et Margriet De Moor de citer sa longue et belle marche musicale ( " le récit est pour moi la musique de chambre de la littérature " ) inspiratrice , nourrissante à travers le Grand Meaulnes , d' Alain Fournier , le Rouge et le Noir , de Stendhal , la Chatte , de Colette , entre autres , pour terminer par Adrienne Mesurat , de Julien Green ( " qu' on ne s' y trompe pas : il s' agit bien d' un thriller ! " ) . Reste à évoquer ce que permet la langue d' écriture , maternelle , de Margriet De Moor : " le néerlandais est une langue qui se situe entre l' anglais et l' allemand , entre une langue directe , concrète , ironique , et une langue fort appropriée aux sujets cérébraux et abstraits " . Quant au Rendez-Vous ( titré Zee-Binnen en néerlandais ) , " c' est , dit -elle , l' un de mes trois ( petits ) romans avec pour thème le danger . Je ne mets pas l' accent premier sur les personnages humains ( des êtres innocents ) , mais sur les " choses " : une route dangereuse , un agenda , des champs de fleurs . Ce sont les " choses " qui malicieusement manipulent les personnages : Noor l' épouse , Vincent le mari , Gemma l' amante " . " C' est aussi une histoire d' obsessions . Noor est obsédée par la fidélité de son mari . Vincent est obsédé par une femme qu' il n' a jamais vue . " " Quant au thème du danger , c' est le roman , sa composition , et non l' histoire , qui semble obsessivement réunir deux personnages qui en réalité ne se sont jamais rencontrés : Noor , qui se met à parcourir la route dangereuse ; et Laurens , le frère de Gemma , tué dans un accident de voiture sur cette route il y a des années . " Le Rendez-Vous " joue avec la pensée qu' en amour on aime l' autre dans son intégralité " , qu' on l' aime avec ce que l' on sait de lui , et obligatoirement ce que l' on ne sait pas , ce qu' il vous cache , sa partie secrète . D' où le recours au " background " sur la famille de Gemma , tragiquement éliminée , dans la seconde partie du roman ! Margriet De Moor est la compositrice , l' orchestatrice de grandes partitions sérielles .