_: CANNES . Un festival engagé et un palmarès partagé Le suspense aura tenu jusqu'à l' annonce de la palme d' or . Le prix spécial du 55e anniversaire du Festival de Cannes ouvre les festivités et nous offre un Michael Moore rarement aussi ému , allant jusqu'à abandonner sa langue natale pour chercher désespérément dans ses souvenirs de lycéen de quoi exprimer en français sa gratitude . Bowling For Clementine aura été le film américain le plus percutant qui soit . Par contraste , ce premier documentaire , en compétition depuis longtemps , met en lumière les faiblesses d' une sélection américaine lestée par le conformisme d' une provocation de bon aloi . Et puis Elia Suleiman reçoit le prix du jury pour Intervention divine . Nous sommes encore dans " le bas du tableau " et quelque chose nous dit que le palmarès sera à l' image d' un festival que ses organisateurs nous avaient présenté comme rarement aussi engagé . Ce fut le cas , que ce soit par l' histoire , passée et contemporaine , par le biais de la chronique intime ou l' ambition de la forme , dans cette 55e édition , politique au sens le plus éminent du terme ( voir notre édition de lundi 27 mai ) . Que le prix d' interprétation aille à Olivier Gourmet , pour son travail dans le film des frères Dardenne , était juste et courageux . Dans la pléthore de prestations proposées manifestement aux seules fins d' arracher ce prix -là , le Fils était le seul dans lequel cela était tout sauf gratuit . Et puis voilà , Kati Outinen récompensée avant qu' Aki Kaurismäki ne vienne recevoir le grand prix du jury et se remercie lui-même et le jury , en une de ces pirouettes qu' il cultive . Auparavant , voir le prix de la mise en scène partagé entre deux films aussi à l' opposé l' un de l' autre , par leur esthétique comme par leur point de vue sur le cinéma , que le coréen Ivre de femmes et de peinture et la pochade américaine Punch Drunk Love , indiquait un certain balancement . Le jury présidé par David Lynch aura , encore une fois , opéré un jugement à la Salomon : deux prix de prestige pour l' Homme sans passé et la palme pour le produit hollywoodien franco-germano-polonais . Que l' émotion à l' estomac , chez un réalisateur tel que Polanski , croulant sous le poids d' une conception hollywoodienne du cinéma appliquée à une coproduction européenne , soit ainsi récompensée laisse un goût amer d' inachevé , de manque d' audace au moment de clore un palmarès honnête au demeurant . Reste aussi que si l' on aura autant entendu parler de la France , ou de l' exception culturelle qu' elle défend , quasi à chaque mot de remerciement des lauréats , la production nationale est la grande absente de la fête de clôture . Si le cas Noé est entendu , ne semblant être venu à Cannes que pour en tirer au plus vite son épingle du jeu , ni Marie-Jo et ses deux amours de Robert Guédiguian , ni Demonlover d' Olivier Assayas n' auront bénéficié des faveurs d' un jury au final très partagé dans ses choix , comme s' il avait fallu compenser une audace certaine de la sélection par le souci de ne pas déplaire .