_: Un autre pacte La nuit redoutée des Mureaux n' a pas eu lieu . Les ingrédients tragiquement classiques du cocktail explosif étaient pourtant réunis . Une voiture volée , la mort d' un jeune d' un quartier " sensible " , au terme d' une course-poursuite avec barrages de police , crissements de pneus et , pour finir , trois coups de feu d' un policier . Légitime défense , alors que la voiture fonçait sur lui ? Ce sera à l' enquête d' éclairer les faits . On l' espère du moins . Car , précisément , les gens des quartiers " sensibles " sont tout autant sensibles que les autres à l' injustice , aux dénis de citoyenneté . Le jeune Moussa était connu des services de police , c' est un fait . Mais la loi ne prévoit pas la peine de mort pour un vol . Tous les ingrédients étaient réunis mais il s' est passé , cette fois , ceci . L' intervention de parents , de jeunes eux-mêmes , plus matures , décidés à ne pas entrer dans les spirales autodestructrices de la violence et qui ont rejeté des affrontements et des incendies qui semblaient déjà programmés . Il n' y a pas de fatalité des surenchères . La preuve par les Mureaux . Mais c' est une preuve tellement fragile . Le cocktail peut exploser demain , un autre jour . Il explose ailleurs . Cette année encore , dans les nuits des cités , les feux des incendies sans joie ont éclairé les façades de béton . Cette violence est injuste . Elle frappe les plus démunis . Ceux qui brûlent les voitures et ceux dont les voitures sont brûlées vivent dans les mêmes quartiers , parfois même se connaissent . Les noyaux durs des jeunes incendiaires sont le plus souvent connus de tous . L' impunité ne peut donc être la règle et il y a bien à mener des combats spécifiques contre la violence en impliquant tous les acteurs , en redéfinissant leurs rôles respectifs , par des politiques concertées des services publics , une meilleure formation des policiers , des intervenants de tous ordres . On sait que ces questions vont occuper une large place dans le débat électoral . La droite en a fait un de ses principaux chevaux de bataille . Idem pour Jean-Pierre Chevènement . Le PS dérive sur ce même terrain . Le candidat communiste , refusant tout autant les escalades sécuritaires que les explications mécaniques - la faute au social , à la société - a déjà présenté , à Marseille , des axes d' action , pour mener ces luttes spécifiques contre la violence évoquées ci dessus . Robert Hue affirmait en même temps : " Il ne peut être question de répondre à ceux qui souffrent et qui ont peur : changeons d' abord la société et les phénomènes d' insécurité et de violence se régleront d' eux-mêmes . Il faut combattre , en même temps , l' injustice , les inégalités sources d' insécurité et la violence . " Cet " en même temps " implique du même coup une autre conception du politique . Comment ne pas voir , par exemple , à quel point certaines conceptions de " l' intégration " , certains rappels incantatoires aux valeurs de la République sont inopérants et figés . D' abord parce que ceux qui vivent dans les quartiers les plus pauvres , les plus éloignés des centre villes , les moins équipés , sont à leur corps défendant , en quelque sorte " désintégrés " en permanence . Ensuite parce que la question , au fond , n' est pas tant d' intégrer un ordre donné des choses , immuable , une République figée qui tolère en son sein autant d' exclusions et d' inégalités . L' enjeu , c' est , tout au contraire , de reconstruire du politique ensemble . De construire , avec l' apport de tous ( dont le droit de vote de tous ) , une République moderne , démocratique . Juste . C' est uniquement sans doute à ce prix , en se reconnaissant les uns les autres comme des sujets de plein droit , sans aucuns déni de citoyenneté qu' un nouveau pacte social est possible .