_: Un risque majeur ( Non , Jacques Barrot n' a pas été caricaturé . La caricature , hélas ! c' est lui . À la manière des caricatures de Daumier quand il stigmatisait une bourgeoisie du XIXe siècle assise sur ses privilèges . ) Les propos de Jacques Barrot , le président du groupe UMP à l' Assemblée nationale , visant à réduire le champ de couverture de la Sécurité sociale aux seules maladies graves , sont à prendre très au sérieux et pour ce qu' ils sont : une offensive sans précédent contre le système mis en place au lendemain de la formidable tragédie humaine de la Seconde Guerre mondiale . Un système qui n' était pas alors une vue de l' esprit mais qui , dans les circonstances de l' immédiat après-guerre , répondait à ces années où l' homme fut un fauve pour l' homme en termes de partage , de solidarité . Avec cette certitude que les nations blessées ne se reconstruisent pas dans le chacun pour soi , l' indifférence et les eaux glacées du calcul mais dans un humanisme en actes . Jacques Barrot se plaint de ce que ses propos auraient été caricaturés . Ses dénégations tiennent du mauvais vaudeville . Quand on est le chef de file de la majorité au sein de la représentation nationale , que l' on a été soi-même ministre de la Santé et de la Solidarité , on sait ce que l' on dit . À sa suite du reste , François Fillon , le ministre du Travail et des Affaires sociales , a bien enfoncé le clou en estimant qu' il faudrait faire le partage entre ce qui devrait relever de la solidarité nationale et ce qui devrait relever de l' assurance complémentaire . Non , Jacques Barrot n' a pas été caricaturé . La caricature , hélas ! c' est lui . À la manière des caricatures de Daumier quand il stigmatisait une bourgeoisie du XIXe siècle assise sur ses privilèges . Une droite entièrement habitée par ses a priori idéologiques , ses choix de société , sa conception du monde . En matière de Sécurité sociale , sa conception est simple : réduire la couverture du risque . Ouvrir des pans entiers de la couverture santé aux régimes privés . C' est le même choix que pour les retraites , quand le premier ministre ne diffère la mise en place des fonds de pension qu' en fonction de la situation actuelle de la Bourse , dont il redoute par trop - pour le moment , mais juste pour le moment - les incertitudes . Ces choix , c' est ce que la droite appelle " la responsabilité " . Ce que le MEDEF appelle le risque . Sauf que le risque , dans cette logique , est toujours pour les mêmes . Ceux qui , faute de pouvoir payer , ne pourront plus se soigner . Ceux qui verront leurs économies placées en toute confiance dans des régimes de retraite ou d' assurances privées disparaître d' un coup avec les continents financiers engloutis dans les désastres d' une économie en crise . La droite , la finance , le MEDEF veulent faire de chacun , par le biais de la santé ou de la retraite , la piétaille sacrifiée aux combats de la spéculation mondiale . Les régimes actuels de Sécu , de retraite , répondent encore - pour combien de temps , s' il n' est pas de riposte à la hauteur ? - à un autre choix de société : celui de consacrer à la santé et au bien-être de tous une part de la richesse produite par le travail de tous . C' est une réponse humaniste , d' un point de vue moral , comme pour le développement des sociétés . La prévention , la santé , l' épanouissement de chacun au travail et dans la vie sociale ne sont pas des coûts . Ils sont le juste retour du travail des hommes , par le biais des charges et cotisations sociales - dont on sait qu' elles épargnent les revenus financiers - , à l' amélioration de la vie des hommes . Elles sont autant de moins pour les guerres du capital . La droite , le MEDEF , ne le supportent pas . Les propos de Jacques Barrot sont une menace et un risque majeur de régression sociale et intellectuelle .