_: Une grève européenne ( Les droites triomphantes en Europe , qui tiennent paradoxalement leur succès du désarroi populaire provoqué par le renforcement des précarités , n' ont pas d' autre horizon que la fuite en avant dans l' euro-libéralisme . ) La réforme des allocations chômages contre laquelle se mobilise aujourd'hui le monde du travail espagnol présente quelques airs de familles avec le fameux PARE ( plan d' aide au retour à l' emploi ) français . En plus musclé . Car la version ibérique ressemble en fin de compte à s' y méprendre au projet initial présenté en son temps par le patronat français . Il s' agit , sous couvert de " traitement actif du chômage " , d' obliger les personnes privées d' emploi à accepter le plus rapidement possible n' importe quelle proposition . A chaque refus d' " offre adéquate " de l' INEM , l' ANPE espagnole , les allocations sont diminuées . A la troisième dénégation , elles sont purement et simplement supprimées . Selon de premières indications , le mouvement devrait être massivement suivi rappelant à bien des égards la grève générale qui a paralysé l' Italie il y a quelques semaines . Dans un pays comme dans l' autre , il s' agit " d' assouplir " toujours davantage le marché du travail et la réaction massive illustre dans chaque cas la montée d' un ras-le-bol vis-à-vis d' une précarité qui désormais ne touche plus seulement les plus démunis . Elle traduit aussi l' aspiration croissante à une évolution inverse , à davantage de sécurité en matière d' emploi . Ce qui heurte de plein fouet les orientations mises en oeuvre d' un bout à l' autre de l' Europe . Le fait que ce conflit social espagnol fasse irruption à la veille du sommet qui se tiendra vendredi et samedi à Séville ne doit donc rien au hasard et ne saurait surtout pas être réduit , comme on l' entend parfois , au simple souci stratégique de centrales syndicales en mal de renforcer l' impact de leur action . Car il possède , dès le départ , un caractère éminemment européen . La convergence de la grève et du Conseil est même un condensé saisissant des contradictions qui s' exacerbent dans une Europe dominée désormais par une droite libérale et sécuritaire . D' un côté , des mouvements de résistances se mettent en place . Non seulement pour défendre des acquis , pour ne plus être traité en salarié Kleenex , prenable et jetable au gré des besoins des entreprises , mais aussi pour faire entendre une aspiration à de vraies garanties d' insertion dans la vie professionnelle . Les nouvelles technologies peuvent ouvrir la voie à la mise en place d' un meilleur système de formation continu , capable d' adapter chacun aux besoins modernes d' évolution des compétences tout au long de la vie . A l' opposé de la fuite en avant libérale et de la soumission aux logiques des marchés financiers , l' émergence de telles garanties en terme d' emploi et de formation constituerait un vrai saut de civilisation . Ce système potentiel serait un formidable outil de promotion , donc d' émancipation humaine ce qui contribuerait sans doute comme jamais au renforcement de la compétitivité des entreprises européennes . De l' autre côté , les droites triomphantes aujourd'hui en Europe qui tiennent paradoxalement leur succès du désarroi populaire provoqué précisément par ce renforcement tous azimuts des précarités , n' ont pas d' autre horizon que la fuite en avant dans l' euro-libéralisme . D' où leur tentation de passer en force à la Berlusconi , à la Aznar , ( prochainement à la Chirac ? ) y compris en mettant outrageusement l' accent sur le sécuritaire . Comme l' atteste le verrouillage de l' Europe forteresse , promu sujet vedette du sommet . Elles entendent ainsi à la fois faire diversion et justifier non seulement la mise sous surveillance des immigrés mais le recours à des dispositions antigrèves ou antisyndicales . Comme souvent derrière ce regain d' autoritarisme se cache en fin de compte une bien grande fragilité . Résultat de l' incapacité à répondre , en fait , aux aspirations profondes des citoyens européens .