_: Payer pour l' Europe AU CONSEIL EUROPÉEN de Bruxelles , la dynamique franco- allemande s' est remise en mouvement . Comme au bon vieux temps , quelques apartés entre le président de la République française et le chancelier allemand ont permis de lever l' obstacle à un accord . Un grain de sable de quelques milliards d' euros qui menaçait de faire capoter l' oeuvre historique de l' après-guerre froide : la réunification du continent . Qui paiera pour l' Europe ? L' accord de Bruxelles donne satisfaction à tout le monde . Aux Français , parce que la politique agricole commune est sauvée ; aux Allemands , parce que l' augmentation des dépenses est limitée ; aux Britanniques , parce que la mise en cause de leur ristourne est au moins ajournée ; aux nouveaux venus , parce qu' ils bénéficieront d' une partie de la manne communautaire et ne seront pas traités comme des partenaires de seconde classe . La vraie réponse à la question du financement de l' Europe a toutefois été renvoyée à des jours meilleurs . Or le budget européen est à la fois aberrant , injuste et insuffisant . Il est aberrant parce que la base de calcul et la structure des dépenses créent des distorsions entre les Etats membres . Les seules politiques communes , la PAC et la politique régionale , ont certes permis de renforcer la cohésion entre régions riches et pauvres de l' Union , mais il est de plus en plus difficile d' expliquer pourquoi 40 % des fonds communautaires ( les 40 milliards d' euros de la PAC ) profitent à moins de 5 % de la population . Ce budget est aussi injuste dans la mesure où la ristourne consentie aux Britanniques est de moins en moins justifiée . Mitterrand et Kohl l' avaient acceptée en 1984 , Chirac l' avait confirmée en 1999 , pour des raisons politiques . Il est temps , comme l' a cette fois demandé la France , de tout remettre sur la table sous peine de voir les nouveaux membres , dont le niveau de vie est inférieur de moitié à la moyenne communautaire , payer pour la riche Albion . Enfin , ce budget est insuffisant si l' Europe veut avoir les moyens de ses ambitions . Il a été plafonné à 1 , 27 % du PIB européen par des ministres des finances soucieux d' économies et il représente en réalité à peine plus de 1 % ( soit 100 milliards d' euros ) . Avec une somme aussi dérisoire , il n' est pas possible de mener à bien des politiques communes dans les domaines où la nécessité se fait le plus sentir : transports , recherche , etc . Le problème n' est pas seulement financier ; il est d' abord politique . De temps en temps , certains dirigeants européens évoquent la création d' un impôt communautaire qui ne viendrait pas s' ajouter mais se substituer à des taxes nationales . Cela donnerait à un pouvoir européen une plus grande marge de manoeuvre pour gérer la politique économique et piloter l' euro autrement que par les moyens strictement monétaires de la Banque centrale . Mais quel pouvoir européen ? C' est encore une question à laquelle la Convention de M. Giscard d' Estaing devrait apporter une réponse .