_: Bruxelles menace de sanctionner Paris pour « déficit excessif » La France a notifié à la Commission européenne , lundi 3 mars , que celui -ci a représenté 3 , 04 % du produit intérieur brut en 2002 , soit légèrement au-dessus de la limite de 3 % fixée par le traité de Maastricht . Sans recours à la rigueur , il se creusera en 2003 pour s' approcher de 3 , 5 % Le gouvernement français devait notifier à la Commission européenne , lundi 3 mars , que ses déficits publics ont représenté 3 , 04 % du produit intérieur brut en 2002 . S' appuyant sur le traité de Maastricht , Bruxelles s' apprête donc à lancer une procédure pour déficit excessif . Le ministère des finances conteste cette analyse et estime que la procédure ne peut être déclenchée qu' à partir de 3 , 1 % de déficit . Le porte-parole du gouvernement a confirmé , dimanche , que le gouvernement se refusait à toute politique de rigueur . Le renflouement de l' Unedic décidé par les partenaires sociaux , fin décembre , va toutefois gommer les baisses d' impôts et de charges décidées pour 2003 . En allemagne , le gouvernement du chancelier Gerhard Schröder envisage de soutenir l' activité , malgré ses déficits publics . SOUCIEUX de montrer que la gauche plurielle ne se soumettait pas au « diktat de Maastricht » , le ministre des finances de Lionel Jospin , Dominique Strauss-Kahn , avait annoncé , début 1998 , des déficits publics français de ... 3 , 02 du produit intérieur brut ( PIB ) fixée pour se qualifier pour l' euro . Cinq ans après , Jean-Pierre Raffarin fait de même : en 2002 , le déficit français s' est établi à 3 , 04 % du PIB - chiffre que Bercy devait transmettre , lundi 3 mars , à la Commission européenne . La France pourra -t-elle , dès lors , échapper à une procédure pour déficits excessifs ? « Une lecture attentive du traité montre qu' il y a déclenchement de la procédure lorsque les déficits publics atteignent 3 , 1 % . Pas en dessous » , répond un proche de Francis Mer . Bruxelles voit les choses autrement : la Commission s' apprête bel et bien à lancer cette procédure . « Si un pays a un déficit qui atteint 3 % , nous lancerons une procédure » , explique au Monde Gerassimos Thomas , porte-parole de Pedro Solbes , le commissaire européen aux affaires économiques . Pour enclencher ce processus , il faut encore attendre le verdict d' Eurostat , l' agence européenne de statistiques , qui , le 17 mars , doit confirmer , ou non , le chiffre transmis par la France . « L' Insee a travaillé avec Eurostat . Il n' y a pas de raison que les chiffres transmis à Bruxelles soient modifiés » , estime -t-on au ministère des finances . Dès le 18 mars , M. Solbes pourra donc appliquer les textes dans toute leur rigueur . Et il a bien l' intention de le faire , même s' il sait qu' il se fera sans doute accuser d' avoir une gestion notariale du pacte de stabilité , déconnectée des réalités économiques dans un monde probablement en guerre et au bord de la récession . Qu' importe : le commissaire européen a arrêté sa stratégie . Il déclenchera la procédure . Dans un premier temps , ses services rédigeront un rapport qui examinera l' état des finances publiques françaises et leur évolution dans le temps . A Bruxelles , on ne préjuge pas du contenu de ce rapport . Toutefois le porte-parole de M. Solbes précise : « Nous allons examiner la situation en 2002 , en regardant aussi en avant » , en particulier les prévisions pour 2003 que la France doit notifier dans la semaine à Bruxelles . Or celles -ci , de toute évidence , feront apparaître une nouvelle dégradation des finances publiques . Avec une croissance de l' ordre de 1 , 5 % en 2003 , les déficits publics devraient représenter un peu moins de 3 , 5 % du PIB cette année . Autre enjeu du rapport que prépareront les équipes de M. Solbes : la réalité des chiffres français . Un observateur estime qu' avec une croissance inférieure d' un point aux prévisions en 2002 les déficits français auraient dû déraper jusqu'à 3 , 2 retenus . Deux explications à ce décalage : soit l' audit des finances publiques de juillet 2002 avait « chargé la barque » , ce qui a laissé au gouvernement français une marge de manoeuvre plus forte pour laisser filer ses finances ; soit Bercy a comptabilisé sur 2002 des recettes de 2003 et reporté quelques dépenses . Le rapport que publiera en juin la Cour des comptes sur l' exécution du budget 2002 sera à cet égard très instructif . Une fois le rapport de M. Solbes réalisé , il appartiendra aux ministres des finances des Quinze - après d' autres étapes procédurales - d' approuver ce rapport à la majorité qualifiée . Si les Quinze constatent le « déficit excessif » , ils adresseront à la France des recommandations , l' enjoignant de prendre les mesures nécessaires dans un délai de quatre mois . En un mot , de modifier sa politique budgétaire . Bruxelles imposerait donc à Paris la politique de rigueur que Jacques Chirac et Jean-Pierre Raffarin refusent de mener . serrer les boulons Les règles européennes prévoient , en effet , qu' un pays doit faire repasser ses déficits sous la barre des 3 % dans l' année qui suit celle où le déficit excessif est constaté . Si la Commission agit tout de suite , la France devra le faire en 2004 . Et donc serrer les boulons dès 2003 . C' est justement ce que veut éviter le premier ministre , qui veut à tout prix gagner un an . M. Raffarin sait qu' au titre de 2003 il n' échappera pas au lancement d' une procédure pour déficit excessif . Si la Commission laissait effectivement à la France un répit d' un an et ne constatait qu' en 2004 que le déficit de 2003 a été excessif , Paris aurait jusqu'en 2005 pour repasser sous la fameuse barre des 3 % . D' ici là , estime un observateur , la guerre en Irak et la récession allemande aidant , le gouvernement Raffarin peut envisager que les règles du pacte de croissance et de stabilité , qui fixent les règles du jeu de la zone euro , auront été assouplies . L' obsession de la Commission est d' empêcher la France de tirer prétexte d' un conflit en Irak pour ne pas entreprendre les réformes et les corrections nécessaires , au nom de la défense de la croissance . C' est dans cet état d' esprit , pour minimiser les effets de la guerre , que la Commission a publié , en février , une étude économique montrant qu' une envolée du pétrole à 70 dollars le baril et s' établissant en moyenne à 39 dollars pour 2003 - c' est le cours actuel - n' affecterait la croissance des Quinze que de 0 , 35 point . La France est en situation délicate . Elle a particulièrement agacé ses partenaires depuis un an . M. Chirac , M. Raffarin et M. Mer n' ont cessé d' assurer , pendant des mois , qu' ils respecteraient le pacte , alors qu' ils l' ont violé dès 2002 . Seul contre tous , Paris a refusé à l' automne 2002 de prendre dès 2003 le virage de la rigueur en baissant de 0 , 5 % ses déficits structurels . La Commission a pour elle d' avoir tiré la sonnette d' alarme dès l' automne 2002 en préconisant , puis obtenant du conseil des ministres des finances le lancement d' un avertissement préventif à la France pour la dérive de ses finances publiques : elle avait alors mis en garde la France contre un possible dépassement de la barre des 3 % en 2003 . Aujourd'hui , c' est toutes les règles du jeu de la zone euro qui sont en train d' exploser . Le Portugal a été le premier à les violer en 2001 , suivi de l' Allemagne et de la de la France . Au conseil européen de Bruxelles , le 21 mars , les chefs d' Etat et de gouvernement devraient approuver une nouvelle interprétation du pacte de stabilité , que la France n' applique pas .