_: | Université de Poitiers UFR Sciences Humaines et Arts Laboratoire Langage , Mémoire et Développement Cognitif ( LMDC ) / UMR 6215 CNRS Les contraintes de sélection de l' auxiliaire " être " ou " avoir " . Etude à partir des déficits neuropsychologiques et de l' apprentissage de langue seconde Thèse de Doctorat de l' Université de Poitiers Mention Psychologie Présentée par Sophie GRIFFINI Sous la direction de François RIGALLEAU Jury Madame Françoise CORDIER : Université de Poitiers Madame Cheryl FRENCK-MESTRE : Université de Provence ( Rapporteur ) Monsieur Jean-Luc NESPOULOUS : Université de Toulouse II ( Rapporteur ) Monsieur François RIGALLEAU : Université de Poitiers Madame Antonella SORACE : Université d' Édimbourg Poitiers , Janvier 2007 Sommaire INTRODUCTION GENERALE 5 CHAPITRE 1 7 La sélection des auxiliaires 7 1 . La sélection des auxiliaires des verbes intransitifs 8 1.1 . L' Hypothèse Inaccusative 9 1.2 . La dissonance inaccusative 12 2 . Les approches dichotomiques 13 2.1 . Approche syntaxique de l' inaccusativité 13 2.2 . Approche sémantique de l' inaccusativité 14 2.3 . Approches d' interface syntaxe-lexique de l' inaccusativité 15 3 . La Hiérarchie de Sélection des Auxiliaires ( HSA ) 16 3.1 . La notion de télicité et d' agentivité au centre de cette hiérarchie aspectuelle 17 3.2 . La notion de gradation 19 3.3 . Une hiérarchie fondée sur la théorie de l' optimalité 21 4 . Synthèse du chapitre 1 23 CHAPITRE 2 25 L' aphasie et la sélection des auxiliaires 25 1 . Bref historique 26 1.1 . L' aphasie de Broca 26 1.2 . L' agrammatisme 27 1.3 . Les autres types d' aphasie 28 1.3.1 . Aphasie de conduction 28 1.3.2 . Aphasie transcorticale 29 2 . L' origine du déficit de compréhension 29 2.1 . Le problème des phrases réversibles 29 2.2 . L' importance de la structure canonique dans la compréhension des phrases : la théorie de destruction des traces 30 2.3 . Le déficit de déplacement des verbes 34 3 . La compréhension des verbes intransitifs 36 3.1 . Trace Deletion Hypothesis ( TDH , Grodzinsky , 1995a ) 37 3.2 . Argument Structure Complexity Hypothesis ( ASCH ) 39 3.3 . Inaccusativité et biais lexical 42 3.4 . Synthèse 44 4 . La compréhension des auxiliaires 45 4.1 . La sensibilité aux auxiliaires dans des tâches off-line 45 4.2 . La sensibilité aux erreurs d' auxiliaires dans des tâches on-line 47 4.2.1 Déficit des processus automatiques 48 4.2.2 . Représentations syntaxiques " globales " et " locales " 51 4.3 Synthèse 53 5 . Synthèse du chapitre 2 54 CHAPITRE 3 57 Expérience 1 : Tâche de Détection de Mots 57 1 . Objectifs 57 2 . Récapitulatif du dispositif expérimental 59 3 . Méthode 60 3.1 . Participants 60 3.1.1 . Patients cérébro-lésés 60 3.1.1 . 1 . Caractéristiques des patients 60 3.1.1 . 2 . Etude préliminaire : évaluation des troubles de compréhension syntaxique 62 3.1.2 . Contrôles appariés 62 3.2 . Matériel 63 3.3 . Procédure 66 3.4 . Plan expérimental et hypothèses 67 4 . Résultats 68 5 . Synthèse du chapitre 3 73 CHAPITRE 4 75 La sélection des auxiliaires et la seconde langue 75 1 . L' apprentissage d' une seconde langue à la puberté 76 1.1 . Un âge critique pour apprendre une seconde langue ? 76 1.2 . Les différences entre la L1 et la L2 78 2 . La compréhension des verbes intransitifs chez des apprenants 81 2.1 . Les verbes inaccusatifs et les structures passives 82 2.2 . Les L2 avancés ont les mêmes performances que les locuteurs natifs 84 2.3 . Les L2 ne sont pas aussi précis que les locuteurs natifs 86 2.4 . Synthèse 88 3 . La sélection des auxiliaires en français et en allemand 89 3.1 . La HSA en allemand et en français 89 3.1.1 . Les verbes de changement de lieu 92 3.1.2 . Les verbes de changement d' état 92 3.1.3 . Les verbes de continuation d' un état préexistant 93 3.1.4 . Les verbes d' existence d' état 93 3.1.5 . Les verbes de processus incontrôlés 93 3.1.6 . Les verbes de processus contrôlés 94 3.1.6 . 1 . Les verbes de processus contrôlés ( avec mouvement ) 94 3.1.6 . 2 . Les verbes de processus contrôlés ( sans mouvement ) 95 3.2 . Synthèse 95 3.3 . Les verbes pronominaux 96 3.4 . Synthèse 97 4 . Méthodologies expérimentales utilisées dans l' étude de la L2 . 98 4.1 . La technique de lecture autorégulée 99 4.2 . La technique d' audition autorégulée 100 4.3 . Les tâches complémentaires 102 4.4 Synthèse 103 5 . Synthèse du chapitre 4 104 CHAPITRE 5 106 Les locuteurs français 106 Expérience 2 : Matériel français 107 Expérience 2a : Auditory Moving Window 107 1 . Méthode 108 1.1 . Participants 108 1.2 . Matériel 109 1.3 . Procédure 112 1.4 . Plan expérimental 114 2 . Résultats 114 2.1 . Résultats des Contraintes Syntaxe-Lexique 115 2.1.1 . Exactitude des jugements 115 2.1.2 . Temps de jugement des phrases 116 2.1.3 . Temps d' audition des phrases 117 2.1.4 . Récapitulatif des résultats 118 2.2 . Résultats concernant les contraintes Aspect-Réfléchis-Réfléchis 2 118 2.2.1 . Exactitude des jugements 118 2.2.2 . Temps de jugement 120 2.2.3 . Temps d' audition 121 2.2.4 . Récapitulatif des résultats 122 Expérience 2b : Stop Making Sense 124 1 . Méthode 124 1.1 . Participants 124 1.2 . Matériel 124 1.3 . Procédure 125 1.4 . Plan expérimental 125 2 . Résultats 126 2.1 . Résultats concernant les contraintes Syntaxe - Lexique 126 2.2 . Récapitulatif des résultats 128 2.3 . Résultats concernant les contraintes Aspect - Réfléchis - Réfléchis 2 129 2.4 . Récapitulatif des résultats 131 Expérience 3 : Matériel allemand 133 Expérience 3a : Auditory Moving Window 133 1 . Méthode 135 1.1 . Participants 135 1.2 . Matériel 135 1.3 . Procédure 139 1.4 . Plan Expérimental 140 2 . Résultats 140 2.1 . Résultats concernant les contraintes Syntaxe-Lexique-Passif 141 2.1.1 . Exactitude des phrases 142 2.1.2 . Temps de jugement des phrases 143 2.1.3 . Temps d' audition des phrases 144 2.1.4 . Récapitulatif des résultats 145 2.2 . Résultats concernant les contraintes Aspect-Réfléchis-Réfléchis 2 -Passif 146 2.2.1 . Exactitude des jugements 147 2.2.2 . Temps de jugement des phrases 148 2.2.3 . Temps d' audition des phrases 149 2.1.4 . Récapitulatif des résultats 150 Expérience 3b : Stop Making Sense 152 1 . Méthode 153 1.1 Participants 153 1.2 . Matériel 153 1.3 . Procédure 153 1.4 . Plan expérimental 154 2 . Résultats 154 2.1 . Résultats concernant les contraintes Syntaxe-Lexique-Passif 154 2.2 . Récapitulatif des résultats 156 2.3 . Résultats concernant les contraintes Aspect-Réfléchis-Réfléchis 2 -Passif 158 2.4 . Récapitulatif des résultats 159 Synthèse du chapitre 5 161 CHAPITRE 6 165 Les locuteurs allemands 165 Expérience 4 : Matériel français 166 Expérience 4a : Auditory Moving Window 166 1 . Méthode 167 1.1 . Participants 167 1.2 . Matériel 167 1.3 . Procédure 167 1.4 . Plan expérimental 167 2 . Résultats 167 2.1 . Résultats concernant les contraintes Syntaxe-Lexique 168 2.1.1 . Exactitude des jugements 168 2.1.2 . Temps de jugement des phrases 169 2.1.3 . Temps d' audition des phrases 169 2.1.4 . Récapitulatif des résultats 170 2.2 . Résultats concernant les contraintes Aspect-Réfléchis-Réfléchis 2 171 2.2.1 . Exactitude des jugements 171 2.2.2 . Temps de jugements 171 2.2.3 . Temps d' audition 173 2.2.4 Récapitulatif des résultats 174 Expérience 4b : Stop Making Sense 175 1 . Méthode 175 1.1 . Participants 175 1.2 . Matériel 176 1.3 . Procédure 176 1.4 . Plan expérimental 176 2 . Résultats 176 2.1 . Résultats concernant les contraintes Syntaxe-Lexique 176 2.2 . Récapitulatif des résultats 178 2.3 . Résultats concernant les contraintes Aspect-Réfléchis-Réfléchis 2 179 2.4 . Récapitulatif des résultats 180 Synthèse du chapitre 6 182 DISCUSSION GENERALE DE LA THESE 184 REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES 196 ANNEXES : 223 Annexe 1 : Consigne de l' Expérience 1 224 Annexe 2 : Matériel de l' Expérience 1 225 Annexe 3 : Consignes des Expériences 2 et 4 228 Annexe 4 : Matériel expérimental français des Expériences 2 et 4 229 Annexe 5 : Consignes des Expériences 3 a et b et expérience en Annexe 9 235 Annexe 6 : Matériel expérimental allemand des Expériences 3 236 Annexe 7 : Caractéristiques des participants français apprenants allemand 245 Annexe 8 : Caractéristiques des participants allemands apprenants français 246 Annexe 9 : Matériel allemand - locuteurs allemands 247 Introduction générale Etre et avoir présentent une particularité qui les distingue des autres verbes d' une langue . En effet , ils peuvent s' employer comme tous les autres verbes avec le sens et la construction qui leur est propre , mais ils peuvent également s' employer comme auxiliaire . Dans ce dernier cas , leur emploi sert à constituer certaines formes verbales ( e.g. , les formes passives , les temps composés , les temps super composés ) . Les verbes auxiliaires etre et avoir font partie des mots les plus courants de la langue française [ 1 ] . La nature des auxiliaires est l' une des questions qui a beaucoup intéressé la linguistique et la psycholinguistique . Contrairement aux verbes principaux , les auxiliaires sont des verbes non lexicaux qui n' ont pas de structures d' arguments qui leur sont propres et qui n' attribuent pas de rôles thématiques ( Bentley Guéron Pollock , 1989 ) . Les auxiliaires ont d' abord été considérés comme des mots déficients sémantiquement puisque leur signification est restreinte à des domaines de temps , de modalité et d' aspect ( Akmajian , Steele Essegbey , 2004 ; Guéron , 2002 ; Heine , 1993 ) . Par la suite , les auxiliaires ont été conçus comme étant sémantiquement malléables , c' est-à-dire qu' une partie substantielle de leur signification est déterminée par leur environnement syntaxique immédiat ( Barbiers , 2002 ; Cheng & Sybesma , 2004 ) . Notre travail se situe dans le domaine de la psychologie du langage dans le sens où il s' agit de vérifier si des principes généraux de fonctionnement cognitif sont appliqués dans le cas de la sélection des auxiliaires . Le terme " sélection des auxiliaires " est généralement utilisé pour faire référence à un phénomène trouvé dans de nombreuses langues romanes et germaniques où l' auxiliaire utilisé dans la construction " auxiliaire + participe passé " est soit etre , soit avoir . Contrairement à des langues comme l' anglais ou l' espagnol qui utilisent systématiquement l' auxiliaire avoir pour former les temps composés des verbes , il existe un grand nombre de langues ( français , italien , allemand , néerlandais parmi d' autres ) qui ont le choix entre etre et avoir . Mais comment déterminer l' utilisation correcte de l' un ou l' autre des auxiliaires avec un verbe donné ? Notre objectif est alors d' étudier le fonctionnement des auxiliaires dans la compréhension de phrases par le biais de méthodes de psychologie expérimentale . L' objectif principal est d' étudier si certains facteurs agissant sur la sélection et l' emploi des auxiliaires influencent la compréhension de phrase . Le premier chapitre porte sur le problème de sélection des auxiliaires avec les verbes intransitifs dans une langue donnée , mais également à travers les langues . Les verbes intransitifs se définissent comme des verbes qui n' ont pas de compléments d' objets ( direct ou indirect ) mais qui peuvent s' employer avec des compléments circonstanciels . Nous aborderons la possibilité de classifier les verbes intransitifs en plusieurs catégories dans le but de clarifier l' emploi des auxiliaires . Le chapitre 2 expose quelques données issues de la neuropsychologie . Si nous utilisons le langage de façon naturelle , cette activité devient très complexe en cas de lésion cérébrale . La production des patients aphasiques est dépourvue de certains mots dont les auxiliaires font partie mais qu' en est -il de leur compréhension ? Le chapitre 3 étudie la compréhension des auxiliaires chez des patients aphasiques en s' appuyant sur la Hiérarchie de Sélection des Auxiliaires ( Sorace , 2000 ) . A l' aide d' une tâche de détection de mots , notre objectif est d' examiner dans quelle mesure la compréhension des auxiliaires est affectée . Les trois derniers chapitres s' intéressent à la sélection des auxiliaires mais cette fois -ci chez des personnes qui ont appris une seconde langue . Comment un locuteur apprenant une langue étrangère sait qu' un verbe intransitif fonctionne avec l' auxiliaire etre ou l' auxiliaire avoir ? La méthode la plus simple serait sans doute de considérer un apprentissage par coeur . Néanmoins , nous pouvons nous demander si des principes généraux ne seraient pas à l' oeuvre . Notre objectif est de tester la Hiérarchie de Sélection des Auxiliaires de Sorace ( 2000 ) selon laquelle le choix des auxiliaires est plus facile pour certains verbes que pour d' autres . Le chapitre 4 traite de l' apprentissage d' une seconde langue et des différences de sélection d' auxiliaire entre une langue germanique ( l' allemand ) et une langue romane ( le français ) . Les chapitres 5 et 6 sont des chapitres expérimentaux relatifs à la seconde langue . Il s' agit de montrer , à l' aide de deux méthodologies en temps réel ( tâche d' Auditory Moving Window et tâche de Stop Making Sense ) , si les problèmes relatifs au choix des auxiliaires sont identiques ou différents en français et en allemand . Dans le chapitre 5 , nous nous intéressons à la compréhension des auxiliaires en langue française et en langue allemande par des locuteurs français . Le chapitre 6 aborde la compréhension des auxiliaires en langue française par des locuteurs allemands . CHAPITRE 1 La sélection des auxiliaires Ce chapitre commence par une définition de l' emploi des auxiliaires et par un examen de la difficulté de sélection pour les verbes intransitifs . Parce que les verbes intransitifs semblent se diviser en deux catégories ( Split Intransitivity ) , certains auteurs ont pensé qu' à chacune des catégories de verbes intransitifs correspondait un auxiliaire bien défini . Cependant , ce phénomène n' est pas aussi clair qu' il n' y paraît puisqu' un certain nombre d' exceptions existent . Des explications en terme purement syntaxique , purement sémantique ou ayant recours à l' interface syntaxe-lexique ont été avancées . Elles seront briévement décrites dans ce chapitre . Nous terminerons ce chapitre en présentant une approche aspectuelle du problème de classification des verbes intransitifs et de la sélection des auxiliaires : l' approche de Hiérarchie de Sélection des Auxiliaires proposée par Sorace ( 2000 ) . 1 . La sélection des auxiliaires des verbes intransitifs Les auxiliaires etre et avoir s' emploient pour former les temps composés d' un verbe . Benveniste ( 1966 ) observe que l' auxiliaire avoir a certaines propriétés en commun avec l' auxiliaire etre et d' autres qui lui sont propres . Par exemple , etre et avoir ont l' un et l' autre le statut formel d' auxiliaires temporels . etre et avoir sont admis l' un et l' autre comme auxiliaires temporels des mêmes verbes , selon que ces verbes sont ou non réfléchis , c' est-à-dire selon que le sujet et l' objet désignent ou non la même personne : etre quand sujet et objet coïncident ( " il s' est blessé " ) , avoir quand ils ne coïncident pas ( " il m' a blessé " ) . Ni etre ni avoir ne peuvent être employés à la forme passive ( " * il est est " , " * il est a " ) . etre et avoir sont en distribution complémentaire ; tous les verbes ont nécessairement l' un ou l' autre ( " il est arrivé ; il a mangé " ) y compris etre et avoir eux-mêmes , qui à l' état libre prennent avoir ( " il a été " , " il a eu " ) . Si les verbes ont nécessairement l' auxiliaire etre ou avoir , en langue française , l' auxiliaire avoir sert dans la grande majorité des cas et etre pour un nombre restreint de verbes ( Benveniste , 1966 ) . Les verbes qui s' accompagnent d' un auxiliaire pour former les temps composés sont dits transitifs ou intransitifs . Un verbe transitif est accompagné d' un complément d' objet qui peut être direct ( Il évoque son enfance ) ou indirect ( Il parle de son enfance ) . La différence entre un complément d' objet direct et un complément d' objet indirect étant la présence ou non d' une préposition . Un verbe intransitif , quant à lui , n' est pas accompagné d' un complément d' objet . Toutefois , ce type de verbe peut avoir des compléments circonstanciels de temps , de lieu , etc . ( Le poisson nage " dans son bocal " ) . En français , l' auxiliaire utilisé pour les verbes transitifs est avoir au passé composé ( 1 ) et si ce verbe est employé à la forme passive , son auxiliaire est alors etre ( 2 ) . Paul a renversé son verre d' eau Le verre d' eau est renversé par Paul La sélection des auxiliaires pour les verbes intransitifs en français est moins nette . Certains verbes prennent etre ( 3a ) , certains prennent avoir ( 3b ) , d' autres admettent les deux auxiliaires ( 3c ) . D' autres langues romanes ( e.g. , italien ) et germaniques ( e.g. , allemand , néerlandais , finlandais ) montrent également une alternance dans le choix de l' auxiliaire pour les verbes intransitifs . a . Jean est entré b . Jean a nagé c . la neige a / est fondu ( e ) La langue française admettrait certaines généralisations concernant la sélection des auxiliaires , comme le montre l' exemple ( 4 ) ( Abeillé & Godard , 2000 ; Jones , 1996 ) . a être est utilisé lorsque le verbe est accompagné du pronom réfléchi " se " , b . être est utilisé pour une sous catégorie de verbes intransitifs ( e.g. , mourir , naître , ) et la plupart des verbes qui indiquent un déplacement du sujet ( e.g. , partir , venir ) , c . avoir est utilisé dans tous les autres cas ( en particulier pour les verbes intransitifs ) d . être est également l' auxiliaire qui sert pour la formation du passif . L' ensemble de ces règles et plus particulièrement les règles ( 4b ) et ( 4c ) ne sont pas systématiques et peuvent difficilement être généralisables à d' autres langues . En effet , comme nous allons le voir , beaucoup d' exceptions apparaissent à l' intérieur d' une même langue et à travers les langues . 1.1 . L' Hypothèse Inaccusative L' hypothèse Inaccusative ( comme hypothèse syntaxique ) a été formulée pour la première fois par Perlmutter ( 1978 ) dans le cadre de la Grammaire Relationnelle et a été adoptée plus tard par Burzio ( 1986 ) dans le cadre du modèle " Government-Binding " . Cette hypothèse a été prise comme point de départ dans l' étude des propriétés complexes distinguant des classes de verbes intransitifs ( " Split Intransitivity " ) . Elle postule que la sélection des auxiliaires serait un indicateur fiable du statut des verbes intransitifs . En effet , dans toutes les langues avec choix de l' auxiliaire , cette classe de verbes ne serait pas homogène et se diviserait en deux sous classes : les verbes inaccusatifs ( sélectionnant etre ) et les verbes inergatifs ( sélectionnant avoir ) . Ces deux types de verbes intransitifs ont des propriétés syntaxiques et sémantiques différentes . L' hypothèse Inaccusative essaye de donner une base sémantique , systématique et valide à travers les langues , à la distinction syntaxique entre les verbes intransitifs . Plusieurs propriétés syntaxiques permettent de distinguer les verbes inaccusatifs des verbes inergatifs . Tout d' abord , les deux types de verbes se distinguent par leur représentation en structure profonde . La structure profonde est considérée comme une structure abstraite et sous-jacente qui détermine l' interprétation sémantique . La structure de surface est considérée comme l' organisation superficielle d' unités qui renvoie à la forme physique de l' énoncé , à sa forme perçue . Comme nous allons le montrer la structure profonde et la structure de surface ne sont pas nécessairement identiques . Les verbes inaccusatifs seraient des verbes intransitifs qui se comportent comme si leur sujet était un objet en structure profonde . Ces verbes n' ont pas d' argument externe et ils attribuent tous des rôles thématiques à l' intérieur du groupe verbal ( 5 ) ( noté VP pour Verbal Phrase ) . inaccusatif : [ VP V NP ] Le syntagme nominal ( noté NP pour Noun Phrase ) qui apparaît comme le sujet en structure de surface est en fait l' objet direct en structure profonde ( 6 ) . L' exemple ( 6a ) a donc la structure profonde [ S& 239;& 131;& 134; [ VP PART une lettre ] ] où S désigne la catégorie Sentence ( Phrase entière ) : Le nom " lettre " occupe une position d' objet direct en structure profonde et c' est en fait à cette position qu' est attribué le rôle d' Agent de l' action " partir " . a . Une lettre part . b . Une lettre i part t i Ce verbe n' attribue pas de Cas nominatif au nom qui occupe la position sujet . En linguistique , le Cas est un trait grammatical associé au nom , pronom et adjectif et exprimant la fonction syntaxique de celui -ci dans la phrase ou son rapport sémantique avec le processus exprimé par le verbe . Par exemple , l' accusatif est le Cas du complément d' objet et le nominatif est le Cas du sujet grammatical . Comme un nom doit recevoir un Cas , dans l' exemple donné , le nom " lettre " est " obligé " de se déplacer en tête pour recevoir un Cas nominatif ( 6b ) . Ce type de verbe serait marqué par l' auxiliaire être . Les verbes inergatifs seraient pour leur part des verbes intransitifs au sens fort comme " éternuer " . Ces verbes attribuent un rôle à la position de sujet en structure profonde ( 7 ) . Si nous prenons l' exemple " Pierre éternue " , l' argument unique de ce verbe inergatif est un sujet à tous les niveaux de représentation . Il a un argument externe ( au VP ) mais pas d' argument interne . Ce type de verbe serait marqué par l' auxiliaire avoir . inergatif : NP [ VP V ] Une autre propriété syntaxique qui permet de distinguer les deux types de verbes intransitifs concerne l' accord du participe passé . Burzio ( 1986 ) note qu' à la différence des verbes inergatifs , les verbes inaccusatifs montrent un accord avec le participe passé ( e.g. , Anne est arrivée ) . Burzio ( 1986 ) conclut que le sujet des verbes inaccusatifs est syntaxiquement analogue à l' objet direct des prédicats transitifs . Il suggère aussi que le sujet des verbes inaccusatifs pourrait également être analogue au sujet des prédicats passifs ( 8 ) qui est déplacé par rapport à sa position post-verbale en structure profonde . Ainsi , dans la phrase ( 8b ) , le sujet " Marie " monte de la position objet et s' accorde avec le participe passé " tuée " , présentant finalement l' accord attendu par les sujets inaccusatifs . a . J' ai tué Marie b . Marie a été tuée Ces données renforcent l' hypothèse selon laquelle les sujets inaccusatifs sont fondamentalement des objets directs . Toutefois , à la différence des objets directs , ces sujets reçoivent un Cas nominatif et non le Cas accusatif . Burzio ( 1986 ) note une corrélation entre la capacité d' un verbe à prendre un argument externe et sa capacité à assigner le Cas structural ( accusatif ) à l' objet . Cette corrélation est connue comme étant la Généralisation de Burzio ( 9 ) . En italien , Burzio ( 1986 ) note que les verbes inaccusatifs ont tous l' auxiliaire être , tandis que les verbes inergatifs ont tous l' auxiliaire avoir . Un verbe sans argument externe n' attribue pas le Cas accusatif Les propriétés sémantiques des deux types de verbes renvoient aux notions de rôles thématiques . Perlmutter ( 1978 ) commence son analyse de la distinction inaccusatif / inergatif en terme syntaxiques , cependant , il suppose aussi que les arguments syntaxiques des verbes sont déterminés par leur signification . Les arguments sémantiques spécifiques seraient assignés à des positions syntaxiques spécifiques en structure profonde . Perlmutter ( 1978 ) a mis en avant une hypothèse d' alignement universel selon laquelle il y aurait une transposition linéaire entre argument sémantique et positions syntaxiques spécifiques ( " Universal Alignment Hypothesis " , Perlmutter , 1978 ; Perlmutter & Postal , 1984 ) . Les arguments Agents seraient " alignés " avec des sujets syntaxiques et les arguments Patients seraient " alignés " avec les objets syntaxiques ( Baker , 1988 , 1997 ; Dowty , 1991 ; Perlmutter , 1978 ) . L' agentivité de l' argument aurait donc tendance à être corrélée avec l' inergativité et par conséquent avec les verbes sélectionnant l' auxiliaire avoir . Le rôle de Patient / Thème a tendance à être corrélé avec l' inaccusativité et par conséquent avec des verbes sélectionnant l' auxiliaire être . 1.2 . La dissonance inaccusative L' un des intérêts de l' hypothèse Inaccusative , selon Jones ( 1996 ) , est qu' elle réduirait le degré d' arbitraire dans la correspondance entre les rôles thématiques et les positions syntaxiques . Nous venons de voir que Perlmutter ( 1978 ) , Perlmutter et Postal ( 1984 ) , Johnson et Postal ( 1980 ) supposent une hypothèse d' Alignement Universel selon laquelle l' inaccusativité et l' inergativité d' une proposition sont universellement fondées sur la sémantique de cette proposition . Pour Rosen ( 1984 ) une telle hypothèse n' est pas acceptable . En effet , cette corrélation entre propriétés syntaxiques et sémantiques n' est pas aussi cohérente qu' elle était supposée à l' origine . Il a souvent été observé un manque de correspondance entre la représentation sémantique d' un verbe et le comportement syntaxique qui peut être prédit sur la base d' une telle représentation ( " unaccusative mismatches " ) . Cetains verbes sémantiquement très proches ont un comportement syntaxique différent suivant les langues ( Rosen , 1984 ) , et à l' intérieur d' une même langue les tests syntaxiques ne se recoupent pas complètement non plus ( Rosen , C . , 1984 ; Rosen , S.T . , 1996 ) : " Rougir " a un comportement syntaxique différent suivant les langues : inaccusatif en italien et inergatif en français ; ou encore " mourir " inergatif en Choctaw mais inaccusatif en français ( Davies , 1986 ) et en italien ( Rosen , 1984 ) . Les verbes " ronfler " et " rougir " qui dénotent tous les deux des comportements involontaires du corps , sélectionnent des auxiliaires différents en italien . Une simple description montre que le comportement des verbes est variable et dépend du contexte . Cette variabilité fondée sur le contexte semble contredire l' hypothèse de Perlmutter ( 1978 ) et Perlmutter et Postal ( 1984 ) dont la fondation est sémantique . De façon plus critique , un modèle de classification des verbes supposerait que deux verbes soient sémantiquement identiques uniquement s' ils sont syntaxiquement identiques . Et ainsi , toutes les fois où deux verbes se comportent différemment dans la syntaxe , il faudrait supposer , en principe , des classes sémantiques de plus en plus détaillées . Si les données syntaxiques l' exigent , elles pourraient finir en plaçant chaque verbe dans une classe différente . 2 . Les approches dichotomiques Ces discordances inaccusatives multiples ont reçu des explications théoriques différentes . Certaines théories ont abandonné la tentative de caractériser cette division sémantiquement ( Perlmutter , 1989 ; Rosen , 1984 ) , d' autres ont dénié l' existence d' un encodage syntaxique ( Dowty , 1991 ; Lieber Van Valin , 1990 ) . Enfin , certains auteurs ont envisagé une explication en maintenant les deux niveaux de représentation ( Levin & Rappaport Hovav , 1995 ) . 2.1 . Approche syntaxique de l' inaccusativité Comme nous l' avons vu précédemment , Rosen ( 1984 ) a montré que les verbes " ronfler " et " rougir " , bien que sémantiquement proches , ne sélectionnaient pas le même auxiliaire en italien . Elle en concluait que la distinction entre les verbes inaccusatifs et les verbes inergatifs n' étaient pas caractérisable seulement en terme sémantique . Certains auteurs ont donc proposé une explication purement syntaxique ( Calcagno Rosen , 1984 ) . Les verbes inaccusatifs auraient en commun une configuration syntaxique particulière ( i.e. , sélection d' un argument interne , manque d' argument externe , impossibilité d' attribuer un cas ) qui les distinguerait des verbes inergatifs quelle que soit leur classe sémantique . Elle ne nie pas l' existence d' une correspondance entre la signification des verbes et leur classification comme inaccusatif versus inergatif mais il n' existerait pas une seule propriété sémantique commune à tous les verbes inaccusatifs sélectionnée par tous les diagnostics et par toutes les langues ( Baker , 1983 ) . L' approche syntaxique égalise les mécanismes fonctionnels de Cas et d' accord avec les mécanismes interprétatifs des composantes de l' événement : les sujets Cas nominatifs sont interprétés comme des initiateurs et les objets Cas accusatifs sont interprétés comme des délimiteurs . En résumé , les évènements sont vus comme étant spécifiés dans la syntaxe . 2.2 . Approche sémantique de l' inaccusativité Cette approche suppose que l' inaccusativité est sémantiquement déterminée mais qu' elle n' est pas syntaxiquement encodée ( Van Valin , 1990 ; Dowty , 1991 ) . Dans le cadre de la " Role and Reference Grammar " ( RRG ) , Van Valin ( 1990 ) suggère que la différence entre les deux classes de verbes serait finalement déterminée par la Structure Logique ( " Logique Structure " : LS , dans laquelle des opérateurs sont utilisés pour signaler un phénomène inchoatif " become " , signaler l' agentivité " do " , indiquer une relation causale entre deux événements " cause " ) . La distinction entre verbes inaccusatifs et inergatifs serait fondée sur une représentation sémantique lexicale . La RRG suppose que la sémantique et la syntaxe constituent des niveaux d' interprétations indépendants , dans la mesure où la syntaxe ne dérive pas de la sémantique et la sémantique ne dérive pas de la syntaxe . La représentation sémantique est fondée sur la théorie de représentations sémantiques et lexicales des verbes de Dowty ( 1979 ) qui lui-même s' est appuyé sur la classification des verbes de Vendler ( 1967 ) ( 10 ) . a. . verbes d' état ( e.g. , exister , rester ) b . verbes d' achèvement ( e.g. , casser , mourir ) c . verbes d' accomplissement ( e.g. , nettoyer , aller ) d . verbes d' activité ( e.g. , crier , danser ) La sélection de l' auxiliaire dans la RRG est fondée sur cette classification des verbes de Dowty / Vendler . Les verbes sont classifiés sur la base de leurs propriétés aspectuelles inhérentes ( Aktionsart ) , et dans ces termes les A-verbes ( verbes prenant avoir ) sont tous des verbes d' activités et les E-verbes ( verbes prenant etre ) sont tous des verbes d' état , d' achèvement ou d' accomplissement . La caractérisation des deux classes de verbes intransitifs dans la RRG est d' une part la classe-SA ( représentant les verbes d' activités ) et la classe-SO ( toutes les autres classes de verbes ) : tous les verbes de la classe-SO ont un prédicat d' état dans leur LS ce qui n' est pas le cas des verbes de la classe-SA . Cette classification permet à Van Valin ( 1990 ) de formuler la règle suivante ( 11 ) concernant la sélection d' auxiliaire pour les verbes intransitifs . Sélection des auxiliaires avec des verbes intransitifs : ils sélectionnent être si la LS du verbe contient un prédicat d' état . 2.3 . Approches d' interface syntaxe-lexique de l' inaccusativité Par contraste , deux approches récentes se sont focalisés sur la nature des disparités syntaxiques / sémantiques , maintenant les deux niveaux de représentations et investissant l' interface entre les deux : l' approche projectionniste et l' approche constructiviste . La dichotomie des verbes intransitifs serait à la fois syntaxiquement et sémantiquement déterminée ( Legendre , 1989 ; Levin & Rappaport Hovav , 1989 , 1995 ) . Les deux approches suggèrent que les dissonances inaccusatives ne sont problématiques que si les inaccusatifs et les inergatifs doivent former des classes syntaxiquement et sémantiquement homogènes . Les approches projectionnistes et constructivistes essayent d' identifier les composantes sémantiques qui sont syntaxiquement pertinentes dans différentes langues . Plus spécifiquement , l' approche projectionniste suggère que quatre règles de liaison sont pertinentes dans la dichotomie intransitive : la règle de causation immédiate , la règle de changement orienté , la règle d' existence , la règle par défaut ( Levin , 1985 ; Levin & Rappaport Hovav , 1992 , 1994 , 1995 ; Rappaport Hovav , Laughren , & Levin , 1993 ; Rappaport Hovav & Levin , 1998 ) . Selon Levin et Rappaport Hovav ( 1995 ) , les verbes inergatifs imposent l' activité ainsi que la " causation " ( la règle de " causation immédiate " prédit les verbes inergatifs ) , alors que les verbes inaccusatifs imposent l' accomplissement / l' achèvement ( les règles de changement orienté et d' existence prédisent les verbes inaccusatifs ) . Dans les langues ayant un choix d' auxiliaire , ces règles prédisent une corrélation entre la " cause immédiate " et l' auxiliaire avoir , ainsi qu' entre le " changement orienté " , ou l' " existence " et etre . L' approche constructiviste considère l' inaccusativité et l' inergativité d' une phrase comme étant une propriété du prédicat au niveau de la phrase , et non une propriété lexicale du verbe ( Arad , 1998 , 1999 ; Borer , 1994 , 1996 ; Hale & Keyser , 1986 , 1987 , 1993 , 2002 ; McClure , 1995 ; Travis , 2000 ; van Hout , 1996 , 2000 , Zaenen , 1993 ) . Puisque l' entrée lexicale d' un verbe ne contient aucune information concernant la spécification d' un argument interne ou externe , n' importe quel verbe est libre d' entrer dans une configuration syntaxique , et par conséquent de recevoir plusieurs interprétations aspectuelles . Cette approche , à la différence de l' approche projectionniste , prédit une flexibilité dans la réalisation syntaxique des arguments . 3 . La Hiérarchie de Sélection des Auxiliaires ( HSA ) Contrairement aux approches dichotomiques , Sorace ( 2000 ) propose que la sélection des auxiliaires est caractérisée par une gradation . Le point de départ de la Hiérarchie de Sélection des Auxiliaires ( Auxiliary Selection Hierarchy , Sorace , 2000 ) est un ensemble de faits qui caractérisent la dichotomie intransitive ( " Split Intransitivity " ) dans un certain nombre de langues de l' Europe occidentale . Tout d' abord , d' une langue à une autre , certains verbes tendent à avoir un comportement cohérent concernant la distinction inaccusatif / inergatif , ce qui n' est pas le cas pour d' autres . À l' intérieur des langues , certains verbes sont invariablement inaccusatifs ou invariablement inergatifs indépendamment du contexte , alors que d' autres sont variables . Pour certains verbes , les locuteurs natifs ont des intuitions fermes et claires concernant le choix de l' auxiliaire ( c' est-à-dire qu' ils décident facilement si l' auxiliaire employé est correct ou non ) . En s' intéressant à la connaissance des locuteurs natifs français et italien sur les deux classes de verbes intransitifs , et en considérant l' acquisition de ces connaissances par des apprenants d' une seconde langue , Sorace ( 1993 ) établit une hiérarchie inaccusative ( Tableau 1 ) . Elle part du constat que les généralisations des approches purement syntaxiques apparaissent être contraintes dans une grande majorité des cas par des facteurs sémantiques . Elle se fonde sur des données diachroniques et synchroniques dans les langues romanes . Au niveau synchronique , les intuitions de locuteurs natifs italiens montrent l' existence d' une hiérarchie qui guide leur jugement de grammaticalité sur des propriétés syntaxiques telles que la sélection des auxiliaires . Le choix de l' auxiliaire incorrect ( avoir au lieu de etre pour les verbes inaccusatifs et etre au lieu de avoir pour les verbes inergatifs ) est moins inacceptable pour certains verbes que pour d' autres ( Rohlfs , 1969 ) . Au niveau diachronique , les études sur le développement historique des auxiliaires dans les langues romanes montrent qu' une classe de verbes tend à être la dernière affectée par le remplacement de etre par avoir , alors que d' autres classes de verbes sont plus vulnérables au changement . De ces données , Sorace ( 1993 ) ressort deux dimensions de contexte ( concret / abstrait ; mouvement / statique ) . Tableau 1 . Hiérarchie inaccusative de Sorace ( 1993 ) en français et en italien . avoira a Seule exception à cette catégorie , le verbe " rester " qui sélectionne l' auxiliaire etre Cette hiérarchie inaccusative montre qu' en français la ligne de partage entre les verbes qui sélectionnent l' auxiliaire etre et les verbes qui sélectionnent l' auxiliaire avoir est située plus haut qu' en italien ( au niveau des verbes de changement de condition ) . L' italien a une liste plus importante de verbes inaccusatifs que le français . Dans toutes les langues et jusqu'à un certain point , les verbes inaccusatifs tendraient à sélectionner etre et les verbes inergatifs avoir . 3.1 . La notion de télicité et d' agentivité au centre de cette hiérarchie aspectuelle Sorace ( 2000 ) propose que la sélection des auxiliaires est sensible à des facteurs aspectuels et thématiques ( Grimshaw , 1990 ; Baker , 1997 ) . Les deux notions clés dans cette hiérarchie sont la télicité et l' agentivité . Un événement télique progresse par rapport un but et un événement atélique n' a pas de but fixé . La propriété d' un évènement ayant ou non un point final temporel a été référencée comme la distinction bornée / non bornée ( Jackendoff , 1990 ) , la distinction télique / atélique ( Smith , 1991 ) , la distinction délimitée / non délimitée ( Tenny , 1987 , 1994 ) . La télicité serait une propriété aspectuelle largement associée à l' inaccusativité ( Perez-Jimenez Zaenen , 1993 sur le néerlandais ; Zribi-Hertz , 1987 sur le français ) . Les verbes inaccusatifs sont caractérisés par leur aspect délimité ( télique ) alors que les verbes inergatifs sont caractérisés par leur aspect de durée ( atélique ) ( Borer , 2004 ; van Hout , 2004 ) . Toutefois , la télicité à elle-seule ne peut suffire à prédire l' auxiliaire etre en français . Prenons l' exemple du verbe " aller " , ce verbe dénote un mouvement non orienté ( " allers vers la gare " & 239;& 131;& 160; atélique ) mais également un mouvement orienté si une borne est spécifiée ( " aller à la gare " & 239;& 131;& 160; télique ) . Pourtant , en français ce verbe sélectionne etre indépendamment du contexte ( Mélis , 1985 ) . De plus , beaucoup de verbes téliques tendent à sélectionner avoir sans raison évidente : " expirer " , " succomber à " , " périr " , " trépasser " ( Legendre & Sorace , 2003 ) . L' autre notion clé est celle d' agentivité . Le seul argument des verbes inergatifs tend à être un Agent alors que le seul argument des verbes inaccusatifs tend à être un Thème ( ou un Patient , ou un " Subisseur " ) . Perlmutter ( 1978 ) spécifie que l' agentivité est un facteur sémantique fondamental à l' inergativité . La télicité serait donc fortement corrélée avec etre et le processus agentif , fortement corrélé avec avoir . Sorace ( 2000 ) propose une hiérarchie qui met ces deux notions au centre de la sélection des auxiliaires . La télicité serait le facteur principal dans le choix entre l' auxiliaire etre et avoir . L' agentivité serait un facteur secondaire qui établirait des distinctions supplémentaires dans l' ensemble des verbes sélectionnant avoir . Les verbes qui ne sont ni téliques ni agentifs présenteraient une variation dans le choix de l' auxiliaire . Tout prédicat est associé à une structure d' évènement ( Grimshaw , 1990 ; van Hout , 1996 ; Pustejovsky , 1995 ) . Cette structure tient compte de deux sous évènements aspectuels distincts : un processus et une transition ou un état . Sorace ( 2000 ) rend compte de ces différences systématiques à l' intérieur des classes inaccusatives / inergatives en postulant une hiérarchie , fondée sur des paramètres aspectuels , qui distingue des verbes dits " centraux " et des verbes dits " périphériques " ( cf. Figure 1 ) . Figure 1 . Hiérarchie de sélection des auxiliaires . Aux extrémités de la hiérarchie se trouvent les verbes " centraux " qui ont un comportement ferme et cohérent concernant le choix de l' auxiliaire . En effet , dans les catégories de verbes dits " centraux " sont inclus les verbes de changement de lieu sélectionnant invariablement l' auxiliaire etre ainsi que les verbes de processus contrôlés sélectionnant invariablement l' auxiliaire avoir . Ces verbes sont caractérisés par un certain nombre de caractéristiques comme le fait d' avoir un comportement syntaxique non variable d' une langue à l' autre et non variable à l' intérieur de chaque langue ( ils sélectionnent le même auxiliaire quel que soit le contexte ) . Entre les extrêmes ( au centre de la hiérarchie ) se trouvent les verbes dits " périphériques " . Ce sont ces verbes qui manifestent le plus de variations puisque ces verbes sont sensibles à des facteurs apportés par des éléments de la phrase dans laquelle ils apparaissent . Ce sont donc eux qui donnent lieu aux " dissonances intransitives " . Les verbes de changement de lieu comme " arriver " et les verbes de processus contrôlé sans déplacement comme " travailler " sont associés au degré le plus élevé de cohérence dans la sélection de l' auxiliaire . Les verbes périphériques , qui se trouvent entre les deux extrêmes manifestent des variations . 3.2 . La notion de gradation Selon Sorace ( 2000 ) , les approches d' interface de l' inaccusativité posent problème à plusieurs niveaux . Dans l' approche constructiviste , un verbe pouvait recevoir plusieurs interprétations aspectuelles puisque l' entrée lexicale de ce verbe ne contiendrait aucune information concernant la spécification d' un argument interne ou externe . Pour Keller et Sorace ( 2003 ) , cette approche prédit effectivement une flexibilité dans la réalisation syntaxique des arguments mais au prix d' une sur généralisation . Ensuite , dans l' approche projectionniste de Levin et Rappaport Hovav ( 1995 ) les règles de " causation immédiate " , " de changement orienté " et d' " existence " ne seraient pas justifiées concernant la validité inter langue . La règle d' " existence " isole des verbes inaccusatifs ( sélectionnant etre ) en italien mais pas en néerlandais , en français ou en allemand . Pour Sorace ( 2000 ) , les deux notions de télicité et d' agentivité doivent être distinguées pour pouvoir expliquer le fait que la sélection de l' auxiliaire ne pose pas de problème pour des verbes comme ceux de processus sans déplacement alors que cette sélection est beaucoup plus variable pour des verbes de processus non contrôlés . Pour Sorace ( 2000 ) , le problème essentiel de la conception de Levin et Rappaport Hovav ( 1995 ) est que la télicité , comme l' agentivité , est conçue comme une propriété discrète d' un verbe : le verbe a ou non cette propriété . Pour eux , si ces deux notions étaient des déterminants de l' inaccusativité / inergativité , les verbes qui ne sont ni l' un ni l' autre devraient présenter un comportement uniforme , ce qui n' est vraisemblablement pas le cas . Sorace reprend les exemples des verbes d' émission et d' un verbe comme " rouler " , qui pour Levin et Rappaport Hovav ne sont ni téliques , ni agentifs , donc ils sont à la fois inaccusatifs et inergatifs . Elle se demande pourquoi ces verbes devraient présenter un comportement syntaxique uniforme simplement parce qu' ils ne sont ni téliques ni agentifs . Elle propose une gradation dans ces deux notions . Elle suggère que ces verbes peuvent lexicalement exprimer la télicité à différents degrés , selon qu' ils dénotent un état final , ou une série d' états intermédiaires . Pour Sorace ( 2000 ) il existe une relation asymétrique entre le changement orienté et la télicité inhérente . Tous les verbes téliques impliquent un changement orienté mais le changement orienté n' implique pas nécessairement la télicité : le degré d' achèvement de verbes comme " élever " et " refroidir " implique un changement indéfini dans une direction particulière mais il ne dénotent pas l' achèvement d' un état final . Ceci peut être illustré en comparant des verbes de mouvement dirigé en français et en italien . Il est possible de distinguer quatre types de verbes de mouvement ( Sorace , 2004 ) : Verbes dénotant des mouvements délimités de façon télique et inhérente : " arriver " - ( etre en français et en italien ) . Verbes dénotant un mouvement dirigé mais non délimité : " monter " ( etre en italien mais etre ou avoir en français ) . Verbes dénotant lexicalement un mouvement non dirigé , atéliques , qui peuvent devenir téliques dans certains contextes : " courir " ( etre ou avoir en italien mais avoir en français ) . Verbes dénotant un mouvement non dirigé , atélique qui ne peuvent pas devenir télique dans aucun contexte : " vagabonder " ( avoir en italien et en français ) . L' agentivité peut également être vue comme une notion susceptible de gradient : elle dépend de la combinaison de plusieurs éléments du prédicat où le verbe apparaît , par exemple du caractère volontaire du sujet ( van Hout , 1996 ) et de sa prééminence aspectuelle dans la structure d' évènement ( Grimshaw , 1990 ) . 3.3 . Une hiérarchie fondée sur la théorie de l' optimalité Pour Legendre et Sorace ( 2003 ) , la HSA constitue une généralisation qui met en évidence un point de partage différent pour la distinction inaccusatifs et inergatifs en français et en italien . La HSA prendrait son sens dans une grammaire fondée sur l' optimisation des contraintes . Ces contraintes impliquent cinq traits binaires pour décrire les classes et les sous classes de verbes : & 194;& 177; télique , & 194;& 177; mouvement , & 194;& 177; changement orienté , & 194;& 177; contrôle par un protagoniste ( ou agentivité ) , & 194;& 177; état . L' analyse de la sélection de l' auxiliaire de Legendre et Sorace ( 2003 ) est fondée sur la théorie de l' Optimalité telle qu' elle est définie par Prince et Smolensky ( 1993 ) et adaptée à la syntaxe ( Boersma , Dekkers , Grimshaw , 1997 ; Legendre , 1998 , 2001 ) . Les contraintes sont universelles et hiérarchisées . Les contraintes sont universelles mais elles ne sont pas rigides et peuvent être violées . Les analyses des disparités inaccusatives et de gradation en terme de contraintes non rigides remontent à Legendre ( 1990 ) . Les contraintes sont hiérarchisées : la violation d' une contrainte hiérarchiquement inférieure est moins grave que la violation d' une contrainte située en haut de la hiérarchie . Les hiérarchies de contraintes constituent en fait la grammaire d' une langue , de sorte que les agencements différents des mêmes contraintes peuvent donner des produits propres aux dialectes et langues différents ( Archengeli & Langendoen , 1997 ) . Dans cette perspective , la grammaticalité est conçue comme une notion relative : elle dépend du degré de satisfaction d' une hiérarchie des contraintes ( Kager , 1999 ) . L' analyse de Legendre et Sorace ( 2003 ) aligne deux échelles pour arriver à un ensemble de relations qui expriment la façon dont un trait donné ( e.g. , télique ) est projeté sur une relation grammaticale ( e.g. , objet ) . Elle prend en compte une échelle relationnelle : Sujet / Objet ( direct ) ( Croft , 1990 ; Perlmutter , 1983 ) mais aussi des échelles relatives à chaque trait listé : atélique / télique ( Dowty , 1979 ; Grimshaw , 1990 ; Vendler , 1967 ) , changement non orienté / changement orienté , pas de mouvement / mouvement , etc . L' idée clé réside dans le fait que la sélection des auxiliaires résulte d' une compétition entre les configurations inergatives ( avec un argument sujet ) et les configurations inaccusatives ( avec un argument objet ) . La configuration qui l' emporte sur l' autre est celle qui est la mieux formée , selon un ensemble de contraintes violables . Une configuration peut survivre à la violation d' une contrainte , à condition que cela permette à une contrainte qui a un niveau supérieur d' être satisfaite . 4 . Synthèse du chapitre 1 Ce chapitre a abordé la question des contraintes de sélection des auxiliaires concernant les verbes intransitifs . Les verbes intransitifs se diviseraient en deux sous classes : les verbes inaccusatifs et les verbes inergatifs . Et à chacune de ces deux classes de verbes correspondrait un auxiliaire bien défini . Cependant , un certain nombre d' exception a été observé ( dissonances inaccusatives ) à l' intérieur d' une même langue et à travers les langues . Certains auteurs ont tenté d' expliquer ce phénomène en terme purement syntaxique ( Rosen , 1984 ) ou en terme purement sémantique ( Van Valin , 1990 ) . Certains auteurs , dans le but de fournir une typologie explicite de l' articulation entre syntaxe et lexique préfèrent maintenir les deux niveaux de représentations et cherchent à identifier les composantes sémantiques qui sont syntaxiquement pertinentes ( Levin Hale & Keyser , 2002 ) . L' hypothèse de la hiérarchie de sélection des auxiliaires ( Sorace , 2000 ) remet en cause les théories existantes sur l' interface syntaxe-lexique . Pour Sorace ( 2000 ) ainsi que pour Legendre et Sorace ( 2003 ) , l' approche projectionniste n' explique pas pourquoi certains verbes sont plus susceptibles d' avoir un comportement variable et cette approche conduit à une prolifération des entrées lexicales . L' approche constructiviste implique que la variation constatée est reliée à des types spécifiques de verbes plutôt qu' à des contextes . De plus , sur la base empirique ces deux approches sont limitées . Le point de départ de ces études empiriques vient d' un ensemble de faits qui caractérise certaines langues . En effet , les intuitions des locuteurs natifs sur le choix des auxiliaires est catégorique pour certains types de verbes mais beaucoup moins déterminé pour d' autres types de verbes . En se fondant sur les intuitions de locuteurs natifs , Sorace ( 2000 ) rend compte des différences à l' intérieur des classes de verbes en postulant une hiérarchie qui révèle des points de partage différents en français et en italien entre les deux auxiliaires pour la distinction inaccusatifs / inergatifs . Cette hiérarchie est fondée sur des paramètres aspectuels ( potentiellement universels ) qui met la notion de changement dynamique télique au centre de l' inaccusativité et celle d' activité agentive sans déplacement au centre de l' inergativité . La sélection de l' auxiliaire est caractérisée par une gradation , et non plus un système binaire , dans la sensibilité aux propriétés aspectuelles et sémantiques des verbes en tant qu' items lexicaux . La télicité serait le facteur principal qui sépare les verbes sélectionnant etre de ceux qui sélectionnent avoir . L' agentivité serait un facteur secondaire qui établit des distinctions supplémentaires dans l' ensemble des verbes sélectionnant avoir . Les verbes qui sont moins spécifiés en ce qui concerne la télicité et l' agentivité sont ceux qui donnent lieu aux dissonances inaccusatives . Cette hiérarchie donne une analyse de la sélection des auxiliaires fondée sur le concept de l' optimisation ( Legendre & Sorace , 2003 ) tel qu' il est défini dans la théorie de l' Optimalité ( Prince et Smolensky , 1993 ) et adapté à la syntaxe ( Boersma , Dekkers , Grimshaw , 1997 ; Legendre , 1998 , 2001 ) . L' idée de base de cette alternative à la théorie des Principes et Paramètres ( Chomsky , 1981 ) est que les contraintes sont universelles mais qu' elles ne sont pas rigides et qu' elles peuvent être violées . Cette analyse combine deux échelles , qui font références à des traits aspectuelles et de sémantique lexicale d' une part ( e.g. , la télicité ) et à des configurations syntaxiques ( e.g. , objet ) d' autre part . CHAPITRE 2 L' aphasie et la sélection des auxiliaires Dans ce chapitre , nous rapporterons des données relatives au domaine de la neuropsychologie . En particulier , nous envisagerons les résultats d' études examinant les performances de malades aphasiques , dont le traitement du langage est altéré suite à une lésion cérébrale . Ce chapitre a pour objectif de décrire les troubles de compréhension des verbes et des auxiliaires des aphasiques . La compréhension orale des aphasiques de Broca a longtemps été considérée comme étant préservée . Cependant , Caramazza et Zurif ( 1976 ) ont été les premiers à montrer des déficits de compréhension et à conclure à une perte totale de compétence syntaxique . Par la suite , plusieurs auteurs ont remis en cause cette conclusion . Nous décrirons les différentes hypothèses explicatives des troubles sélectifs de compréhension . Ce chapitre se terminera par la description de données expérimentales sur la compréhension et la production des verbes et/ou des auxiliaires chez des patients aphasiques . 1 . Bref historique Une des raisons pour lesquelles l' aphasie a retenu tant d' attention est sa pertinence pour la thèse de la modularité qui considère le langage comme un module indépendant d' autres systèmes cognitifs tels que le raisonnement , ou la mémoire . Ainsi , le langage serait un système indépendant gouverné par ses propres règles et principes ( Fodor , 1986 ) . Les analyses linguistiques du discours aphasique peuvent ainsi fournir des informations sur la localisation d' une fonction linguistique particulière : s' il est possible de montrer qu' une certaine propriété X de la langue est affectée dans une population avec une lésion dans l' aire A , il est possible ( mais pas nécessairement vrai ) de supposer que cette aire est impliquée dans le traitement cognitif de X ( Avrutin , 2001 ) . En 1865 , Trousseau a introduit le terme d' aphasie " manque de communication au moyen du langage " ( a- " manque " + phasia " mot " ) , pour décrire un trouble du langage acquis causé par des dommages cérébraux dans l' hémisphère responsable de la communication . Cette pathologie consiste en la perte complète ou partielle de la faculté du langage chez des personnes qui , auparavant , avaient un système langagier fonctionnant normalement . L' aphasie peut être la conséquence d' un accident vasculaire cérébral , d' une hémorragie cérébrale , d' un traumatisme crânien , d' un processus expansif comme une tumeur cérébrale , ou encore d' une infection comme l' encéphalite . Ce syndrome peut affecter la production et la compréhension dans toutes les modalités ( oral , écrit , lecture , compréhension , gestuelle ) de façon plus ou moins importante , selon le lieu et la taille de la lésion . 1.1 . L' aphasie de Broca En 1861 , l' anthropologue et médecin Paul Broca a décrit pour la première fois une perte de langage chez les personnes victimes de traumatismes , selon Broca : " Cette abolition de la parole chez les individus qui ne sont ni paralysés ni idiots , constitue un symptôme assez singulier pour qu' il paraisse utile de la désigner sous un nom spécial . Je lui donnerai donc le nom d' aphémie ; car ce qui manque à ces malades , c' est seulement la faculté d' articuler les mots . Ils entendent et comprennent tout ce qu' on leur dit . " ( p. 332 ) . Il a relaté le cas d' un patient , Mr Leborgne , qui avait perdu l' usage de la parole , alors que sa compréhension orale ne semblait pas être altérée . Broca a montré que ce type d' aphasie ( terme utilisé par Trousseau en 1865 pour des raisons étymologiques et qui prévaudra ) survenait lors d' une atteinte de la partie frontale au niveau du pied de la troisième circonvolution de l' hémisphère cérébral gauche . Cette aire antérieure du langage est aujourd'hui appelée " Aire de Broca " . Les patients aphasiques de Broca des troubles majeurs de l' expression , avec une diminution de la fluidité de la parole , le langage spontané est réduit , les troubles de l' articulation sont souvent importants . La compréhension semble assez peu touchée , mais l' expression est gravement diminuée ( style " télégraphique " , rythme de parole très haché , débit ralenti , vocabulaire réduit à quelques mots , articulation très difficile , syntaxe déficiente ) . 1.2 . L' agrammatisme Un symptôme de l' aphasie de Broca est l' agrammatisme . Kussmaul ( 1877 ) a proposé le terme d' agrammatisme pour désigner une perturbation de l' ordre des mots et le terme d' akataphasie pour faire référence à l' omission et à la déformation des inflexions . Jakobson ( 1941 ) utilisera le terme d' agrammatisme pour définir un discours non-fluent , hésitant et télégraphique . Ce discours est marqué par l' omission et l' utilisation réduite de certaines classes grammaticales ( vocabulaire de la classe fermée " CF " ) . L' agrammatisme peut donc se définir comme un trouble dans la production des phrases , caractérisé en premier lieu par une réduction de leur longueur des phrases et une simplification de leur structure syntaxique . La construction de la phrase se résume en une simplification des relations entre les propositions avec une rareté des propositions relatives . La structure du syntagme verbal est élémentaire avec peu d' extensions . Comme beaucoup de mots appartenant au vocabulaire de la classe fermée ( items de la CF ) , les verbes auxiliaires sont fréquemment omis de la production agrammatique ( Caplan , 1992 ) . En effet , les mots qui ne sont pas vraiment nécessaires à la transmission d' un message , spécialement les articles et les pronoms ( CF ) , ainsi que les marques de conjugaison ou de déclinaison , ne sont que rarement utilisés . Dans les cas sévères , seuls les mots principaux ( e.g. , noms communs ) , les adjectifs et les verbes sous leur forme infinitive ou participiale , sont produits . Jusque dans les années 70 , il était communément admis que les aphasiques de Broca souffraient seulement d' un trouble dans la production du langage . Toutefois , Caramazza et Zurif ( 1976 ) ont montré que leur compréhension était également altérée . Depuis lors , beaucoup d' auteurs ont montré que l' agrammatisme affectait également la capacité de compréhension du langage ( Burchert , De Bleser & Sonntag , 2003 ; Grodzinsky , 1995a , 2000 ; Zuckerman , Bastiaanse & Van Zonnevald , 2001 , parmi d' autres ) . Cependant , certains auteurs reportent le cas de patients aphasiques de Broca agrammatiques sans troubles de compréhension syntaxique ( e.g. , Caramazza Druks Nespoulous , Dordain , Perron , Ska , Bub , Caplan , Mehler & Lecours , 1988 ) . 1.3 . Les autres types d' aphasie En 1874 , Wernicke , neurologue allemand , a montré que certains patients souffrant de lésions dans l' hémisphère gauche avaient des troubles très différents de ceux de Mr Leborgne et en particulier des troubles massifs de compréhension . Ces patients avaient une lésion au niveau temporal de l' hémisphère gauche . Cette zone contiendrait des " images auditives " des mots qui doivent être activées lors de la compréhension du langage . L' aphasie de Wernicke se caractérise , en production orale , par des paraphasies phonémiques et sémantiques . Ces patients peuvent articuler sans aucun problème , mais leur discours est inintelligible , les mots ne sont pas utilisés à bon escient et les erreurs de prononciation importantes sont dues à une mauvaise sélection de phonèmes . Outre l' aphasie de Broca et de Wernicke , il existe également des aphasies dites de conduction , transcorticales et où les zones cérébrales affectées diffèrent . 1.3.1 . Aphasie de conduction Les cas d' aphasie de conduction sont relativement rares parmi la population aphasique et peu d' études ont été conduites ( Bartha et Benke , 2003 , pour la plus récente ) . L' aphasie de conduction est caractérisée par une difficulté disproportionnée de répétition en l' absence d' un sévère désordre de compréhension du langage . Le langage spontané est marqué par des difficultés à trouver les mots et par des substitutions paraphrastiques ( Benson , Sheremata , Bouchard , Segarra , Price & Geschwind , 1973 ; Caramazza , Basili , Koler Goodglass , 1992 ; Rothi , McFarling & Heilman , 1982 ) . Les patients sont généralement conscients de leurs erreurs et produisent des autocorrections répétitives , connues comme des " conduites d' approche " . L' aphasie de conduction est souvent considérée comme un syndrome de déconnexion dans les centres du langage antérieurs et postérieurs par lésion de la matière blanche impliquant le faisceau arqué . Toutefois , il existe un autre pattern de lésion qui est aussi associé à l' aphasie de conduction . En effet , plusieurs auteurs ont reporté le cas d' aphasie de conduction avec des lésions impliquant le gyrus temporal supérieur postérieur gauche , l' insula , et quelquefois le gyrus supramarginal ( Hickok , Erhard , Kassubeck , Helms-Tillery , Naeve-Velguth , Strupp & Ugurbil , 2000 ) . 1.3.2 . Aphasie transcorticale Le terme d' aphasie transcorticale désigne des troubles du langage provoqués non pas par des lésions des centres du langage mais par l' interruption des voies d' associations entre le " centre des concepts " et le centre des images motrices des mots ( aphasie transcorticale motrice ) ou bien le centre des images acoustiques des mots ( aphasie transcorticale sensorielle ) . En terme anatomique , ces lésions occupent une zone en couronne périsylvienne entraînant une entrave à l' accès ou à la " sortie " des centres du langage . Il existe une aphasie transcorticale mixte pour laquelle la seule activité linguistique se limite à la répétition voire à l' écholalie . 2 . L' origine du déficit de compréhension 2.1 . Le problème des phrases réversibles Comme signalé plus haut , jusque dans les années 70 , les études ont montré que seule la production des aphasiques de Broca agrammatiques était affectée , leur compréhension étant intacte . Caramazza et Zurif ( 1976 ) ont exploré les déficits de compréhension associés à l' agrammatisme en montrant que les aphasiques de Broca ne pouvaient pas comprendre certaines phrases réversibles . Ils ont présenté des phrases du type : subordonnées relatives objet réversibles ( 12 ) , subordonnées relatives objet non réversibles ( 13 ) . Le lion que le tigre suit est gros La pomme que le garçon mange est rouge Les patients devaient choisir parmi des images celle qui décrivait le mieux la phrase entendue . Cette tâche d' appariement phrase-image a mis en évidence un pattern de résultat particulier . Ces patients étaient tout à fait capables de choisir la bonne image dans le cas de phrases comme ( 13 ) mais obtenaient des performances aléatoires dans les phrases de type ( 12 ) . Ces dernières nécessitaient une bonne analyse syntaxique des énoncés et les performances aléatoires suggéraient donc un trouble sélectif de l' analyse syntaxique des phrases . Sur la base de ces résultats , les auteurs ont conclu que ces patients étaient " asyntaxiques " . Ils ne généraient pas de représentations syntaxiques associées à la phrase qu' ils avaient entendue et mettaient plutôt en oeuvre des dispositifs heuristiques pour deviner la signification des phrases à partir de l' ordre des mots de contenu et des connaissances qu' ils avaient du monde . Ainsi , dans le cas des subordonnées objet réversibles ( 12 ) , l' application d' une heuristique assignant au premier nom d' une phrase la fonction de sujet conduirait à une compréhension incorrecte . Comme la plausibilité sémantique ne contredit pas cette conclusion ( le lion peut suivre le tigre tout comme le tigre peut suivre le lion ) , les patients aphasiques interprèteraient mal ces phrases . Dans le cas des subordonnées objet non réversibles ( 13 ) , l' approche de l' ordre canonique des mots attribuerait le rôle d' Agent au premier syntagme nominal ( " pomme " ) , mais les connaissances relatives à la plausibilité des situations ( la pomme ne pouvant pas manger un garçon ) , permettraient d' éviter le choix d' une interprétation incorrecte de l' énoncé . Ces données ont donc révélé que la compétence syntaxique serait affectée , et ce , aussi bien en production qu' en compréhension . Cependant , la thèse de la perte de compétence syntaxique pour des aphasiques de Broca a été rapidement remise en cause . Plusieurs études ont montré une bonne compréhension des phrases subordonnées sujet et clivées sujet ( e.g. , " Le lion qui suit le tigre est gros " ) chez des patients qui pourtant avaient une compréhension aléatoire des phrases subordonnées objet et clivées objet ( Caplan & Futter , 1986 ; Grodzinsky , 1990 ; Shapiro , Gordon , Hack & Killackey , 1993 ) . 2.2 . L' importance de la structure canonique dans la compréhension des phrases : la théorie de destruction des traces Il existe une utilisation préférentielle de l' ordre canonique privilégiant ainsi l' ordre Sujet-Verbe-Objet ( SVO ) dans les langues comme le français ou l' anglais . Les patients avec une aphasie de Broca montrent une bonne compréhension des phrases structurées canoniquement mais une faible compréhension des phrases ne respectant pas cet ordre canonique ( Beretta , Harford , Patterson Caplan Caramazza & Zurif , 1976 ; Drai Grodzinsky , 1989 ; Zurif & Piñango , 1999 ) . Les patients aphasiques de Wernicke , quant à eux , ont des problèmes de compréhension avec les deux formes de phrases qui suggèrent l' influence de facteurs sémantiques lexicaux seuls ( Caramazza Heilman Piñango & Zurif , 1998 ) . Il est maintenant bien établi que les patients aphasiques de Broca ont de bonnes performances dans les constructions canoniques ( des constructions où le rôle d' Agent apparaît avant le rôle de Patient , comme dans les phrases actives ou les subordonnées sujet ) . Par contraste , ces patients ont des performances aléatoires dans leurs contreparties non canoniques , comme les passives , les subordonnées objet ou les clivées objet ( Ansell Beretta et al. , 1996 ; Beretta , Piñango , Patterson , Caplan Caramazza Grodzinsky , 1989 , 1995 , 2000 ; Grodzinsky , Piñango , Zurif Hagiwara , 1993 ; Hagiwara Hickok , Zurif & Canseco-Gonzales , 1993 ; Lineberger , Schwartz Schwartz , Saffran & Marin , 1980 ) . Cependant , la question concernant les performances aléatoires des phrases passives est loin d' être résolue . Caramazza , Capasso , Capitani & Miceli ( 2005 ) remettent en cause cette idée . Les auteurs utilisent une tâche d' appariement phrase-image auprès de 38 patients aphasiques de Broca agrammatiques italiens . Cette tâche comprend des phrases réversibles actives ( e.g. , Il ragazzo abbraccia la ragazza = le garçon embrasse la fille ) et passives ( e.g. , La ragazza è abbracciata dal ragazzo = la fille est embrassée par le garçon ) . Les résultats ont montré que seulement 6 patients sur 38 avaient des performances de compréhension aléatoires pour les phrases passives . Pour Caramazza et al. ( 2005 ) , ces résultats confirment que les patients aphasiques de Broca ne présentent pas un profil homogène dans leur performance de compréhension de phrases ( Berndt , Mitchum Caramazza , Capitani , Rey & Berndt , 2001 ) . Dans l' approche générative , Kayne ( 1975 ) et Chomsky ( 1981 ) ont proposé que lors de la production et de la compréhension de la parole , les déplacements des mots laissent des traces dans les positions d' origine du déplacement . Ces traces , bien que n' étant pas perceptibles , existeraient dans les représentations mentales des personnes normales ( 14 ) . a . Le tigre suit le lion b . C' est le lion i que le tigre suit t i ( 14a ) et ( 14b ) ont la même signification , mais leur structure syntaxique diffère . En effet , ( 14a ) est une phrase active , dans laquelle le verbe " suit " attribue le rôle d' Agent à " tigre " , à gauche , et le rôle de Patient à " lion " , à droite . En revanche , la phrase ( 14b ) est une clivée objet , le verbe " suit " va toujours attribuer le rôle d' Agent à gauche ( " tigre " ) , et le rôle de Patient à sa droite , mais dans ce cas , le dernier rôle sera attribué au niveau de la trace ( ti ) , puis transmis au mot qui porte le même indice ( i ) , à savoir , " lion " . La trace laissée par le déplacement devient donc un élément crucial pour assurer la compréhension de l' élément déplacé . Selon Grodzinsky , la mauvaise compréhension des phrases " non-canoniques " refléterait un déficit pour déplacer des éléments et/ou construire une trace de l' élément déplacé . Grodzinsky ( 1984 ) a noté que les constructions qui sont problématiques pour les aphasiques de Broca sont celles qui impliquent un déplacement de constituants par rapport à une position canonique . Plus précisément , Grodzinsky ( 1995a , 1995b ; Grodzinsky & Finkel , 1998 ) formule l' hypothèse de destruction de traces ( Trace Deletion Hypothesis ) , selon laquelle , chez les agrammatiques , toute trace laissée par un déplacement de constituant serait supprimée dans la représentation en structure de surface calculée par les aphasiques de Broca . L' hypothèse de Grodzinsky ( 1995a ) est une de celles qui a retenu le plus d' attention et qui a motivé un grand nombre de travaux empiriques . Elle permet de prédire les performances de compréhension de patients agrammatiques en supposant la destruction de traces en structure de surface et en supposant l' application d' une stratégie dans laquelle le patient attribue par défaut un rôle thématique au nom qui en est dépourvu , puisque la trace est détruite . Cette stratégie attribue le rôle d' Agent au premier nom rencontré . Dans les structures où le rôle d' Agent est syntaxiquement attribué au second nom , la représentation agrammatique contient deux Agents qui font la même action . Cette hypothèse prévoit une compréhension aléatoire pour les phrases passives , clivées objet , et subordonnées objet et une bonne compréhension des phrases actives , clivées sujet et subordonnées sujet ( Tableau 2 ) . Tableau 2 . Position des traces dans différentes structures syntaxiques sémantiquement réversibles chez des personnes sans lésions ( SL ) et les représentations correspondantes pour les aphasiques agrammatiques ( A ) . Les " ... " indiquant la destruction de traces . Dans l' hypothèse de Grodzinsky ( 1995a ) , la source de la compréhension anormale des agrammatiques est due à l' altération des représentations syntaxiques . Cependant , l' hypothèse de projection ( Linebarger , 1995 ; Schwartz , Linebarger , Saffran & Pate , 1987 ) suggère que ce ne sont pas les représentations syntaxiques qui sont endommagées mais plutôt l' exploitation de l' information donnée par l' analyse grammaticale qui échoue dans la compréhension agrammatique . Linebarger ( 1995 ) propose ainsi que le problème des agrammatiques n' est pas l' analyse de la phrase en elle-même mais l' appariement entre sa structure syntaxique et la structure thématique du verbe . Cet auteur a mis en évidence une disparité entre jugement / compréhension grammaticale , où les agrammatiques pouvaient juger la grammaticalité de structures qu' ils ne pouvaient pas comprendre . De plus cette hypothèse semble inappropriée pour certains exemples de déplacements qui semblent préservés chez les agrammatiques tel que le déplacement de verbe dans les questions " yes / no " en anglais ( Avrutin , 2000 ) . Grodzinsky a donc suggéré que le déficit des aphasiques ne porterait que sur les déplacements de groupes nominaux , les déplacements de verbes seraient préservés . 2.3 . Le déficit de déplacement des verbes Comme nous l' avons vu précedemment , l' ordre canonique Sujet-Verbe-Objet ( SVO ) s' applique entre autre aux langues romanes comme le français . Toutefois , il existe des langues ( e.g. , l' allemand , le néerlandais ) pour lesquelles l' ordre canonique est Sujet-Objet-Verbe ( SOV ) . Les travaux qui s' y rapportent comparent des propositions principales à des propositions emboîtées dans des langues où l' ordre canonique est différent de celui de l' anglais ou du français . Dans une langue comme le néerlandais , l' ordre des mots dans une phrase est SOV excepté dans les propositions principales . En effet , dans ces propositions , le verbe / l' auxiliaire se déplace à la seconde position suivant une règle syntaxique , appelée Verbe Second ( 15 ) . L' ordre des mots est donc Sujet-Verbe-Objet . a . De jongen leest i een boek t i le garçon lit un livre b . De jongen heeft i een boek gelezen t i le garçon a un livre lu Bastiaanse et Van Zonnevald ( 1998 ) ont utilisé une tâche d' appariement phrase-image dans laquelle chaque image s' accompagne d' une phrase , écrite au-dessous , dans laquelle le verbe était remplacé par des pointillés . La tâche était de produire le mot manquant , c' est-à-dire le verbe conjugué . Les résultats ont montré que des patients agrammatiques néerlandais ont plus de difficultés à produire des verbes dans les propositions principales que dans les propositions emboîtées . Bastiaanse et Thompson ( 2003 ) ont repris le même paradigme et ont présenté deux images ; dans chacune d' elles l' action était la même mais avec des objets différents . Les patients ( six anglais et neuf néerlandais ) devaient compléter des phrases illustrant chaque image . La moitié des phrases étaient des propositions principales et l' autre moitié des propositions emboîtées . L' ordre des mots pour les phrases néerlandaises allait donc être SVO pour les propositions principales et SOV pour les propositions emboîtées tandis que l' ordre des mots pour les phrases anglaises allait être SVO quelle que soit la structure de la phrase . Les résultats ont montré une différence significative entre les deux types de propositions pour les neuf patients néerlandais . En effet , les performances étaient moins bonnes quand il s' agissait de produire des propositions principales que lorsqu' il s' agissait de produire des propositions emboîtées . Il n' existait aucune différence de performances entre les deux types de propositions pour les patients anglais . L' erreur la plus importante faite par les néerlandais était la production d' un ordre des mots erroné ( e.g. , SOV pour les principales ) ce qui n' était jamais le cas pour les patients anglais . Pour Bastiaanse et Thompson ( 2003 ) les résultats confirment le fait que les néerlandais ont des troubles de production avec des structures de phrases qui ne respectent pas l' ordre canonique . Ceci soutient l' hypothèse que le mouvement des verbes est un facteur critique pour les patients agrammatiques . La seconde expérience de Bastiaanse et Thompson ( 2003 ) utilisait des phrases transitives sémantiquement réversibles uniquement en langue anglaise . Trois types de phrases ont été utilisés : a ) des phrases actives avec un verbe transitif ( The convict kicks the sheriff = le condamné donne un coup de pied au shérif ) , b ) des phrases déclaratives avec un auxiliaire ( The convict is kicking the sheriff = le condamné vient de donner un coup de pied au shérif ) , c ) une question dans laquelle l' auxiliaire se déplace en tête de phrase ( Is the convict kicking the sheriff ? = est -ce que le condamné donne un coup de pied au shérif ? ) . Les auteurs présentaient un paire d' image . La première image montrait un personnage en train d' effectuer une action sur un autre personnage ( le condamné qui donne un coup de pied au shérif ) , la seconde image dépeignait la situation inverse ( le shérif en train de donner un coup de pied au condamné ) . L' expérimentateur lisait une phrase correspondant à la description de l' une des images et la tâche du patient était de produire une phrase ayant la même structure que celle qu' il venait d' entendre pour décrire la seconde image . Les agrammatiques avaient de moins bonnes performances dans le troisième type de phrases suggérant que les verbes et les auxiliaires qui ne subissent pas de mouvement étaient plus faciles à produire que les auxiliaires qui subissent un déplacement . L' erreur la plus fréquente dans le premier type de phrases était une erreur d' accord ( " kicked " au lieu de " kicks " ) . L' erreur la plus fréquente dans le deuxième type de phrases était l' omission de l' auxiliaire . C' était également l' erreur la plus fréquente dans le dernier type de phrases avec en plus l' échec de déplacement de l' auxiliaire en tête de phrase . Ces résultats pris ensemble suggèrent que le mouvement du verbe est un facteur critique des déficits de production dans l' agrammatisme . Bastiaanse et Van Zonnevald ( 2005 ) ont testé seize patients aphasiques ( 8 Broca , 5 anomiques et 3 Wernicke ) néerlandais sur la production de verbes au niveau de la phrase . Ils ont utilisé une tâche de production de verbes avec deux images : la première dans le but d' obtenir une phrase avec un verbe transitif et la seconde dans le but d' obtenir le même verbe mais dans sa contrepartie intransitive . Alors qu' il était significativement plus difficile pour les aphasiques de Broca de produire des phrases dans la condition intransitive que dans la condition transitive , cette différence n' existait pas pour les patients Wernicke / anomiques . Il était bien plus difficile pour des aphasiques de Broca de produire des phrases dans lesquelles le Thème est en position sujet . Ce dernier résultat est en lien direct avec l' idée que les phrases non canoniques sont plus difficiles dans la production agrammatique . 3 . La compréhension des verbes intransitifs Il a souvent été montré que les aphasiques de Broca ont des troubles de production des verbes ( Bastiaanse Berndt , Haendiges , Mitchum Berndt , Mitchum , Haendiges Jonkers , 2000 ; Kim Kohn , Lorch Miceli , Silveri , Nocenti & Caramazza , 1988 ; Miceli , Silveri , Villa Thompson , Lange , Schneider Thompson , Shapiro , Li & Schendel , 1995 ) . Les déficits sélectifs affectant les verbes ont été reportés aussi bien chez des aphasiques fluents que non fluents ( e.g. , Berndt , et al. , 1997a ; Berndt , Mitchum Kohn et al. , 1989 ; Miceli et al. , 1988 ; Miceli et al. , 1984 ; Williams & Canter , 1987 ) . Ces problèmes , concernant la récupération de verbes , apparaissaient aussi bien dans des tâches de dénomination d' action , au niveau du mot ( Jonkers , 1998 ; Kim Kohn et al. , 1989 ; Miceli et al. , 1984 ) dans des tâches de production de verbes au niveau de la phrase ( Bastiaanse , Rispens , Bastiaanse , Friedman , 2000 ; Miceli , Mazzuchi , Menn , Thompson et al. , 1995 ; Thompson et al. , 1997 ) , que dans des productions de verbes dans le discours spontané ( Saffran , Berndt , Thompson et al. , 1995 ) . Les verbes jouent un rôle central dans la phrase ; ils attribuent le rôle thématique des syntagmes nominaux , ils expriment la relation entre l' événement et le temps , et ils assignent un Cas au sujet et à l' objet ( e.g. , nominatif ou accusatifs comme nous l' avons vu dans le chapitre 1 ) . Les études de production de verbes au niveau du mot ont montré que la dénomination d' action était influencée par un nombre important de facteurs qui pouvaient influencer différemment les patients aphasiques ( Kemmerer et Tranel , 2000 a , b parmi d' autres ) . Il a rapidement été montré que la production de verbes dans un contexte au niveau de la phrase était différente de la dénomination d' action ( Bastiaanse & Jonkers , 1998 ; Berndt et al. , 1997a ; Jonkers , 2000 ) . Cependant , beaucoup d' études relatives à la perte sélective des verbes ont été restreintes à la comparaison verbe / nom en examinant une variété de tâches de production ( dénomination d' images , complétion de phrases , génération de synonymes , génération de phrases ) . Peu d' études ont exploré des différences possibles à l' intérieur de la catégorie des verbes . Certaines études rapportent cependant que , pour certains aphasiques , les verbes transitifs seraient plus difficiles que les verbes intransitifs ( Kim & Thompson , 1998 ) , mais d' autres rapportent les résultats inverses ( Jonkers & Bastiaanse , 1996 , 1997 ) . Dans la partie qui suit , nous commencerons à envisager les prédictions théoriques et les résultats obtenus concernant la compréhension ou la production de phrases contenant des types variés de verbes transitifs et/ou intransitifs . 3.1 . Trace Deletion Hypothesis ( TDH , Grodzinsky , 1995a ) Nous avons vu , plus haut , que Grodzinsky a proposé une hypothèse de destruction des traces permettant d' expliquer les troubles de compréhension d' aphasiques de Broca pour des phrases contenant des verbes transitifs . Mais la TDH prédirait -elle aussi les performances de compréhension d' un sous-ensemble de verbes intransitifs , les verbes inaccusatifs ? Nous l' avons vu dans le chapitre 1 , les phrases contenant des verbes inaccusatifs subissent un déplacement de constituant . En effet , selon Burzio ( 1986 ) , le syntagme nominal qui apparaît comme le sujet en structure de surface des verbes inaccusatifs , est en fait l' objet direct en structure profonde ( 16 ) . a . La fille tombe b . La fille i tombe t i En suivant la TDH , la trace localisée à l' intérieur du syntagme verbal n' est pas disponible pour l' attribution thématique , à cause de la suppression de la trace ( 17 ) . Le déplacement du nom ne peut pas recevoir de rôle thématique et le nom devra recevoir un rôle thématique " Agent " , attribué par défaut au premier nom d' un énoncé . Selon la TDH , la destruction de la trace pour des phrases inaccusatives devrait amener les patients aphasiques à une compréhension aléatoire au même titre que pour les subordonnées objet , les clivées objet et les passives . a . La fille tombe b . [ La fille i thème [ VP tombe t i ] ] ( Phrase inaccusative ) c . [ La fille aucun rôle thématique [ VP tombe ] ] ( Suppression de la trace ) d . [ La fille agent [ VP tombe ] ] ( Application de la stratégie ) Piñango ( 2000 ) a étudié la compréhension des verbes inaccusatifs / inergatifs de deux patients aphasiques de Broca . Au sein des verbes inaccusatifs , Piñango ( 2000 ) distinguait les verbes qui présentaient une alternance causative ( e.g. , casser , le vase se casse / la fille casse le vase ) et les verbes qui ne présentaient pas cette alternance ( e.g. , tomber ) . Les résultats montraient une bonne compréhension des trois types de verbes intransitifs . Les mêmes patients montraient , en revanche , des performances aléatoires avec des phrases passives . La bonne réussite pour tous les verbes intransitifs était imprévue par la TDH . Ceci a conduit Piñango ( 2000 ) à proposer une nouvelle hypothèse : l' hypothèse de liaison d' argument ( Argument Linking Hypothesis : ALH ) . Pour Piñango , dans les phrases avec un verbe inaccusatif , il y aurait bien un déplacement syntaxique , mais pas d' inversion des rôles thématiques . Le fait que les aphasiques de Broca n' aient aucun problème pour traiter ces verbes inaccusatifs serait du à ce manque d' inversion des rôles thématiques . Il existerait deux manières de lier les rôles thématiques des différents arguments dans la structure de surface d' une phrase : Une liaison sémantique qui établirait une correspondance entre les arguments ( Agent , Thème ... ) et la position linéaire dans la phrase ( première position , seconde position ... ) . Une liaison syntaxique qui établirait une correspondance entre les arguments et les fonctions syntaxiques ( sujet , objet direct ) , fondée sur des principes syntaxiques . Chez les participants sains , la liaison syntaxique prédominerait sur la liaison sémantique . Dans le système agrammatique , la contrainte de liaison serait altérée , et bien que la représentation syntaxique et la structure d' argument soient intactes , le système a maintenant deux mécanismes de liaison qui se concurrencent . Ainsi , toutes les fois où les deux mécanismes de liaison rapporteront des correspondances contradictoires ( c' est-à-dire lorsque les rôles thématiques sont renversés dans la représentation syntaxique ) , la compréhension sera altérée prenant la forme d' une compréhension aléatoire . La ALH est en partie d' accord avec l' hypothèse de Grodzinsky ( 1995a , b ) puisqu' elle prédit de bonnes performances pour les phrases actives , les subordonnées sujet et les clivées sujet . En effet , dans ces constructions les deux mécanismes de liaison ( syntaxique et sémantique ) coïncident . Elle prédit également des performances aléatoires dans les phrases passives , les subordonnées objet et les clivées objet puisque , dans ces constructions , les systèmes syntaxique et sémantique donnent des correspondances conflictuelles . En revanche , les phrases inaccusatives représentent un test critique de la TDH : celle -ci prédit des performances aléatoires sur ces phrases tandis que la ALH prédit de bonnes performances . 3.2 . Argument Structure Complexity Hypothesis ( ASCH ) Thompson et al. ( 1997 ) dans une tâche de production de verbes avec 10 patients agrammatiques ont montré que le nombre et le type d' arguments associés à un verbe influençait la difficulté de production . Cette difficulté augmentait avec le nombre d' arguments . Par exemple , un verbe comme " laugh " ( rire ) comme dans " Chris laughed " ( Chris a ri ) était plus facile à produire qu' un verbe qui a deux arguments tel que " hit " ( frapper ) comme dans " Chris hit the ball " ( Chris frappe le ballon ) , lequel en retour était plus facile à produire qu' un verbe qui a trois arguments tel que " give " ( donner ) comme dans " Chris give Mary the ball " ( Chris donne le ballon à Marie ) . Selon cette idée , les phrases intransitives étaient plus faciles à produire que les phrases transitives , puisque les premières contenaient un seul argument alors que les dernières en contenaient deux ( Kim & Thompson , 2000 ) . Ce déficit lié aux arguments des verbes a été trouvé en anglais ( Kemmerer & Tranel , 2000 ) , en hongrois ( Kiss , 1999 ) et en allemand ( De Bleser & Kauschke , 2003 ) . Cependant , le nombre d' arguments ne suffirait pas pour expliquer le déficit de production de certains verbes . En effet , les verbes inaccusatifs et inergatifs n' ont qu' un seul argument et pourtant les verbes inaccusatifs seraient plus difficiles à produire ( Kegl , 1995 , Luzzatti , Zonca , Pistarini , Contardi , Pinna , 2002 ; Thompson , 2003 ) . Les rôles thématiques influenceraient également la production des verbes . Il est généralement supposé que le rôle d' Agent est relié à la position sujet et le rôle de Thème à la position objet . Toutefois , les verbes inaccusatifs prennent un Thème en position sujet et ces verbes induiraient des difficultés de production pour les patients aphasiques agrammatiques . Pour Kegl ( 1995 ) le fait que les verbes inaccusatifs n' aient pas d' argument externe et que l' argument interne soit obligé de se déplacer en position sujet expliquerait cette difficulté de production . Plus précisément , l' hypothèse " Syntactically Enriched Verb Entry " de Kegl ( 1995 ) suggère que n' importe quelle construction à laquelle il manque un argument externe et qui implique le mouvement syntaxique d' un argument au niveau de la structure de surface , induirait une difficulté de production chez des patients agrammatiques , même si l' entrée lexicale et la représentation en structure profonde des verbes est intacte . Lee et Thompson ( 2004 ) en tenant compte des observations de Thompson ( Thompson , 2003 ; Thompson et al. , 1997 ) et des observations de Kegl ( 1995 ) ont proposé la ASCH ( 18 ) . ASCH Les verbes où les structures d' arguments nécessitent une plus grande complexité syntaxique sont plus difficiles à produire pour les patients aphasiques . La complexité comprend le nombre et le type d' argument associés avec le verbe et l' information contenue à l' intérieur de l' entrée lexicale du verbe . Lee et Thompson ( 2004 ) ont suggéré que les verbes inaccusatifs qui ont une alternance causative ( e.g. , ouvrir , casser , briser ) seraient bien plus difficiles à traiter que les verbes inergatifs . En effet , bien que les deux types de verbes aient seulement un argument , les verbes inergatifs n' ont pas d' alternance possible , ce qui les rend , par conséquent , plus faciles à traiter et à produire . Les auteurs ont repris le paradigme de dénomination en testant cette fois la production et la compréhension de phrases , auprès de huit patients aphasiques agrammatiques . Les verbes intransitifs utilisés dans les deux tâches étaient au nombre de 22 : 10 verbes inaccusatifs et 12 verbes inergatifs . A chacun de ces verbes correspondait une image . Dans la tâche de production , chaque image représentait la description d' une action ( par exemple un chien qui est en train d' aboyer ) et s' accompagnait d' un verbe à l' infinitif qui était imprimé en bas de chacune d' entre elles ( dans cet exemple le verbe est " aboyer " ) . La tâche du patient consistait à produire une phrase décrivant chaque image en utilisant un nom et le verbe dans le bon ordre ( la réponse attendue était " Le chien aboie " ) . Dans la tâche de compréhension , les mêmes images s' accompagnaient d' une phrase présentée auditivement . Le patient devait dire si la phrase qu' il venait d' entendre dépeignait correctement la scène décrite par l' image . Les auteurs précisent que toutes les phrases accompagnant les images étaient grammaticales et que des phrases de remplissage comportant des substitutions lexicales ont été utilisées [ 2 ] . Les résultats ont montré de meilleures performances en compréhension qu' en production . Cependant , alors qu' il existait une différence entre les deux types de verbes en production , cette différence était absente en compréhension . Ce dernier résultat suggérait que la représentation de la structure d' argument des verbes inaccusatifs aussi bien que celle des autres verbes n' était pas affectée et qu' elle était normalement accédée en compréhension . En production , les verbes inergatifs semblaient plus faciles à produire que les verbes inaccusatifs , même si les deux types de verbes aboutissaient à de bonnes performances . En revanche , aucune différence significative entre inaccusatifs et inergatifs n' a été trouvée en compréhension . Ce résultat a déjà été trouvé dans des études antérieures ( Kim & Thompson , 2000 ; Piñango , 2000 ; Thompson , 2003 ) . Pour Lee et Thompson ( 2004 ) , la représentation de la structure d' argument des verbes inaccusatifs était déficiente en production mais elle était normalement accédée en compréhension . Kim et Thomspon ( 2000 ) ont expliqué cette dissociation entre production et compréhension par un déficit des entrées au niveau des lemmes . La difficulté des patients en production viendrait de la difficulté pour catégoriser les verbes par la structure d' argument et les verbes avec peu d' arguments seraient moins déficients que ceux avec plus d' arguments . Si l' entrée lexicale d' un verbe n' est pas complètement disponible pendant la tentative de production , alors les détails pertinents des propriétés syntaxiques des verbes ne seraient pas disponibles et l' attribution des fonctions ne pourrait pas s' effectuer normalement . La conséquence pourrait être la production de moins d' arguments que le verbe ne l' exige et/ou l' attribution incorrecte de rôle thématique à la structure d' argument sélectionnée . Pour Lee et Thompson ( 2004 ) , le nombre d' arguments associés avec le lemme du verbe sélectionné a affecté le processus de construction de l' énoncé et le type d' argument a affecté les opérations syntaxiques qui suivent ( le manque d' argument externe qui déclenche le mouvement de l' argument interne vers la position sujet ) . Qu' il s' agisse de l' expérience de Thompson ( 2003 ) ou de celle de Lee et Thompson ( 2004 ) , le matériel expérimental était sensiblement identique . Les verbes inergatifs choisis dans les deux expériences étaient des verbes de processus contrôlés ( " jump " = " sauter " ) ou des verbes de processus incontrôlés ( " snore " = " ronfler " ) et étaient classés , selon Sorace ( 2000 ) , dans la catégorie des verbes inergatifs . En revanche , le choix des verbes utilisés , dans les deux expériences , comme verbes inaccusatifs semblerait plus problématique . Les verbes sélectionnés par Thompson ( 2003 ) et par Lee et Thompson ( 2004 ) étaient , par exemple , " break " ( " casser ) ou encore " crash " ( " briser " ) dont le statut d' inaccusatif était controversé . La hiérarchie de Sorace ( 2000 ) n' inclut pas les verbes dyadiques ayant une alternance transitive comme " casser " qui sont faiblement inaccusatifs et qui affichent un comportement inergatifs dans certaines langues ( Haegeman , 1994 ; Labelle , 1992 ) . 3.3 . Inaccusativité et biais lexical Gahl ( 2002 ) , Gahl , Menn , Ramsberger , Jurafsky , Elder , Rewega & Holland ( 2003 ) ont testé la sensibilité des verbes au biais lexical . Le biais lexical d' un verbe est la probabilité que ce verbe puisse apparaître dans un environnement syntaxique particulier . Gahl ( 2002 ) prend comme exemple le verbe " remembered = se souvenir " . Ce verbe peut prendre un objet direct ( The professor remembered the student = le professeur se souvient de l' étudiant ) , une subordonnée ( The professor remembered the student was coming at four o'clock = le professeur se souvient que l' étudiant est venu à quatre heures ) ou un complément infinitif ( The professor remembered to turn at the grades = le professeur se souvient d' avoir parcouru les années du cursus universitaires ) . Quand le verbe apparaît dans une structure syntaxique plus fréquemment que dans une autre , le verbe a un biais lexical autour de la structure la plus fréquente . Menn , Reilly , Hayashi , Kamio , Fujita & Sasanuma . ( 1998 ) suggèrent que pour un verbe donné la forme canonique est reliée au cadre syntaxique le plus fréquent . De ce point de vue , le problème de production et de compréhension des passives viendrait du fait que pour beaucoup de verbes transitifs , les structures passives apparaissent moins fréquemment que les structures actives . Par exemple , si le cadre syntaxique du verbe " ouvrir " est un cadre transitif actif , alors une phrase telle que " Dora a ouvert la porte " sera plus facile à produire que " La porte s' est ouverte " ( Menn et al. , 1998 ) . Gahl ( 2002 ) s' est donc intéressé au biais lexical et plus précisément au biais transitif pour expliquer les difficultés de compréhension des aphasiques . L' auteur nomme biais transitif le fait qu' un verbe puisse avoir une contrepartie transitive ( the sun melted the snow = le soleil a fait fondre la neige ) et une contrepartie intransitive ( the snow melted = la neige a fondu ) . Gahl ( 2002 ) a utilisé une tâche de jugement de plausibilité auprès de seize patients aphasiques ( 6 aphasiques de Broca , 4 aphasiques de Wernicke , 2 aphasiques de Conduction et 6 aphasiques Anomiques ) . Le matériel comprenait trois types de phrases : active , passive et intransitive avec un Thème comme sujet . Il a utilisé l' emploi transitif et intransitif de verbe comme " dissolve = dissoudre " et " melt = fondre " . Le verbe " dissolve " apparaîtrait plus fréquemment dans des structures transitives et " melt " dans des structures intransitives . Pour Gahl ( 2002 ) , si la structure syntaxique est l' unique responsable des difficultés de compréhension les phrases en ( 19 ) ne devraient pas être plus difficiles que les phrases en ( 20 ) . En revanche , si le biais lexical exerce une influence sur le processus de compréhension alors les phrases en ( 19 ) devraient être plus faciles à comprendre que les phrases en ( 20 ) . Dans ces exemples , Gahl a nommé comme étant " concordant " les situations dans lesquelles les verbes devraient apparaître le plus fréquemment et " discordant " les situations dans lesquelles le verbe apparaîtrait moins fréquemment . a . The researchers dissolved the crystals active concordant b . The crystals was dissolved by the researchers passive concordant c . The butter melted in the pot intransitive concordant a . The cook melted the butter active discordant b . The butter was melted by the cook passive discordant c . The crystals dissolved in the solution intransitive discordant Les résultats ont montré que les patients aphasiques ont commis plus d' erreurs dans les conditions " discordantes " que dans les conditions " concordantes " . Les résultats sont en accord avec le point de vue que les facteurs lexicaux sont responsables de patterns de résultats déjà observés dans la compréhension aphasique . Gahl ( 2002 ) adopte un point de vue qui n' est pas purement syntaxique et propose que la compréhension des phrases chez les agrammatiques est influencée par ce biais lexical . Gahl et al. ( 2003 ) ont exploré la compréhension de phrases par une tâche de jugement de plausibilité en utilisant 4 types de phrases : passives , inaccusatives , actives transitives , et intransitives avec un sujet agentif . Les phrases intransitives avec un sujet agentif peuvent être rapprochées des phrases inergatives . Les résultats de 8 patients aphasiques ( 3 Conduction , 3 Broca , 2 Anomiques ) n' ont montré aucune différence entre les phrases inaccusatives et intransitives avec un sujet agentif . Les phrases inaccusatives n' étaient pas plus difficiles pour les patients aphasiques que les phrases intransitives avec un sujet agentif comme le prédisait l' approche canonique fondée sur les rôles sémantiques . A l' inverse de Kegl ( 1995 ) , Gahl et al. ( 2003 ) n' ont pas montré de meilleures performances pour les phrases inaccusatives que pour les phrases passives . Ces résultats étaient proches de ceux obtenus par Lee et Thompson ( 2004 ) entre les verbes inaccusatifs et inergatifs dans la mesure où Gahl et al. ( 2003 ) n' ont pas montré de différence entre les inaccusatifs et les intransitifs avec un sujet agentif ( inergatifs ) . Une approche purement syntaxique n' expliquerait pas le pattern des troubles de compréhension des aphasiques . Les phrases actives obtiennent de meilleures performances que les phrases passives . Pour Gahl et al. ( 2003 ) , les difficultés de compréhension semblent bien liées à l' appariement biais lexical et structure syntaxique puisque les phrases dans la situation concordante ( c' est-à-dire quand le verbe apparaît dans la structure la plus fréquente ) donnaient lieu à de meilleures performances . 3.4 . Synthèse Caramazza et Zurif ( 1976 ) ont testé la compréhension de patients agrammatiques et ils ont mis en évidence des performances aléatoires pour des phrases sémantiquement réversibles et de bonnes performances pour des phrases non réversibles sémantiquement . Cependant , toutes les phrases sémantiquement réversibles ne seraient pas affectées uniformément . Seule la compréhension des phrases subordonnées objet , clivées objet et passives serait atteinte . La TDH de Grodzinsky ( 1995a ) a été formulée dans le but de prédire les performances de compréhension des patients aphasiques . Bien que cette hypothèse suggère que le déplacement des verbes seraient préservé , les travaux de Bastiaanse en anglais et en hollandais ont renforcé l' idée que les phrases ne respectant pas l' ordre canonique seraient plus difficiles à produire / comprendre pour les patients aphasiques . Cepedant , si les prédictions de la TDH fonctionnent avec un certain nombre de structures syntaxiques , il existe une différence entre les prédictions faites concernant les phrases inaccusatives et les performances réelles des aphasiques . En effet , la compréhension de ces phrases devrait être aléatoire puisqu' elles impliquent un mouvement syntaxique , or les performances des aphasiques étaient au dessus de l' aléatoire . Piñango ( 2000 ) a décrit une hypothèse de liaison d' argument et a expliqué la bonne compréhension des phrases inaccusatives par le fait qu' il n' y a pas d' inversion des rôles thématiques . La performance des patients aphasiques serait altérée uniquement lorsque le déplacement de constituants impliquerait un renversement de rôle thématique . Lee et Thompson ( 2004 ) ont comparé des verbes inaccusatifs ayant une contre partie causative à des verbes inergatifs . Ils montré une différence de performances en production et en compréhension . Les verbes inergatifs étaient plus faciles à produire que les verbes inaccusatifs alors que les performances de compréhension entre les deux types de verbes étaient identiques . Gahl et al. ( 2003 ) ont retrouvé le même pattern de performance en compréhension puisque les résultats n' ont pas montré de différence entre les inaccusatifs et les intransitifs avec un sujet agentif . 4 . La compréhension des auxiliaires 4.1 . La sensibilité aux auxiliaires dans des tâches off-line Selon Caramazza ( 1997 ) , l' attribution de l' auxiliaire en italien est une caractéristique syntaxique d' un verbe . Pour Miozzo et Caramazza ( 1997 ) même face à de sévères difficultés dans la récupération des formes phonologiques d' un mot , la récupération des propriétés syntaxiques de ce mot peuvent être accessibles . En production , deux étapes de traitement seraient impliquées dans la sélection lexicale ( e.g. , Caramazza & Hillis , 1990 ) . La première étape consiste en une représentation des propriétés sémantiques et lexicales ( référée comme le " lemme " ) et la seconde étape consiste en une représentation des propriétés phonologiques du mot ( référée comme le " lexème " ) . Certains résultats ont montré que les représentations de la forme sémantique et phonologique pouvaient être endommagées indépendamment l' une de l' autre ( e.g. , Caramazza Warrington , 1975 ) . Selon Miozzo et Caramazza ( 1997 ) l' une des observations les plus convaincantes dans la distinction lemme / lexème est le phénomène de tip-of-the-tongue ( TOT ) puisqu' il s' agit de récupérer la forme phonologique d' un mot que des patients sont persuadés de connaître et qui est sur le point de venir . Il semblerait que ce phénomène reflète la situation dans laquelle la cible lemme a été accédée mais sa correspondance lexème est momentanément inaccessible . Miozzo et Carammza ( 1997 ) se sont posés la question de savoir si les propriétés syntaxiques des verbes étaient aussi représentées indépendamment de leurs formes phonologiques . Suivant la suggestion de Burzio ( 1986 ) pour qui l' attribution de l' auxiliaire d' un verbe intransitif ne peut pas être dérivée de ses propriétés sémantiques ou phonologiques , Miozzo et Caramazza ( 1997 ) ont étudié la capacité d' un patient anomique italien ( Dante ) à compléter des phrases qui requièrent la production d' un verbe et de son auxiliaire . L' objectif étant de savoir si une propriété syntaxique des verbes italiens ( l' auxiliaire ) était disponible chez un patient cérébro-lésé qui échouait dans l' accès à la représentation phonologique d' un mot . Les résultats ont montré que ce patient pouvait produire les auxiliaires appropriés même dans des cas où il n' était pas capable de produire les verbes . Ces auteurs ont conclu que l' attribution appropriée de l' auxiliaire d' un verbe ne pouvait pas être dérivée de ses caractéristiques sémantiques puisque l' accès aux informations sur l' auxiliaire d' un verbe dépendait d' un accès aux propriétés syntaxiques du mot . La capacité de ce patient ne pouvait pas être expliquée sur la base de la disponibilité de l' information sémantique . Les auteurs interprètent la performance de Dante à récupérer l' auxiliaire des verbes comme une indication de sa capacité à accéder normalement aux caractéristiques syntaxiques des mots . Et plus spécifiquement , la dissociation entre la capacité de récupérer l' auxiliaire d' un verbe et son incapacité à récupérer les propriétés phonologiques de ce verbe peut être interprétée comme une indépendance entre les caractéristiques syntaxiques des mots et l' accès à leurs propriétés phonologiques . Toutefois , l' idée d' une indépendance de l' attribution de l' auxiliaire de l' information sémantique n' est pas à exclure ( Kemmerer , 1998 ) . Pour Kemmerer ( 1998 ) , les résultats de Dante peuvent s' expliquer par des caractéristiques sémantiques spécifiques des verbes et non par des caractéristiques purement syntaxiques . L' auteur n' envisage pas la même conclusion que Miozzo et Caramazza ( 1997 ) puisque pour lui la sélection des auxiliaires n' est pas un phénomène purement syntaxique . Kemmerer ( 1998 ) s' appuie sur la suggestion de Van Valin ( 1990 ) selon laquelle la sélection des auxiliaires peut être dérivée directement des propriétés sémantiques des verbes : tous les verbes intransitifs qui prennent l' auxiliaire avoir sont des verbes d' activités alors que les verbes qui prennent l' auxiliaire être sont des verbes d' état , d' accomplissement , ou d' achèvement . Par conséquent , les verbes intransitifs sélectionnent être si la structure logique du verbe contient un prédicat d' état , les autres sélectionnent avoir . De ce point de vue , il est possible que la capacité de Dante à récupérer l' auxiliaire des verbes , qu' il n' est pas capable de nommer , soit fondée directement sur la disponibilité de l' information sémantique . Pour Kemmerer ( 1998 ) tout comme pour Miozzo et Cramazza ( 1997 ) , il existe un modèle de production en deux étapes où les propriétés sémantiques et syntaxiques des mots seraient accédées avant les propriétés phonologiques des mots mais pour Kemmerer ( 1998 ) les performances de Dante révèleraient plutôt une indépendance des caractéristiques sémantiques et phonologiques des verbes plutôt qu' une indépendance des caractéristiques syntaxiques et phonologiques des verbes . 4.2 . La sensibilité aux erreurs d' auxiliaires dans des tâches on-line Alors que le problème de production et de compréhension des verbes a été observé dans plusieurs langues , il n' a été étudié presque exclusivement que dans des tâches off-line , comme des tâches d' appariement phrase-image ( mot-image ) où la phrase est répétée autant de fois que le demande le patient . Dans des tâches on-line , comme le paradigme de décision lexicale inter-modale , les effets du contraste phrases canoniques / non canoniques chez des patients aphasiques de Broca donnent un pattern différent ( Burkhardt , Piñango & Wong , 2003 ) . Les troubles de compréhension sont vus comme étant le reflet d' une capacité de traitement restreinte qui affecte de façon cruciale la composante syntaxique du système de langage . Alors que la TDH ( Grodzinsky , 1995 a , b ) décrit le déficit de compréhension comme une incapacité à accéder à l' information du rôle thématique contenue dans les traces & 226;& 128;& 147; permettant à des stratégies non linguistiques d' être introduites dans le processus de compréhension - , l' approche de décours temporel ( " Time-course " ) envisage une limitation des ressources de traitement . Les études utilisant des méthodologies en temps réel permettent d' examiner si le déficit postulé induit une insensibilité pendant le traitement de l' énoncé . La majorité des études utilise la décision lexicale inter-modale comme paradigme pour mettre en évidence un ralentissement de l' activation de l' information syntaxique . Il s' agit d' une tâche implicite qui permet de sonder l' activation automatique d' une information sémantique ou syntaxique . Burkhardt et al. ( 2003 ) ont utilisé des constructions qui impliquaient un déplacement de constituant pendant la compréhension en temps réel dans deux expériences : une avec des phrases subordonnées objet et l' autre avec des phrases inaccusatives . Dans les deux cas ils ont utilisé le paradigme de décision lexicale inter-modale . Dans ce paradigme , des phrases étaient présentées auditivement et , à un moment donné , une série de lettres ( mot cible ) était présentée visuellement sur l' écran d' ordinateur . La tâche du patient était de dire si cette série de lettres forme un mot de la langue ou non . Les phrases expérimentales étaient accompagnées de mots cibles appartenant à la langue , ils étaient soit sémantiquement reliés , soit sémantiquement non reliés ( 21 ) . Les phrases qui contenaient des mots cibles qui n' appartenaient pas à la langue ( non-mots ) étaient des phrases de remplissage . phrase subordonnée objet où dans cet exemple le mot cible était présenté juste après l' audition du verbe ( souligné ) The kid the cheese j which j / i the brand new micorwave melted t i yesterday afternoon while the entire family was watching tv Cible : cheddar ( relié ) album ( non relié ) ( Le gosse a aimé le fromage que le micro-onde a fondu hier après-midi tandis que la famille entière regardait la télévision ) Qu' il s' agisse de l' expérience des subordonnées objet ou des inaccusatifs , les mots cibles sont présentés soit juste après la trace , soit 650 msec après la trace , soit 800 msec après la trace . Alors qu' aucun amorçage n' est obtenu au moment de la trace , la réactivation de l' antécédent émerge à 650 msec ( pour les subordonnées ) et à 800 msec ( forte tendance pour les phrases inaccusatives ) après le verbe . Les auteurs concluent que les agrammatiques sont capables de mettre en oeuvre avec succès des dépendances , c' est-à-dire , qu' ils sont capables d' établir une connexion entre la position où une entité est entendue dans une phrase et la position où elle est interprétée . 4.2.1 Déficit des processus automatiques Pour rendre compte de la préservation de certains jugements , des auteurs ont donc mis en avant un déficit de traitement des phrases en temps réel . Friederici ( 1988 ) a suggéré que le problème principal des patients aphasiques serait une perte des processus automatisés permettant de traiter les phrases de manière immédiate et peu coûteuse . Ce déficit apparaîtrait dans des tâches impliquant une intégration des informations syntaxiques et sémantiques pour aboutir à la compréhension , mettant l' accent sur un décours temporel anormal de l' activation des informations morphosyntaxiques . Cette hypothèse d' automaticité aboutit à deux explications : la première , pour laquelle les aphasiques de Broca auraient perdu l' accès automatique à l' information sémantique et la seconde , selon laquelle ils seraient ralentis dans l' activation de l' information syntaxique . L' hypothèse d' une incapacité à accéder automatiquement à l' information du lexique a été proposée par Milberg , Blumstein , et Dworetzky ( 1987 ) . Le paradigme de décision lexicale inter-modale a été utilisé pour savoir si des mots ambigus étaient amorcés par des mots sémantiquement reliés . Ainsi , alors que Milberg et al. ( 1987 ) revendiquent une incapacité à accéder automatiquement à l' information lexicale , d' autres auteurs revendiquent que le processus est intact et qu' il est seulement ralenti ( Prather , Shapiro , Zurif & Swinney , 1991 ; Swinney , Zurif & Nicol , 1989 ) . D' autres expériences ont examiné cette question sous l' angle d' un déficit d' accès à l' information syntaxique ( Friederici & Kilborn , 1989 ; Haarmaan & Kolk , 1991 ) . Friederici et Kilborn ( 1989 ) ont utilisé le paradigme de décision lexicale inter-modale pour mettre en évidence un déficit d' automaticité des processus d' activation des informations morphosyntaxiques . Ce paradigme , testé auprès de cinq patients aphasiques de Broca néerlandais a évalué l' effet d' un contexte présenté auditivement sur la reconnaissance d' une série de lettre présentée visuellement . Chez les participants sains , si le mot lu ne s' intègre pas syntaxiquement avec la phrase entendue , les temps de réponses sont ralentis , suggérant une sensibilité à l' incongruence syntaxique . Dans tous les essais expérimentaux , l' auxiliaire apparaissait à la fin d' un morceau de phrase auditif de la forme " article + nom + auxiliaire " . Cette présentation auditive de chaque essai était suivie de la présentation visuelle d' un verbe au participe passé : dans la moitié des cas ce participe passé était syntaxiquement en accord avec l' auxiliaire le précédant , dans l' autre moitié des essais la suite auxiliaire et participe passé était incongruente , c' est-à-dire que le participe passé n' était pas en accord avec l' auxiliaire correspondant ( 22 ) . Et comme dans l' expérience de Burkhardt et al. ( 2003 ) , présentée plus en détail , les phrases de remplissage était celles qui contenaient les non-mots . a . De Indiaan wordt geholpen L' indien est aidé b . De dichter wordt * geklommen Le poète est * grimpé c . De baby heeft gekropen Le bébé a rampé d . De actrice heeft * geslaad L' actrice a * réussi e . De bezorger is gekomen Le livreur est venu f . De mens is * geschreden L' homme est * marché à grand pas L' auxiliaire wordt est un marqueur de la modalité passive en néerlandais qui peut être suivi par un adjectif ou un participe passé d' un verbe transitif . Les auxiliaires heeft et is correspondent respectivement aux auxiliaires avoir et être du français . Pour Friederici et Kilborn ( 1989 ) , la sélection de ces auxiliaires est arbitraire et la contrainte que ces auxiliaires imposent sur le participe passé qui les suit est purement " lexicale " , c' est-à-dire dépendant seulement de l' identité du verbe . Bien que les variations sémantiques sur le choix de l' auxiliaire soient mises de côté , Sorace ( 2000 ) souligne qu' en néerlandais , il existe un point de rupture sémantique entre les deux auxiliaires , point situé au niveau des verbes d' existence d' état . Les résultats ont montré un ralentissement des temps de réponse pour les participes passés non congruents suggérant une sensibilité de l' information grammaticale pendant le traitement de la phrase en temps réel . Quand il n' y avait pas de délai entre le contexte et le mot cible , cet effet s' accompagnait d' un ralentissement global des temps de réponse suggérant que ces patients avaient passé beaucoup de temps pour interpréter le mot cible qu' il soit congruent ou non avec son contexte . Un allongement du délai entre le contexte et le mot cible ( 200 msec ) accélèrait le temps de réponse des patients , sans doute parce que le délai supplémentaire leur permettait d' activer les propriétés syntaxiques pertinentes dans le contexte entendu . En revanche , cet allongement du délai ne montrait pas d' effet clair du contexte , même s' il existait une différence de temps entre les contextes congruents et non congruents , elle n' était pas significative . Haarmann et Kolk ( 1991 ) ont utilisé ce paradigme avec cette fois une présentation visuelle du contexte et avec des délais séparant le contexte de la cible de 300 , 700 et 1100 msec . Contrairement aux participants contrôles , les aphasiques présentaient un effet de congruence uniquement pour le délai le plus long ( 1100 msec ) suggérant donc un ralentissement de l' activation de l' information morphosyntaxique . L' ensemble de ces résultats est en faveur d' un ralentissement de l' activation des informations morphosyntaxiques et par conséquent d' un déficit d' automaticité de ces processus d' activation des informations morphosyntaxiques . Utilisant le même paradigme , Tyler , Ostrin , Cooke , et Moss ( 1995 ) ont examiné le traitement des auxiliaires auprès de patients agrammatiques anglais ( 23 ) . a . It was Monday and Philipp was making sandwitches for everybody's lunch ( C' était Lundi et Philipp était en train de faire des sandwitches pour le déjeuner de tout le monde ) b . * It was Monday and Philipp had making sandwitches for everybody's lunch ( * C' était Lundi et Philipp a eu faire des sandwitches pour le déjeuner de tout le monde ) Les quatre patients montraient un certain degré de sensibilité aux contraintes syntaxiques mais ils étaient également sensibles à des violations de structure d' argument . Au vu de ces résultats , les auteurs ont conclu qu' ils n' avaient pas mis en évidence de ralentissement dans l' accès à l' information syntaxique en général ( Haarmann & Kolk , 1991 ) ni de ralentissement plus spécifique dans l' accès de l' information syntaxique portée par les éléments de la classe fermée ( Friederici & Kilborn , 1989 ) . 4.2.2 . Représentations syntaxiques " globales " et " locales " Tyler ( 1985 ) aborde les différences dans le traitement des relations grammaticales " globales " et " locales " chez un patient aphasique agrammatique . La différence entre " globale " et " locale " peut être vue en terme d' organisation syntaxique où dans la représentation " globale " les phrases sont reliées à l' intérieur de structures de constituants hiérarchiques et la représentation " locale " implique un petit nombre d' éléments adjacents à l' intérieur d' un constituant , comme les prépositions ou les syntagmes nominaux . Un énoncé a une organisation " globale " si ses constituants sont organisés correctement à l' intérieur d' une structure hiérarchique . Chacun des constituants a une structure " locale " interne qui a également une structure hiérarchique . Tyler et Warren ( 1987 ) prennent comme exemple les phrases " The man was reading the book " ( " L' homme est en train de lire le livre " ) et " Was reading the book the man " ( " Etait en train de lire le livre l' homme " ) . Dans les deux phrases , les syntagmes nominaux " the man " ( l' homme ) , " the book " ( le livre ) ainsi que la suite auxiliaire + verbe " was " ( était en train de lire ) sont correctes à un niveau local . En revanche , seule la première phrase a une organisation " globale " de ces unités locales et forme un énoncé correct . Tyler ( 1985 ) fait l' hypothèse que les patients agrammatiques auraient un déficit de représentation " globale " des énoncés . Afin d' accéder à la capacité ou non des patients agrammatiques à construire des représentations syntaxiques globales , Tyler a utilisé le paradigme de détection de mot de Marslen-Wilson et Tyler ( 1980 ) . Ce paradigme , tout comme le paradigme de décision lexicale inter-modale , évalue des processus automatiques puisque le participant n' est pas interrogé explicitement sur l' aspect qui fait l' objet de l' étude . La tâche de détection de mot se déroule en deux temps : un mot isolé ( mot cible ) est présenté , puis , le participant entend une phrase contenant le mot cible . Le participant doit se souvenir du mot cible présenté au préalable et répondre le plus rapidement possible dès qu' il le détecte dans la phrase . En examinant les temps de latence des patients pour détecter les mots cibles et en les comparant à ceux des participants contrôles , il est alors possible d' estimer les processus impliqués dans l' analyse immédiate d' un énoncé auditif qui sont affectés et ceux qui sont intacts ( Friederici , 1985 ; Marslen-Wilson , 1975 , 1980 ; Swinney , Zurif , & Cutler , 1980 ; Tyler , 1985 , 1992 ) . Les temps de détection des mots cibles devraient être plus longs dans des contextes non grammaticaux comparés à des contextes grammaticaux . Les résultats de Tyler ( 1985 ) ont montré des différences entre des contextes grammaticaux et non grammaticaux au niveau local . En revanche , il n' existait aucune différence entre les deux contextes à un niveau global . L' auteur a conclu que ce patient montrait uniquement un déficit dans la construction de représentations syntaxiques " globales " . L' expérience de Baum ( 1989 ) a étudié la complexité syntaxique en incluant des constructions qui incorporaient des dépendances syntaxiques locales ou de longues distances . Baum ( 1989 ) envisage les relations globales en terme de distance physique entre les mots . Une dépendance globale peut être considérée comme étant plus complexe puisqu' elle requière la rétention de l' information syntaxique en mémoire jusqu'à ce que la dépendance soit complétée . Baum ( 1989 ) cherche à savoir si a ) les aphasiques agrammatiques démontrent une sensibilité à la non grammaticalité dans les deux types de dépendances et b ) si les différences trouvées par Tyler ( 1985 ) entre représentations locales et globales reflètent un déficit linguistique . Une des dépendances locales dans le matériel de Baum ( 1989 ) était les erreurs d' accord d' auxiliaire ( 25 ) qui pouvaient être vues plutôt comme une suppression de l' auxiliaire . a . The children at camp are RUNNING in a race today ( les enfants du camp sont en train de courir une course aujourd'hui ) b . * The children at camp RUNNING in a race today ( les enfants du camps courent une course aujourd'hui ) . Les résultats ont montré que les participants sains avaient des temps de détection plus longs pour les contextes non grammaticaux dans toutes les conditions indiquant qu' ils étaient sensibles aux violations de dépendances locales et de longues distances . En revanche , les patients aphasiques étaient sensibles uniquement aux violations de dépendances syntaxiques locales . Ces patients étaient capables de traiter de l' information syntaxique . Toutefois , la nature de ce traitement semblait être restreinte aux dépendances locales . 4.3 Synthèse La production des auxiliaires a été étudiée dans des tâches de complétion de phrases . Les résultats de Miozzo et Caramazza ( 1997 ) dans une tâche de production ont montré qu' un patient aphasique anomique était capable de récupérer l' auxiliaire correct d' un verbe qu' il était incapable de produire . La sélection des auxiliaires étant envisagée comme un phénomène soit purement syntaxique ( Burzio , 1986 ) soit purement sémantique ( Van Valin , 1990 ) plusieurs interprétations de ces résultats ont été avancées . Pour Miozzo et Caramazza ( 1997 ) les performances de ce patient peuvent être vues comme une indépendance entre les propriétés syntaxiques et les propriétés phonologiques des mots . Tandis que Kemmerer ( 1998 ) préfère envisager une indépendance entre les propriétés sémantiques et les propriétés phonologiques des mots . La compréhension des auxiliaires a été étudiée au moyen de techniques en temps réel . La tâche de décision lexicale inter-modale à été utilisée dans le but de mettre en évidence un déficit d' accès à l' information syntaxique . Les résultats de Friederici et Kilborn ( 1989 ) ont montré une sensibilité de l' information grammaticale pendant le traitement de la phrase en temps réel . Un délai de 200 msec entre la présentation du contexte et le mot cible permettait aux patients d' activer les propriétés syntaxiques pertinentes dans le contexte entendu . En revanche , même si les temps étaient plus longs lorsque le participe passé n' était pas en accord avec l' auxiliaire par rapport à des participes passés en accord avec l' auxiliaire , cette différence n' était pas significative . Haarmann et Kolk ( 1991 ) ont repris le même paradigme mais ils ont utilisé des délais entre la présentation du contexte et la cible qui étaient plus longs que ceux de Friederici et Kilborn ( 1989 ) . La sensibilité apparaissait pour le délai le plus longs , ce qui a amené les auteurs à suggérer un ralentissement de l' activation de l' information morphosyntaxique . Ces résultats seront critiqués par Tyler et al. ( 1995 ) qui ne montraient pas de ralentissement dans l' accès de l' information en général ni dans l' accès plus spécifique de l' information syntaxique . Une autre technique permettant d' évaluer la compréhension des auxiliaires pendant le traitement de la phrase est celle de la tâche de détection de mots utilisée par Baum ( 1989 ) . L' expérience de Baum ( 1989 ) impliquaient des erreurs d' auxiliaires . Les résultats ont montré que les patients étaient sensibles à des erreurs grammaticales mais uniquement dans des cas où par exemple la présence ou l' absence d' un auxiliaire était proche du mot à détecter . 5 . Synthèse du chapitre 2 Ce chapitre , après une brève définition de l' aphasie , a décrit les différentes explications possibles des troubles de compréhension des patients . Caramazza et Zurif ( 1976 ) ont été les premiers à mettre en évidence des déficits de compréhension chez des patients souffrant d' aphasie et à conclure à une perte de compétence syntaxique . Cependant , les patients ne présentaient pas de troubles de compréhension dans toutes les structures syntaxiques . Pour Grodzinsky ( 1984 ) il s' agirait plutôt d' un problème de déplacement de constituants qui serait absent de la représentation linguistique des aphasiques . Cette approche du déficit sélectif de compréhension des aphasiques posent un problème au niveau des verbes inaccusatifs . Ces verbes qui pourtant impliquent un déplacement de constituant ne posent pas apparemment pas de problème de compréhension . Ce chapitre a ensuite présenté les travaux relatifs à la production et à la compréhension des verbes intransitifs . Trois modèles de compréhension des verbes intransitifs tentent d' expliquer les performances des aphasiques concernant les verbes inaccusatifs . Le Tableau 3 résume l' ensemble des travaux sur la distinction inaccusatifs / inergatifs . Tableau 3 . Récapitulatif des différentes expériences concernant les verbes inaccusatifs et inregatifs relatées dans le chapitre 2 ( Note : les " > " signifient plus facilement produit ) . Les tâches de production tendent à dissocier les verbes inaccusatifs des verbes inergatifs ( Kegl , 1995 ; Lee Thompson , 2003 ) . Les tâches de compréhension quant à elles suggèrent que la distinction inaccusatifs / inergatifs est peu importante voire inexistante ( Gahl et al. , 2003 ; Lee Piñango , 2000 ) . Le chapitre se termine par une présentation des travaux relatifs à la compréhension des auxiliaires . Le Tableau 4 résume des travaux plus spécifiques sur l' auxiliaire . Tableau 4 . Récapitulatif des différentes expériences concernant les auxiliaires relatées dans le chapitre 2 La tâche de Miozzo et Caramazza ( 1997 ) a mis en évidence l' utilisation correcte de l' auxiliaire . Les tâches on-line de compréhension suggèrent une sensibilité aux auxiliaires qui apparaît plus tardivement que chez des personnes sans lésion cérébrales ( Friederici Haarmaan & Kolk , 1991 ) . Enfin , cette sensibilité à une erreur d' auxiliaire semble apparaître seulement localement ( Baum , 1989 ) . Afin de prendre en compte toutes les données expérimentales rapportées ici et en se fondant sur la classification des verbes de Sorace ( 2000 ) nous avons décidé de comparer des verbes transitifs à des verbes intransitifs au moyen d' une tâche de détection de mots . Les verbes transitifs ont été inclus dans des structures actives et passives . Les verbes intransitifs incluent des verbes dits centraux ( inaccusatifs et inergatifs ) et des verbes périphériques ( grande variabilité inter langue ) . Cette méthode de détection de cibles a été utilisée afin d' essayer de mettre en évidence une sélection immédiate de l' auxiliaire correct . L' objectif de cette technique expérimentale est d' évaluer des processus automatiques en temps réel . Pour cela , le participant ne doit pas être interrogé explicitement sur l' aspect qui fait l' objet de l' étude , la réponse doit être demandée à proximité du stimulus et le temps de réponse laissé au participant doit être très bref . La tâche des participants est d' appuyer sur un bouton dès qu' ils détectent un mot particulier ( Kilborn Marslen-Wilson & Tyler , 1975 , 1980 ; Tyler et Warren , 1987 ) dans une phrase . Marslen-Wilson et Tyler ( 1975 , 1980 ) ont utilisé cette méthode et . la procédure était en deux parties . Dans la première partie , un mot isolé ( mot cible ) était présenté , et dans la seconde partie , les participants entendaient une phrase , contenant le mot cible . La tâche du participant était de se souvenir du mot de la première partie et d' appuyer sur un bouton dès qu' il entendait ce mot dans la phrase de la seconde partie . Les résultats ont montré des temps de détection plus longs lorsque le mot cible était précédé d' un contexte inapproprié . Pour Kilborn et Moss ( 1996 ) , cette épreuve et les formes des phrases construites sont tout à fait appropriées à l' étude de populations incluant les jeunes enfants et les cérébro-lésés . Les variables indépendantes incluent la nature de la position de la cible et le contexte dans lequel elle est incorporée . CHAPITRE 3 Expérience 1 : Tâche de Détection de Mots 1 . Objectifs La sensibilité à des erreurs d' auxiliaires a été testée essentiellement pour des erreurs détectables de manière locale . En d' autres termes , dans tous les matériels employés jusqu'à présent l' erreur pouvait être détectée en traitant seulement les deux mots de la suite auxiliaire + participe passé . Qu' il s' agisse d' un matériel allemand , néerlandais ou anglais , les phrases non grammaticales comportaient un verbe intransitif au participe passé qui ne pouvait convenir avec l' auxiliaire employé ( Friederici et Kilborn , 1989 ; Haarmann et Kolk , 1991 ; Tyler et al. , 1995 ) . Or , les troubles de compréhension de la syntaxe qui sont notés chez les aphasiques concernent surtout des phrases où les éléments à intégrer syntaxiquement sont distants . En effet , Baum ( 1989 ) a suggéré que des patients aphasiques de Broca pouvaient avoir un déficit sélectif de sensibilité pour des erreurs syntaxiques impliquant des éléments distants . De plus , aucune étude n' a examiné dans quelle mesure les patients aphasiques , souffrant de troubles de compréhension syntaxique , demeuraient sensibles à des erreurs de sélection d' auxiliaires dépendant directement de l' aspect induit par le contexte : " Progressivement la neige a / * est fondu ( e ) " . La distinction d' aspect est portée par un mot de contenu ( e.g. , progressivement ) qui peut être correctement traité par des patients aphasiques souffrant d' un trouble de traitement des informations grammaticales . Il semble donc intéressant de déterminer si ces patients restent sensibles à une erreur d' auxiliaire portée par une dimension aspectuelle . Dans une étude récente , Piñango et Zurif ( 2001 ) ont examiné dans quelle mesure trois patients aphasiques de Broca et trois patients aphasiques de Wernicke demeuraient sensibles à une opération de coertion aspectuelle . Cette opération dépend de la nature des verbes et de leur complément . Une phrase comme : " Le cheval a sauté pendant une heure hier " suggère que le cheval a sauté de façon répétée pendant une heure . Cette phrase est un cas de composition sémantique enrichie défini comme une opération par laquelle une fonction de répétition est introduite . Une phrase comme " La fille a dormi jusqu'à l' aube " est un cas de composition sémantique transparente syntaxiquement . La fille dort pendant une période indiquée par le constituant " jusqu'à l' aube " . La signification de la phrase vient directement de la signification des items lexicaux mis ensemble par des processus syntaxiques . Les phrases étaient présentées auditivement et les patients devaient décider si l' action avait eu lieu une ou plusieurs fois . Ils donnaient leur réponse à haute voix ou en désignant une carte sur laquelle était inscrit " une fois " ou " plusieurs fois " . Contrairement aux aphasiques de Wernicke , les patients aphasiques de Broca ont fait très peu d' erreurs et les auteurs ont conclu que les patients aphasiques de Broca éteint sensibles à cette opération sémantique de coertion aspectuelle . Friederici ( 1985 ) a testé la compréhension de trois types de prépositions allemandes chez des patients aphasiques agrammatiques . Les prépositions allemandes appartenant au vocabulaire de la classe fermée peuvent être soit de nature lexicale ( prépositions traitées au niveau syntaxique et sémantique ) , de nature obligatoire ( prépositions traitées au niveau syntaxique ) . Une troisième catégorie de préposition est appelée verbe à particule . Cette dernière contribue à la signification du verbe et elle est traitée prioritairement au niveau sémantique . Les résultats à une tâche de décision lexicale ont montré que les patients détectaient plus vite les verbes à particules que les deux autres types de prépositions . De plus , les verbes à particules étaient détectés plus vite dans un contexte relié sémantiquement que dans un contexte non relié sémantiquement . Pour Friederici ( 1985 ) , le fait que les prépositions allemandes soit traitées différemment suggèrent que ce qui est déficient chez des patients agrammatiques , c' est l' utilisation fonctionnelle correcte d' un item particulier plutôt que la perte de l' item lui-même . En tenant compte des expériences présentées dans le chapitre précédent et des contraintes liées à la sélection des auxiliaires présentées dans le premier chapitre , le matériel de notre expérience comprenait des verbes transitifs et intransitifs . Les verbes transitifs entrant dans la construction de phrase du type " C' est Jean que Pierre a / * est vu " nous permettait d' examiner si des patients aphasiques restent sensibles à des erreurs d' auxiliaire qui ne sont pas déterminées localement . En effet , la suite " est vu " n' est pas en elle-même incorrecte au niveau local et la prise en compte de la structure syntaxique est essentielle pour pouvoir détecter l' erreur . Concernant ce type de contrainte , les patients souffrant de troubles de compréhension syntaxique devraient présenter une insensibilité , en temps réel , à une erreur de sélection d' auxiliaire dépendant de la structure syntaxique de l' énoncé . A l' intérieur des verbes intransitifs , des verbes inaccusatifs et inergatifs ont été utilisés dans des phrases du type " Aujourd'hui Virginie est / * a venu ( e ) me voir " . Ce type de phrases inclut des erreurs locales , permettant de comparer directement nos résultats à ceux de la littérature existante et suggérant que des patients aphasiques peuvent rester sensibles à une telle incorrection . Enfin , une dernière condition incluant des verbes intransitifs qui fonctionnent avec les deux auxiliaires ont permis des constructions du type " Progressivement la neige a / * est fondu ( e ) " . Les suites " a fondu " ou " est fondu " sont toutes les deux correctes , mais c' est le mot de contenu " progressivement " qui porte la dimension d' aspect et qui rend la phrase grammaticale ou non . Les patients aphasiques peuvent rester sensibles à une erreur d' auxiliaire qui serait déterminée par une simple contrainte d' aspect . Nous avons utilisé la tâche de détection de mot où le mot à détecter était un verbe au participe passé , précédé d' un auxiliaire correct ou incorrect comme dans l' exemple ( 26 ) : Cible à détecter : " aller " Phrase contexte correct : " Vendredi , Thomas est allé chez Anne " Phrase contexte incorrect : " * Vendredi , Thomas a allé chez Anne " . La tâche de détection de mots permet , en manipulant le contexte , de rendre compte des différences de temps de détection entre des phrases grammaticales et des phrases non grammaticales pour : a ) des mêmes verbes transitifs à la voie passive et active , b ) pour des verbes intransitifs ( inaccusatifs / inergatifs ) qui n' admettent qu' un seul auxiliaire , et , c ) pour des verbes intransitifs qui admettent les deux auxiliaires . 2 . Récapitulatif du dispositif expérimental Pour chaque type de contraintes , le patient entend un mot cible ( le verbe au participe passé ) qu' il devra répéter afin de s' assurer d' une audition correcte du mot . Ensuite , il va entendre une phrase qui contiendra ce mot cible . La tâche consiste à appuyer sur un bouton dès qu' il perçoit ce mot cible dans la phrase . Une sensibilité à une erreur d' auxiliaire sera montrée si les temps de détection sont plus longs dans le cas d' un verbe précédé d' un auxiliaire incorrect que dans le cas d' un verbe précédé de l' auxiliaire correct . Dans cet exemple , il faudrait que les temps de détection soient plus longs dans le cas de " * a allé " que dans le cas de " est allé " pour pouvoir conclure à une sensibilité à une erreur d' auxiliaire . Paradigme : & 239;& 129;& 149; Aller & 239;& 129;& 149; Vendredi , Thomas est allé chez Anne CIBLE Le participant répète Le participant appui dès le mot entendu qu' il entend le mot cible 3 . Méthode 3.1 . Participants 3.1.1 . Patients cérébro-lésés 3.1.1 . 1 . Caractéristiques des patients Quatre patients aphasiques ont été testés lors de passations individuelles : & 239;& 131;& 152; La patiente M. est une femme de 89 ans , droitière , ayant le certificat d' étude , sans profession . Il s' agit d' une aphasie de Broca suite à un accident cardio-vasculaire survenu deux ans avant l' expérience . Cette patiente présente une hémiplégie droite . Le scanner montre une ischémie pariétale gauche superficielle . La description de la Cookie Picture ( Boston Diagnostic Aphasic Examination ; Goodglass & Kaplan , 1983 ) révélait un agrammatisme ( noms sans articles , verbes non conjugués ) : « Vaisselle ... ah bon vaisselle , euh gâteau y a une fille là euh ... comment ça s' appelle ... oui alors ah ... garçon ... ah ben oui tomber attend robinet attend tombe ah ben oui de l' eau ... jeune fille. » . & 239;& 131;& 152; Le patient G. est un homme de 57 ans , droitier , ayant le certificat d' étude . Il s' agit d' une aphasie de conduction suite à un accident cardio-vasculaire survenu 10 ans avant l' expérience . L' IRM montre un ramollissement cortical et sous-cortical intéressant le lobe de l' insula et la région pariéto-occipitale pariéto-occipitale gauche . Il présentait un déficit moteur et sensitif du membre supérieur droit qui n' existait plus lors de la passation . La description de la Cookie Picture ne mettait pas en évidence un agrammatisme . En revanche , comme l' illustre l' extrait suivant , ce patient avait tendance à produire , au moins initialement , un mot grammatical incorrect ( paragrammatisme ) . « Elle est en train d' essuyer la vaisselle elle ... il ... voit l' enfant , euh les enfants , ils piochent dans le gâteau ... dans les gâteaux et tout d' un coup ils perdent le ... l' équilibre. » & 239;& 131;& 152; La patiente D. est une femme de 66 ans , droitière , ancienne institutrice à la retraite ayant le niveau bac . Il s' agit d' une aphasie de conduction suite à l' intervention d' un méningiome pariéto-temporal pariéto-temporal gauche quelques mois avant l' expérience . Cette patiente a une lésion pariéto-temporale gauche sans trouble moteur . Les extraits suivant de sa description de la Cookie Picture illustrent les paraphasies phonémiques , ainsi que les conduites d' approche phonémique de cette patiente : « Elle vient de laver des des tasses mais elle se bon alors son son dabo ... déborde [ ... ] le garçon grimpe sur le tamb ... , le tabouret qui est en équilibre prêt à basculer , il est en train d' attraper les go ... les gâteaux » & 239;& 131;& 152; Le patient MH. est un homme de 38 ans , droitier , technicien ayant le niveau bac . Il s' agit d' une aphasie non fluente suite à un accident cardio-vasculaire survenu 3 ans avant l' expérience . Cet homme a une lésion antérieure gauche , sans trouble moteur . Il présente un agrammatisme très prononcé repérable par les nombreuses omissions de mots grammaticaux dans sa description de la Cookie Picture : « En fait ... action ... la dame ... essuyer .... vaisselle ... fuit beaucoup ... débordé là enfant ... chercher ... gâteaux » . 3.1.1 . 2 . Etude préliminaire : évaluation des troubles de compréhension syntaxique Un test de compréhension orale de phrases a été administré aux patients avant l' expérience . Le matériel comportait deux structures de phrases différentes ( clivées sujet et clivées objet ) . Les phrases clivées sujet respectaient l' ordre canonique Agent-Action-Patient ( " C' est le tigre qui mord le lion " ) ; les phrases clivées objet ne respectaient pas cet ordre dans la mesure où le Patient était mentionné en premier ( " C' est le lion que le tigre mord " ) . Pour chaque structure , le patient entendait 20 phrases . Toutes ces phrases étaient sémantiquement réversibles . Les patients entendaient une phrase qu' ils devaient scénariser à l' aide de figurines . Ils devaient prendre l' une des deux figurines dans la main , celle qui fait l' action , pour rendre compte de la bonne compréhension de la phrase . Les résultats de chaque patients aphasiques sont reportés dans le Tableau 5 . Tableau 5 . Nombre de phrases réversibles bien comprises par chaque patient selon le type de structure . ( Note : les * indiquent dans quelle mesure chaque performance est distincte de l' aléatoire au test binomial : * * : seuil . 01 ; * seuil . 05 ) Tous les patients testés présentaient une performance indistincte du hasard pour les structures " clivées objet " alors que leur compréhension des " clivées sujet " était meilleure que l' aléatoire . Ce pattern suggère un déficit de compréhension grammaticale en accord avec les données de la littérature . 3.1.2 . Contrôles appariés Quatre participants contrôles ont également été testés lors de passations individuelles . Ces participants ont été appariés aux patients aphasiques sur l' âge , le sexe et le niveau d' étude : & 239;& 131;& 152; Le participant contrôle L. est une femme de 88 ans , droitière ayant le certificat d' étude . Ce participant est apparié au patient M . & 239;& 131;& 152; Le participant contrôle A. est un homme de 58 ans , droitier , à la retraite ayant le certificat d' étude . Ce participant est apparié au patient G . & 239;& 131;& 152; Le participant contrôle Y. est une femme de 65 ans , droitière , ancienne institutrice à la retraite ayant le niveau bac . Ce participant est apparié au patient D . & 239;& 131;& 152; Le participant contrôle R. est un homme de 36 ans , droitier , technicien ayant le niveau bac . Ce participant est apparié au patient MH . Les quatre participants contrôles ont également passé l' évaluation de compréhension syntaxique et comme les résultats le montrent ( Tableau 6 ) toutes les phrases étaient correctement comprises . Tableau 6 . Nombre de phrases réversibles bien comprises par chaque participant contrôle selon le type de structure . ( Note : les * indiquent dans quelle mesure chaque performance est distincte de l' aléatoire au test binomial : * * : seuil . 01 ; * seuil . 05 ) 3.2 . Matériel Dans cette étude 108 phrases expérimentales comportant 108 verbes à détecter ont été utilisées . La totalité du matériel utilisé est reporté en Annexe 2 . Quarante phrases appartenaient à la condition Syntaxe . Les verbes utilisés dans cette condition étaient tous des verbes transitifs . Cette condition était décomposée en deux sous parties : vingt phrases conduisant à une interprétation active ( 27 ) et vingt phrases conduisant à une interprétation passive ( 28 ) . C' est Monique que Sébastien a / * est giflé ( e ) C' est par Dominique que Didier est / * a contredit Trente six phrases appartenaient à la condition Lexique . Le choix s' est porté sur des verbes de déplacement sélectionnant soit avoir soit etre . Seize d' entre elles nécessitaient l' auxiliaire etre ( 29 ) et vingt autres phrases nécessitaient l' auxiliaire avoir ( 30 ) . Les verbes sélectionnant etre étaient inaccusatifs ( des verbes de changement de lieu : Sorace , 2000 ) . Concernant les verbes sélectionnant avoir , des verbes de type inergatif ont été sélectionnés . Il s' agissait de verbes intransitifs de déplacement impliquant une manière de déplacement ( e.g. , " pédaler " ) . Dans la classification de Sorace ( 2000 ) , il s' agissait de verbes dits de processus contrôlés ( déplacement ) . Aujourd'hui , Virginie est / * a entré ( e ) à l' hôpital Ce week-end , Emilie a / * est pédalé ( e ) pour se détendre Trente deux phrases appartenaient à la condition Aspect . Seize d' entre elles conduisaient à une interprétation centrée sur le processus en cours ( 31 ) et les seize autres phrases conduisaient à une interprétation centrée sur le résultat ( 32 ) . Le choix s' était porté sur des verbes admettant les deux auxiliaires quand ils étaient pris de manière intransitive . Dans la classification de Sorace ( 2000 ) , ces verbes étaient des verbes de changement d' état . Lentement la neige a / * est fondu ( e ) Actuellement la viande est / * a refroidi ( e ) Chaque phrase était présentée dans sa forme correcte et incorrecte . Le nombre de phrases correctes était donc le même que le nombre de phrases incorrectes . Les fréquences Frantext ( New , Pallier , Ferrand , & Matos , 2001 ) des verbes ont été contrôlées . Une analyse de variance ne mettait pas en évidence d' effet significatif de fréquence entre items correspondant aux trois types de contraintes ( F ( 2 , 33 ) < 1 ) . Les fréquences moyennes pour chaque contrainte sont reportées en Annexe 2 . En outre , nous avons évalué les fréquences Frantext des adverbes employés dans la condition d' aspect . Pour les locutions adverbiales comme " d' un seul coup " , nous avons calculé une moyenne des fréquences pour les mots de contenu de la locution ( i.e. , " seul " et " coup " ) . La fréquence moyenne des adverbes dénotant un résultat ( M = 286 , écart-type = 168 ) n' était pas significativement différente de la fréquence moyenne pour les adverbes dénotant un processus ( M = 130 , écart-type = 178 ) . Outre les 108 phrases expérimentales , 58 phrases de remplissage ont été construites . La principale différence entre les phrases expérimentales et les phrases de remplissage concernait la nature du mot cible . Dans les phrases de remplissage le mot cible n' était pas forcément le verbe au participe passé ( verbe à l' infinitif , nom propre , nom commun ) . Concernant l' ordre de présentation , nous nous sommes assurés que deux phrases consécutives n' appartenaient jamais à la même condition ( en terme de type de contrainte ) . De plus , deux phrases consécutives n' avaient jamais le même auxiliaire . Enfin , une phrase de remplissage était insérée entre deux phrases expérimentales consécutives . Les phrases ont été enregistrées avec une voix de femme à vitesse normale . L' enregistrement a été numérisé sur ordinateur Macintoch en utilisant le logiciel SoundEdit 16 . Les silences entourant chaque phrase ont été retirés et chaque phrase a été stockée dans un fichier indépendant . A l' aide du même logiciel , le temps séparant le début de l' énoncé du début du mot cible a été mesuré en millisecondes , pour les versions correctes et incorrectes des phrases . Des analyses de variance ont montré que ces temps n' étaient pas significativement différents pour les deux versions de chaque phrase quel que soit le type de contrainte . La mesure du temps de détection étant réalisée à partir du début de l' énoncé , le délai avant apparition du mot était soustrait du temps de réponse . Enfin , nous signalons que la durée moyenne des mots cibles dans les phrases ne différait pas significativement selon les contraintes ( F ( 2 , 51 ) < 1 ) . Une voix masculine a enregistré les mots cibles afférents à chaque phrase . Le fichier sonore correspondant à chaque mot a été adjoint au début du fichier sonore de la phrase qui lui correspondait . A l' aide de la fonction " Label " du logiciel SounEdit 16 , la partie composée par le mot isolé prononcé par un homme a été étiquetée ( pre ) , de même que la seconde partie contenant la phrase enregistrée par une femme ( post ) , ( cf. Figure 2 ) . Les seules modifications opérées sur les fichiers sonores ont concerné l' augmentation de l' amplitude des sons . Enfin , le programme PsyScope ( Cohen , MacWhinney , Flatt , & Provost , 1993 ) gérait la diffusion des stimuli . Figure 2 . Exemple de phrase numérisée à l' aide du logiciel SoundEdit 16 . Grâce à la fonction " Label " , la cible étiquetée " pre " et la phrase étiquetée " post " permettait au programme PsyScope de diffuser les deux parties . 3.3 . Procédure Chaque passation était individuelle . Le participant était devant un écran d' ordinateur muni d' une boîte à boutons . Les phrases étaient présentées auditivement grâce aux haut-parleurs de l' ordinateur . Au moment où s' affichait " attention " sur l' écran , le participant entendait un mot ( cible ) , qu' il devait répéter afin de s' assurer de la bonne audition du mot . Puis l' expérimentateur déclenchait la diffusion orale de la phrase . Dès que le participant entendait le mot à détecter dans la phrase , il appuyait sur un des boutons préalablement spécifié . La phrase continuait son déroulement normal et " essai suivant " apparaissait sur l' écran indiquant que l' expérimentateur allait déclencher un nouvel essai . L' ordinateur enregistrait les temps de réponses correspondant au délai entre le début de la diffusion de la phrase et l' appui du participant sur le bouton . Tous les participants se sont servis de leur main dominante pour l' appui sur le bouton à l' exception du patient M. atteint d' une hémiplégie droite . Pour chaque phrase , le délai séparant le début de la phrase et le premier phonème du mot à détecter avait été mesuré avant l' expérience . En calculant la différence entre le temps de réponse et le délai ainsi calculé , il était possible d' évaluer le temps de détection du mot . C' est ce temps de détection qui a constitué la variable dépendante . Dans les cas où le participant appuyait avant l' audition du mot , le temps était négatif . Il s' agissait donc d' une erreur d' anticipation qui était rejetée et remplacée par la moyenne des temps de détection dans la condition pertinente . Chaque participant lisait en premier lieu une consigne présentée sur l' écran d' ordinateur ( Annexe 1 ) . Par la suite , huit phrases d' entraînements leur étaient présentées , ces phrases ayant pour but de familiariser le participant avec l' utilisation de la boîte à boutons . 3.4 . Plan expérimental et hypothèses Dans cette expérience , chacun des participants entendait les phrases construites pour tester les trois types de Contraintes ( Syntaxe : 40 phrases ; Lexique : 38 phrases ; et Aspect : 32 phrases ) . De plus , chaque participant entendait chaque phrase dans sa version correcte et dans sa version incorrecte , ce facteur Exactitude ( c' est-à-dire exactitude de la phrase ; et non du jugement du participant ) était donc croisé avec les participants et avec les items . Comme signalé dans la partie consacrée au matériel , un contrôle de l' ordre de présentation évitait une présentation trop proche de phrases impliquant le même verbe . Donc , les deux facteurs Contraintes et Exactitude étaient intra-participants . Le facteur Exactitude était " intra-item " , et le facteur Contraintes était " inter-item " . Enfin , l' expérimentation a été administrée à quatre patients aphasiques et à quatre participants contrôles . Nous appellerons cette variable " Groupe " de participants ( aphasiques vs. contrôles ) . Etant donné le faible effectif , il nous a semblé préférable de ne pas considérer les quatre participants de chaque groupe comme une variable aléatoire , mais d' attribuer à ce facteur un statut systématique , la variable aléatoire servant pour nos analyses de variance impliquait les phrases ( cf. Marslen-Wilson et Tyler , 1997 pour un exemple de ce type d' analyse ) . Il nous était alors possible d' examiner dans quelle mesure les patients du groupe des aphasiques se distinguaient entre eux . Un facteur " Individus " a été également considéré , avec quatre modalités pour chacun des deux groupes . Dans la condition Syntaxe , les patients aphasiques , à la différence des participants contrôles , devraient présenter une insensibilité à une erreur d' auxiliaire dans des phrases avec des verbes transitifs qui impliquent la prise en compte de la structure syntaxique . Dans la condition Lexique , les patients aphasiques devraient présenter une sensibilité à une erreur d' auxiliaire pour les deux types de verbes impliquant une erreur locale . L' examen détaillé des verbes inaccusatifs d' une part impliquant un déplacement d' un syntagme nominal sans inversion de rôle thématique et des verbes inergatifs d' autre part n' impliquant pas ce mouvement nous permettra de comparer nos données avec les données de la littérature qui montraient que la compréhension de ces verbes ne posait pas de problèmes pour les patients aphasiques . Enfin , dans la condition Aspect , la sensibilité à une erreur d' auxiliaire pour des verbes intransitifs dans une condition où la non grammaticalité de la phrase repose sur un mot de contenu ne devrait pas poser de problème aux patients aphasiques . 4 . Résultats Concernant les patients aphasiques , le patient MH. a omis trois détections de cibles , les patients G. , M. et D. ont tous les trois omis une détection . Pour toutes ces omissions , les temps de réponse ont été remplacés par la moyenne de la condition pertinente . Aucune anticipation n' a été constatée pour les patients aphasiques . Concernant les participants contrôles , seuls deux participants contrôles ont commis des anticipations qui ont été remplacées par le temps moyen de la condition pertinente ( le participant contrôle A. a commis une anticipation et le participant contrôle L. en a commis trois ) . Aucune omission n' a été constatée pour les participants contrôles . Pour assurer une comparaison plus légitime entre les patients d' une part , et entre les patients et les contrôles d' autre part , les données de temps ainsi obtenues ont été transformées en scores Z calculés séparément pour chaque individu ( cf. Marslen-Wilson et Tyler , 1997 pour un exemple de cette méthode ) . Le calcul du score Z était donc réalisé à partir des temps pour les phrases correctes et incorrectes , des trois types de contraintes , et ceci pour chaque individu . Cette méthode nous permettait de centrer l' analyse des données sur les variations de temps de réponse imputables à l' exactitude des phrases et aux contraintes . En effet , nous n' étions pas intéressés par les variations moyennes de temps de réponse entre les patients et entre les patients et leurs contrôles . Les moyennes des scores Z pour chaque condition expérimentale et pour chaque participant sont reportées dans le Tableau 7 . Tableau 7 . Moyennes des temps de détection transformés en scores Z pour les trois types de contraintes ( Syntaxe , Lexique , Aspect ) , selon l' exactitude de l' auxiliaire ( Correct = Cor , Incorrect = Inc ) concernant les patients aphasiques et les contrôles adultes francophones . Sur ces scores Z , une première analyse de variance ( ANOVA ) a été réalisée avec les phrases de l' étude comme variable aléatoire ( F 2 ) et avec Contraintes ( Syntaxe , Lexique , Aspect ) x Exactitude ( Correctes , Incorrectes ) x Groupe ( Aphasiques , Contrôles ) x Individus ( quatre par Groupe ) . Chaque F sera associé à un indice additionnel permettant de refléter la grandeur de l' effet principal ( & 206;& 183;& 194;& 178; : Êta carré ) . Cet indice permet d' estimer la corrélation maximale au carré entre la variable indépendante et la variable dépendante indiquant la proportion de la variation expliquée par la variable indépendante . Les résultats ont montré une interaction triple significative entre les facteurs Exactitude , Contrainte , et Groupe , [ F 2 ( 2 , 51 ) = 3 , 2 ; p = 0 , 049 ; & 206;& 183;& 194;& 178; = . 112 ] . En effet , l' interaction entre Exactitude et Groupe variait selon le type de Contraintes . Plus précisément , cette interaction n' était significative que pour les contraintes Syntaxe [ F 2 ( 1 , 51 ) = 21 , 6 ; p < 0 , 001 ; & 206;& 183;& 194;& 178; = . 332 ] et e Lexique [ F 2 ( 1 , 51 ) = 7 , 5 ; p = 0 , 003 ; & 206;& 183;& 194;& 178; = . 159 ] mais elle ne l' était pas pour la contrainte Aspect [ F 2 ( 1 , 51 ) = 1 , 27 ] . Ainsi , pour les contraintes Syntaxe et Lexique , l' interaction double indiquait que l' allongement des temps pour les stimuli incorrects n' était significatif que pour le groupe des contrôles [ pour la contrainte Syntaxe : F 2 ( 1 , 51 ) = 43 , 1 p < 0 , 001 ; & 206;& 183;& 194;& 178; = . 457 et pour la contrainte Lexique : F 2 ( 1 , 17 ) = 30 , 6 , p < 0 , 001 ; & 206;& 183;& 194;& 178; = . 370 ] . Le groupe des patients ne présentait pas de ralentissement significatif pour les erreurs impliquant ces deux contraintes [ respectivement : F 2 ( 1 , 51 ) < 1 et F 2 ( 1 , 51 ) = 3 , 41 ; p = 0 , 07 ] . En revanche , pour la contrainte Aspect , les participants du groupe contrôle et les patients aphasiques présentaient un ralentissement équivalent et significatif en cas de phrase incorrecte [ pour les participants contrôles : F 2 ( 1 , 51 ) = 10 , 3 , p = 0 , 002 ; & 206;& 183;& 194;& 178; = . 168 et pour les aphasiques : F 2 ( 1 , 51 ) = 4 , 16 , p = 0 , 04 ; & 206;& 183;& 194;& 178; = . 075 ] . En résumé , ces résultats ont montré que le groupe des patients aphasiques ne présentait pas une sensibilité aux erreurs lexicales et syntaxiques , alors qu' il avait toujours une sensibilité aux erreurs d' aspect . A ce stade , nous pouvons donc conclure que l' Aspect est épargné mais pas la contrainte Syntaxe , ni la contrainte Lexique . Les patients aphasiques restaient globalement sensibles à l' Aspect comme contrainte de sélection des auxiliaires . Malgré une absence de quadruple interaction [ F 2 ( 6 , 153 ) = 1 , 64 ] , et du fait de la possibilité d' une certaine hétérogénéité des patients ( Caramazza , 1986 ; 1989 ) , il peut être instructif d' évaluer l' hétérogénéité des patients pour les différents types de Contraintes . Pour examiner plus avant cette hétérogénéité , nous avons évalué dans quelle mesure la sensibilité aux erreurs variait d' un patient à un autre pour chacune des trois contraintes linguistiques . Ainsi , pour la contrainte Syntaxe , l' interaction entre les Individus ( patient ) et l' Exactitude n' était pas significative [ F 2 ( 3 , 153 ) < 1 ] , suggérant qu' aucun patient n' était significativement sensible à ce type de contrainte . En revanche , pour la contrainte Lexique , la même interaction double était significative [ F 2 ( 3 , 153 ) = 3 , 11 , p = 0 , 03 ; & 206;& 183;& 194;& 178; = . 057 ] . En effet , seule la patiente D. était significativement sensible à une erreur d' auxiliaire dans cette condition [ F 2 ( 1 , 51 ) = 22 , 54 ; p < 0 , 001 ; & 206;& 183;& 194;& 178; = . 306 ] . D' ailleurs , pour cette patiente , l' interaction entre type de Contrainte et Exactitude était significative [ F 2 ( 2 , 51 ) = 4 , 92 , p = 0 , 04 ; & 206;& 183;& 194;& 178; = . 118 ] . Rappelons que la seule comparaison globale du groupe des patients et de celui des contrôles ( sans tenir compte des variations entre individus ) suggérait une insensibilité du groupe des aphasiques pour les erreurs lexicales . De fait , trois des quatre patients étaient conformes avec cette conclusion . Enfin , concernant la contrainte d' Aspect , de nouveau , une interaction significative était notée entre les Individus ( patients ) et l' Exactitude [ F 2 ( 3 , 153 ) = 3 , 33 ; p = 0 , 02 ; & 206;& 183;& 194;& 178; = . 112 ] . Cette fois , deux patients se conformaient à la sensibilité notée pour le groupe entier des aphasiques : le patient G. était sensible à une erreur d' auxiliaire dans la condition d' Aspect [ F 2 ( 1 , 51 ) = 8 , 10 ; p = 0 , 006 ; & 206;& 183;& 194;& 178; = . 137 ] ainsi que la patiente M. [ F 2 ( 1 , 51 ) = 7 , 66 ; p = 0 , 007 ; & 206;& 183;& 194;& 178; = . 130 ] . Nous soulignons enfin que , si nous nous limitions cette fois aux quatre individus contrôles , l' interaction entre les facteurs Individus et Exactitude n' était significative pour aucun des trois types de Contraintes : tous les Fs < 1 . Ceci suggère que les variations de sensibilité entre participants contrôles étaient faibles . Pour rendre compte des différences de sensibilité d' auxiliaire entre les différentes catégories de verbes , une seconde ANOVA a été réalisée avec Verbes ( Transitifs , Inaccusatifs , Inergatifs , Périphériques ) x Exactitude ( correcte , incorrecte ) x Groupe ( aphasiques , contrôles ) x Individus ( quatre individus par groupe ) . Les moyennes des scores Z pour chaque condition expérimentale et pour chaque participant sont reportées dans le Tableau 8 . Les verbes Transitifs correspondent à la condition Syntaxe , les verbes Inaccusatifs et Inergatifs correspondent à la condition Lexique et les verbes Périphériques correspondent à la condition Aspect . Tableau 8 . Moyennes des temps de détection transformés en scores Z pour les quatre types de contraintes ( Transitifs = Trans , Inaccusatifs = Inac , Inergatifs = Iner , Périphériques = Périph ) , selon l' exactitude de l' auxiliaire ( Correct = Cor , Incorrect = Inc ) , concernant les patients aphasiques et les contrôles adultes francophones . Les résultats ont montré une interaction Verbes x Groupe significative [ F 2 ( 3 , 50 ) = 8 , 1 ; p < 0 , 001 ; & 206;& 183;& 194;& 178; = . 330 ] . Alors que dans le groupe des participants contrôles les temps de détection étaient équivalents entre les quatre types de Verbes [ F ( 3 , 50 ) < 1 ] , il existait une différence significative pour les patients [ F 2 ( 3 , 50 ) = 24 , 88 ; p < 0 , 001 ; & 206;& 183;& 194;& 178; = . 598 ] . Les temps de détection étaient plus longs pour les verbes inergatifs et les verbes inaccusatifs . Il existait également une interaction triple entre les facteurs Verbes , Exactitude et Groupe [ F 2 ( 3 , 50 ) = 3 , 58 ; p = 0 , 044 ; & 206;& 183;& 194;& 178; = . 244 ] . L' interaction Groupe x Exactitude était significative pour les verbes transitifs [ F 2 ( 1 , 50 ) = 25 , 57 ; p < 0 , 001 ; & 206;& 183;& 194;& 178; = . 338 ] . En effet , seul le groupe des participants contrôles présentait une sensibilité à une erreur d' auxiliaire [ contrôle F 2 ( 1 , 50 ) 42 , 3 ; p < 0 , 001 ; & 206;& 183;& 194;& 178; = . 458 et aphasiques F 2 ( 1 , 50 ) < 1 ] . Cette interaction était également significative pour les verbes inergatifs [ F 2 ( 1 , 50 ) = 9 , 53 ; p = 0 , 003 ; & 206;& 183;& 194;& 178; = . 160 ] . Les erreurs d' auxiliaires ont été détectées pour les participants contrôles mais pas pour les aphasiques [ respectivement F 2 ( 1 , 50 ) = 14 , 76 ; p < 0 , 001 ; & 206;& 183;& 194;& 178; = . 227 et F 2 ( 1 , 50 ) < 1 ] . L' interaction entre Exactitude et Groupe n' était pas significative pour les verbes inaccusatifs et périphériques reflétant une sensibilité équivalente à une erreur d' auxiliaire dans les deux groupes [ respectivement , F 2 ( 1 , 50 ) = 1 , 52 et F 2 ( 1 , 50 ) = 1 , 24 ] . En résumer , les patients n' ataient pas sensibles à une erreur d' auxiliaire dans la condition Syntaxe . Ils n' étaient pas non plus sensibles à une erreur d' auxiliaire dans la condition Lexique ( un seul patient restait sensible à une erreur d' auxiliaire dans ce type de contrainte ) . Un examen plus détaillé des deux types de verbes intransitifs employés dans cette condition a mis en évidence que deux patients étaient sensibles à une erreur d' auxiliaire avec les verbes inaccusatifs . En revanche , les patients restaient sensibles à une erreur d' auxilaire dans la contrainte Aspect . 5 . Synthèse du chapitre 3 La tâche des participants consistait à entendre un mot et à le détecter dans une phrase . Conformément à notre hypothèse , les patients de cette étude n' étaient pas sensibles à une erreur d' auxiliaire si cette erreur impliquait la structure syntaxique de l' énoncé . Les quatre patients présentaient des troubles de compréhension grammaticale , qui ont été mis en évidence à l' aide d' un test préalable de manipulation de figurines . Ils ne parvenaient pas à déterminer l' Agent des phrases complexes . En revanche , quand seul l' ordre des mots suffisait pour adopter la bonne interprétation ( Sujet & 226;& 128;& 147; Verbe & 226;& 128;& 147; Objet ) , ces patients présentaient une bonne compréhension . Les patients aphasiques de notre étude présentaient donc un déficit à tenir compte des contraintes syntaxiques , tant pour déterminer l' auxiliaire , que pour déterminer l' agent d' une phrase . Mais , concernant le groupe des patients de notre étude , et plus spécifiquement G. et M. , l' insensibilité aux erreurs d' auxiliaire n' était pas " générale " . Si la contrainte enfreinte était d' ordre sémantique ( i.e. , contrainte d' Aspect ) , alors ces malades demeuraient sensibles à une erreur affectant l' auxiliaire ( Griffini , Rigalleau & Cordier , 2003 ) . La sensibilité des patients pour au moins un type d' erreur suggère aussi que les éventuelles difficultés motrices des patients ( i.e. M. se servait de sa main gauche pour répondre ; G. avait présenté initialement un trouble moteur droit bien résorbé au moment du test ) n' empêchaient pas la technique de temps de détection d' objectiver la sensibilité linguistique des patients . Concernant la contrainte dite lexicale , nous avions prédit une sensibilité relativement épargnée pour ce type d' erreur " locale " . Ceci est loin d' être vérifié , puisque seule la patiente D. présentait une sensibilité aux erreurs lexicales , alors qu' elle n' était pas significativement sensible aux erreurs syntaxiques et aux erreurs d' aspect . Il s' agit d' un premier indice d' une dissociation possible entre la contrainte lexicale et les deux autres contraintes . Ce pattern pourrait refléter un déficit de mémoire à court-terme , car la patiente D . était seulement sensible aux erreurs " locales " impliquant deux termes consécutifs ( e.g. , " * a entré " ) . Ainsi , une contrainte impliquant des éléments verbaux distants implique un maintien de la forme phonologique qui serait particulièrement difficile pour un patient dont la boucle phonologique ( Baddeley , 1986 ) serait déficiente . Ce déficit pourrait même être accentué dans le cadre de notre tâche puisque les patients devaient maintenir le mot à détecter pendant l' audition de la phrase . Pour les patients D. et G. , une mesure d' empan de lettres et de chiffres a été réalisée avec présentation orale des stimuli et réponse de pointage limitant les éventuels effets du trouble de production de la parole . Le patient G. avait un empan de 2 chiffres et de 2 lettres , indiquant une réduction de sa mémoire à court-terme . Pourtant ce malade était apparemment plus sensible à une erreur distante ( contrainte Aspect ) qu' à une erreur locale ( contrainte Lexique ) . La patiente D. avait pour sa part un empan de 4 chiffres et de 4 lettres , plus faible que celui de son contrôle qui avait un empan de 6 items , mais plus important que celui du patient G. La patiente D. avait pourtant un déficit pour les erreurs locales . Même si nous ne disposons pas des empans de tous les patients testés , ces résultats partiels n' indiquent pas un lien clair entre le déficit de mémoire à court-terme et la sensibilité diminuée pour les erreurs distantes . D' autres études seront nécessaires pour considérer les éventuels liens entre la sensibilité à des erreurs distantes et différentes mesures de mémoire de travail . Un certain nombre d' études auprès de patients aphasiques ( voir Smith & Geva , 2000 pour une revue ) ont généralement montré qu' un déficit de la mémoire de travail conduisait à un déficit de la compréhension du langage uniquement lorsque les phrases étaient complexes . Ces études diffèrent par rapport à la définition de la complexité en terme de syntaxe , de sémantique et de longueur de phrases . Certaines recherches se sont centrées sur la complexité syntaxique , plus spécifiquement sur la compréhension des phrases passives et des phrases subordonnées objet . Beaucoup de ces études n' ont pas montré de troubles de compréhension même en présence d' une capacité de mémoire de travail limitée ( voir Caplan Friedman & Gvion , 2003 ) . Les données concernant les erreurs locales examinant des erreurs d' auxiliaires dans des phrases inaccusatives et inergatives ont précisé les résultats obtenus par les patients aphasiques . En effet , ils ne présentaient pas de difficultés pour des phrases impliquant des verbes inaccusatifs . Les résultats sont en accord avec ceux de la littérature ( Gahl et al. , 2003 ; Lee & Thompson , 2004 ) . En revanche , ils présentaient des difficultés pour des phrases impliquant des verbes inergatifs . Ces résultats ne représentent pas nécessairement une contradiction avec la littérature existante ( Lee Piñango , 2000 ; Thompson , 2003 ) . En effet , même s' il n' existait pas de différence de fréquence entre les verbes inaccusatifs et inergatifs , cet absence d' effet était principalement du à la présence du verbe " être " dans la catégorie des verbes inergatifs . Sans ce verbe , il existait un déséquilibre et les verbes inaccusatifs utilisés étaient plus fréquents que les verbes inergatifs . Les patients resteraient donc sensibles à une erreur d' auxiliaire avec les verbes les plus fréquents . CHAPITRE 4 La sélection des auxiliaires et la seconde langue Ce dernier chapitre théorique aborde la question de la compréhension des auxiliaires pour des apprenants d' une seconde langue . Nous nous intéressons à la sélection des auxiliaires en français et en allemand parce qu' elle présente des différences pour quelques verbes intransitifs ainsi que pour les verbes pronominaux . Dans un premier temps , nous abordons des questions relatives à l' acquisition d' une seconde langue en général : la possibilité de difficultés d' apprentissage d' une seconde langue à l' âge adulte et les différentes hypothèses explicatives . Nous détaillons par la suite quelques résultats de travaux expérimentaux concernant l' acquisition des verbes inaccusatif / inergatifs . Dans un second temps , nous expliquons quelles sont les principales différences entre le français ( langue romane ) et l' allemand ( langue germanique ) dans la sélection des auxiliaires . Nous passons en revue toutes les catégories de verbes impliquées dans la HSA de Sorace ( 2000 ) ainsi que la catégorie de verbes pronominaux . Ce chapitre se termine en expliquant quelles sont les différentes méthodologies possibles pour mettre en évidence des difficultés de sélection des auxiliaires pour des apprenants adultes . 1 . L' apprentissage d' une seconde langue à la puberté L' acquisition d' une seconde langue ( Second Language Acquisition , SLA ) est le processus par lequel les personnes apprennent une langue en plus de leur langue maternelle . Le terme seconde langue est utilisé pour décrire n' importe quelle langue où l' acquisition commence après l' enfance . La langue apprise est souvent désignée comme étant la " langue cible " ou " L 2 " , l' acquisition d' une seconde langue est quelquefois appelée " acquisition L 2 " . La différence entre acquisition et apprentissage a été faite par Krashen ( 1982 ) . L' acquisition d' une langue est un processus naturel ( non-intentionel ) , la personne évolue dans des situations naturelles de communication . L' apprentissage est un processus conscient , les erreurs éventuelles faites pas les apprenants sont corrigées par l' apprentissage de règles grammaticales . L' acquisition d' une seconde langue se focalise sur la connaissance et sur l' utilisation d' une langue par des enfants et des adultes qui ont toujours connu au moins une autre langue . Nous utiliserons indifféremment le terme d' acquisition L2 et apprenants L2 pour désigner des locuteurs qui ont appris leur seconde langue tardivement ( vers l' âge de 13 ans ) . 1.1 . Un âge critique pour apprendre une seconde langue ? Certains auteurs ont estimé que les adultes ne pouvaient pas apprendre une seconde langue ( L2 ) au même titre que les enfants le font avec leur première langue ( L1 ) ( Krashen , 1978 , 1982 ; Lenneberg , 1967 ) . Beaucoup de facteurs peuvent contribuer à l' apparente incapacité des adultes dans ce domaine . Les trois facteurs qui ont reçu le plus d' attention des chercheurs sont , a ) les facteurs neurospychologiques ( question de plasticité ou variante sur la notion de la " période critique " d' apprentissage d' une langue ; Krashen , 1973 , 1975 ; Johnson Lenneberg , 1967 ; Pallier , Dehaene , Poline , LeBihan , Argenti , Dupoux Perani , Paulesu , Galles , Dupoux , Dehaene , Berettinardi , Cappa , Fazio & Mehler , 1998 ) , b ) les facteurs affectifs ( différences individuelles au niveau de la motivation construite dans le processus d' acquisition , Gardner , 1980 ) , c ) les facteurs cognitifs ( un locuteur adulte L2 peut appliquer des stratégies métalinguistiques qui ne font pas partie du répertoire des locuteurs L1 pour résoudre certains problèmes de communication , MacWhinney , 1992 ; McDonald & Heilnman , 1992 ) . L' acquisition de la L2 fournit un contexte important pour examiner l' interaction entre des processus cognitifs généraux et des processus linguistiques spécifiques . Selon certaines recherches , la différence entre une première langue et une seconde langue est l' âge auquel la langue a été acquise . Par exemple , le linguiste Lenneberg ( 1967 ) estime qu' une langue qui a été consciemment apprise ou utilisée par un locuteur après la puberté est une langue seconde . Dans la plupart des cas , les personnes n' atteignent jamais le niveau de fluence et de compréhension de leur seconde langue comparable à celui de leur première langue . Ces points de vue sont fortement associés avec l' hypothèse de la période critique ( Critical Period Hypothesis , CPH ) . Une " période critique " en psychologie développementale est une période précoce de la vie marquée par une très grande sensibilité à certains stimuli environnementaux . Si l' organisme ne reçoit pas les stimuli appropriés pendant cette " période critique " , il devient difficile de développer certaines fonctions après cette période . Par exemple , Johnson et Newport ( 1989 ) ont rapporté un effet de l' âge sur l' acquisition de certains aspects de grammaire . Dans leur étude , 46 locuteurs chinois et coréens ont appris l' anglais comme seconde langue . Les auteurs ont trouvé que l' acquisition de la syntaxe et de la morphologie anglaise était fortement corrélée avec l' âge de la première exposition à la seconde langue . Les locuteurs qui ont appris l' anglais comme seconde langue après l' âge de 7 ans montrent un déclin régulier dans l' acquisition de certaines règles de grammaire . De même , Hyltenstam ( 1992 ) a trouvé que l' âge autour de 6 - 7 ans semble être un point critique pour atteindre le même niveau de compétence que des L1 . Après cet âge , les apprenants L2 pourraient obtenir un niveau un peu moins bon que celui des locuteurs natifs , qui les placerait indépendamment du groupe des L1 . L' incapacité de certaines personnes à atteindre un niveau de compétence équivalent aux natifs peut être en relation avec " l' âge de commencement " . Pour la CPH , la difficulté tardive d' apprentissage d' une langue serait due à une diminution de la plasticité cérébrale . Il s' agit d' une hypothèse qui revendique que l' acquisition L1 chez l' enfant , et l' acquisition L2 adulte sont des processus cognitifs fondamentalement différents . L' acquisition L1 dépendrait de la faculté de langage en tant que faculté innée spécialisée de l' espèce humaine , qui permet l' acquisition du langage et l' acquisition L2 adulte serait surtout déterminée par des processus non linguistiques . Les premières formulations de CPH étaient explicitement liées au rôle de la Grammaire Universelle ( GU ) dans l' acquisition L2 adulte . Dans la théorie de la GU , les principes et paramètres sont supposés constituer une faculté cognitive innée qui rend l' acquisition du langage humain possible . Les principes grammaticaux sous-tendant les langages sont innés et fixés , les différences entre les diverses langues dans le monde peuvent être caractérisées en termes de paramètres programmés dans le cerveau ( tel le paramètre d' élision , pro-drop parameter , qui indique quand un sujet explicite est toujours requis , comme en anglais , ou s' il peut être éludé , comme en espagnol ) . Un principe important de cette théorie est que cette faculté innée est autonome . En d' autres termes , elle n' est pas dérivée d' autres facultés cognitives mais elle peut interagir avec elles . La GU est initialement une théorie d' acquisition de la première langue . Les enfants acquièrent une première langue avant qu' ils ne soient capables d' accomplir de simples tâches ( Chomsky , 1968 ) . Leur discours est dit " dégénéré " , avec de faux commencement , la recherche de leur mot et des erreurs grammaticales . Tous les parents ne corrigent pas ces erreurs et les enfants les surmontent toujours . Chomsky ( 1968 ) en conclut que chaque personne doit avoir un dispositif inné existant dans toutes les langues . Les enfants , sur la base de ce qu' ils entendent autour d' eux , ont mis en place ce dispositif pour acquérir cette langue . Une des caractéristiques de ce dispositif est qu' il existe une période critique pour acquérir une langue . Ainsi les adolescents et les adultes n' auraient plus accès à ce dispositif pour leur permettre d' acquérir une deuxième langue . Les partisans de la GU suggèrent que ce dispositif est toujours disponible , il n' est simplement plus capable d' aider l' acquisition d' une seconde langue sans interférer avec la première langue , c' est-à-dire que l' apprenant L2 appréhendera toujours la L2 à travers la L1 . Certaines recherches examinant le lien entre comportement et maturation cérébrale adoptent plutôt le concept de " période sensible " ( e.g. , Oyama , 1976 ) . Cette variation dans la terminologie reflète le sentiment grandissant qu' il existe des différences entre l' apprentissage d' une langue chez des adultes ou des enfants , mais qu' elles ne résident pas nécessairement dans l' accessibilité ou non des principes linguistiques universaux eux-mêmes . Plus récemment , Hyltenstam et Abrahamsson ( 2003 ) modifient leur conception d' âge critique et suggèrent qu' après l' enfance , en général , il devient de plus en plus difficile d' acquérir une compétence proche des natifs , mais qu' il n' existe pas de période critique en particulier . En outre , ils remarquent un certain nombre de cas où des L2 ont des compétences équivalentes aux natifs alors que la seconde langue a été apprise pendant l' âge adulte . 1.2 . Les différences entre la L1 et la L2 L' accessibilité à la GU est étroitement liée à la question de la période critique puisque la capacité innée d' apprendre une langue serait disponible seulement jusqu'à un certain âge ( e.g. , la puberté ) ( Moskovsky & Berghout , 2001 ) . Trois hypothèses ont été avancées concernant le rôle de la GU dans l' acquisition d' une seconde langue . La première est l' hypothèse de non accès ( no-access hypothesis ) qui suggère qu' aucun aspect de la Grammaire Universelle n' est disponible à l' apprenant L2 ( Bley-Vroman , 1990 ; Clahsen et Muysken , 1986 ) . L' acquisition de la L2 serait alors très différente de l' acquisition de la L1 , et cette différence existe parce que les apprenants de la L1 utilisent leur faculté de langage alors que les L2 utilisent des stratégies d' apprentissage pour acquérir leur seconde langue ( L' hypothèse de différence fondamentale , Bley-Vroman , 1990 ) . La deuxième est l' hypothèse d' accès partiel ( partial access hypothesis ) qui suggère que les apprenants peuvent avoir accès aux principes linguistiques mais pas à la gamme entière de variation paramétrique , ils ne seront pas capables d' acquérir les principes spécifiques de la L2 qui diffèrent de la L1 . L' hypothèse de " partial-access " suggère que la GU dans sa globalité n' est pas disponible comme source de connaissances pour l' acquisition d' une seconde langue ( Strozer , 1992 ) . Les apprenants utiliseraient une sorte de grammaire hybride , avec une partie contrainte par la GU et une partie qui ne l' est pas . Cependant , des études ont montré que des locuteurs japonais adultes apprenant l' anglais comme seconde langue sont capables d' attribuer des nouvelles valeurs paramétriques dans la construction d' une grammaire L2 ( Flynn & Martohardjono , 1994 ) . Libben ( 2006 ) représente les différences entre les locuteurs natifs et les apprenants comme suit : Apprenants L 1 : syntaxe en 1er puis les connaissances lexicales / du monde en 2nd Apprenants L 2 : les connaissances lexicales / du monde en 1er puis la syntaxe en 2nd Locuteurs natifs : les connaissances lexicales / du monde et la syntaxe interagissent La question importante pour Libben est de savoir pourquoi même avec un haut niveau de compétence L2 , les apprenants L2 ne peuvent pas avoir le même niveau que les locuteurs natifs ? Dans les études qui explorent la possibilité que les apprenants ne soient jamais capables d' acquérir les mécanismes de traitement et d' analyses identiques à ceux des locuteurs natifs , deux explications sont proposées . La première explication est que la langue L1 est caractérisée par la dominance des connaissances procédurales , alors que la langue L2 est caractérisée par la dominance des connaissances déclaratives ( Paradis , 2004 ; Ullman , 2001 ) . L' autre explication est l' hypothèse de Clahsen et Felser ( 2006 ) qui revendique que les apprenants adultes projettent une structure " moins profonde " que le font les enfants L1 ou les locuteurs adultes natifs ( Shallow Structure Hypothesis ) . Cette hypothèse suggère qu' une personne qui a appris une seconde langue à l' âge adulte utilise un type de mécanisme de traitement pour la L1 différent de celui utilisé pour la L2 ( décrit par Fernández , 1998 , 2006 comme un traitement pour chaque langue ) . Pour Epstein , Flynn et Martohardjono ( 1996 ) , ces modèles de non accès et d' accès partiel n' expliquent pas exactement ce que les L2 connaissent , et comment les L2 en viennent à connaître ce qu' ils savent . Bien que les deux modèles supposent implicitement que les apprenants L2 atteignent éventuellement une grammaire , aucun ne montre comment de telles grammaires peuvent être acquises par l' emploi de principes non linguistiques supposés centraux dans l' acquisition L2 . La dernière hypothèse est appelée plein accès ( full access hypothesis ) ( Epstein et al. , 1996 ; Hopp , 2005 ; White , 1989 , 2003 ) et elle suggère que la GU dans sa globalité contraint l' acquisition de la L2 . Dans cette hypothèse , soit les apprenants sont supposés transférer directement les propriétés de leur L1 à la L2 ( Schwartz full-transfer / full-access hypothesis ) , soit le |