La Dépêche

Corpus:
Chambers-Rostand (E)
Filename:
La Dépêche
Contact:
Angela Chambers, Séverine Rostand, Université de Limerick, Irlande
Annotation tiers:
Annotation automatique
Annotation status:
automatique
Type:
presse écrite
Text type:
presse quotidienne régionale
Modality:
écrit
Sample address:
/annis-sample/chambers-rostand/1_D_C_120603.html
Text:
MOISSAC ( 82 ) - A LIRE : LE RECUEIL D' AQUARELLES DE JEAN COLADON , ENRICHI DE TEXTES D' HENRI ENA , EST UNE ODE À MOISSAC « De la pierre à l' aquarelle » : un beau témoignage « Quand Moissac se blottit entre Tarn et coteaux , peut-être attend -elle le peintre qui oserait faire son portrait . Il fallait qu' il en soit amoureux . Je l' étais , et sortant peintures et pinceaux , je me suis mis à l' ouvrage ... » C' est sur le ton de la confidence que Jean Coladon parle du recueil d' aquarelles , édité en souscription , qui vient de sortir des presses de Jean-Michel Mothes . De l' idée à la réalisation technique , voici donc un ouvrage 100 % moissagais puisque les textes sont signés par Henri Ena . Comment pouvait -il en être autrement d' ailleurs pour évoquer , en cent aquarelles et quelques centaines de lignes ( une écriture ciselée qui vient éclairer le magnifique travail du peintre ) , cette ville de Moissac qu' ils chérissent tant ? « L' idée de cet ouvrage a surgi , bizarrement , d' un poème d' Arthur Rimbaud . Je venais de finir mon autre livre , le Florilège de 20 ans de peintures , mais je ne m' étais pas encore remis à l' huile » , explique le peintre . Pour Jean Coladon , l' « illumination » est donc venue de cette prose rimbaldienne , du poème « Métropolitain » extrait justement du recueil des Illuminations . « Du détroit d' Indigo aux murs d' Ossian , sur le sable rose et orange qu' a lavé le ciel vineux , viennent de monter et de se croiser des boulevards de cristal habités incontinent Rimbaud emploie ici l' adverbe « incontinent » ( inusité de nos jours ) qui signifie tout de suite , sur-le-champ , aussitôt . par de jeunes familles pauvres qui s' alimentent chez les fruitiers . Rien de riche . La ville ! » En juin 2001 , Coladon a donc abandonné pour un temps l' huile au profit de l' aquarelle . « Au début , je pensais faire des aquarelles avec quelques petites annotations au crayon . J' avais d' ailleurs feuilleté un livre d' aquarelles sur Paris où le dessin n' est pas complètement recouvert par l' aquarelle . C' est comme ça que je la conçois. » Dans un premier temps , le peintre a pensé croqué seul le portrait de cette ville d' adoption et de coeur . « Et puis un jour , mon ami Henri Ena a vu les premières aquarelles . Il a trouvé ça très intéressant . Alors , j' ai commencé à lui demander quelques précisions sur les textes . au bout du compte , il nous en fait 13 versions de textes affinés et peaufinés , car vous connaissez avec quelle exigence et quel talent Henri aime parler de sa ville. » UNE CURIOSITE AIGUISEE Ainsi , cet album , ce livre-cadeau ( oui , c' est un bien beau cadeau fait à la ville de Moissac ) est aussi l' histoire d' une rencontre entre deux amis , deux hommes également attachés à une ville dont ils apprécient d' un même accord les richesses et les charmes . Dans la préface , Chantal Fraïsse , conservateur du centre d' art roman , écrit joliment : « Jean a traité Moissac comme on peint une femme , amoureusement . Comment s' en étonner quand on sait que l' oeuvre de cet artiste profondément original , ancien élève des Arts appliqués , célèbre à chaque instant la femme , femme idéale , rêvée , déesse à la fois sensuelle et glacée ? Les architectures sont également largement présentes dans les compositions oniriques de ses huiles , souvent étourdissantes de brio et de raffinement . Il était dès lors naturel que Jean Coladon le Parisien réconcilie en peignant Moissac sa quête de la beauté vivante et son intérêt de constructeur pour les oeuvres de pierre ... » Poussé par la curiosité insatiable d' Henri Ena , le peintre avoue qu' il est « devenu de plus en plus curieux » dans cet itinéraire qui nous conduit « de la pierre à l' ... aquarelle » , pour reprendre le titre de l' ouvrage . « J' ai cherché à entrer dans des cousrs , des jardins , des maisons ou des églises qui ne s' ouvraient plus. » Loin de s' arrêter au patrimoine connu de Moissac , Coladon nous révèle les trésors cachés . Lui-même garde une émotion particulière pour la visite de la maison Lobios , place des Récollets , qui renferme d' exceptionnelles peintures murales datées du début du XIVe siècle . « Virginie Czerniak , qui consacre sa thèse d' histoire de l' art à ces fresques , m' avait demandé d' en faire le relevé . C' est un travail très difficile car ces peintures sont en grande partie effacées. » Ce faisant , Coladon fait oeuvre de mémoire . Il en est de même pour les deux stèles qui ornaient la fontaine , au pied de l' église Sainte-Jacques . « Elles ont été démolies et on ne les reverra plus » , regrette l' artiste qui assure donc à ces sculptures ( victimes d' un acte de vandalisme ) une forme de postérité . Un travail d' orfèvre que Jean Coladon et son complice Henri Ena auraient bien aimé poursuivre plus avant , tellement le plaisir fut à chaque instant au rendez -vous durant ces deux années . « Il a bien fallu que je m' arrête . Mais je pense quand même avoir fait un bon tour. »