La Dépêche

Corpus:
Chambers-Rostand (E)
Filename:
La Dépêche
Contact:
Angela Chambers, Séverine Rostand, Université de Limerick, Irlande
Annotation tiers:
Annotation automatique
Annotation status:
automatique
Type:
presse écrite
Text type:
presse quotidienne régionale
Modality:
écrit
Sample address:
/annis-sample/chambers-rostand/1_D_E_041203.html
Text:
Vingt ans après Sans doute faut -il se garder des opinions trop tranchées . Depuis la marche des beurs , il y a vingt ans , l' intégration n' a été ni l' échec total qu' on stigmatise souvent , ni la réussite que souhaitaient les gouvernants de l' époque . Comme souvent , la réalité se situe entre les deux , dans la grisaille d' une société française déboussolée par les incertitudes de sa mutation , sous l' effet conjugué de la crise économique et de la mondialisation . Certains fils d' immigrés sont parvenus à se faire une place au sein de la société . Raffarin a célébré , hier , ceux qui symbolisent cette réussite . Ils sont devenus chefs d' entreprise , élus locaux , voire simples salariés . Pour eux , il a été plus difficile de se frayer un chemin que pour les autres Français . Il leur a fallu braver les préjugés et le racisme . Inutile de le nier , ces discriminations continuent d' exister dans notre pays . Qu' il s' agisse de l' embauche ou de la recherche d' un appartement par exemple , la couleur de la peau constitue trop souvent un critère de sélection honteux . Et ce combat contre la xénophobie et le racisme en France prend la forme du mythe de Sisyphe ; il doit être sans cesse renouvelé . Car il est vrai que pour une grande majorité de beurs , l' intégration demeure encore un mirage . Non pas qu' ils ne la souhaitent pas . Bien au contraire , ils ne demandent qu' à s' insérer dans notre société . Leur comportement agressif ou leurs réactions violentes ne sont que l' expression de leur malaise et de l' injustice qu' ils ressentent à être marginalisés dans leurs banlieues assimilées de plus en plus à des ghettos . Les causes du phénomène remontent au début des années soixante . La France a encouragé l' immigration pour des raisons économiques mais n' a pas prévu les conséquences à long terme de cet appel de main-d'oeuvre bon marché . Une politique à courte vue qui n' a pas anticipé les besoins et les problèmes d' identité de la deuxième génération que les aléas économiques de la fin des années 70 n' ont fait qu' accentuer . Mais s' il existe un problème d' intégration , il ne concerne pas seulement les jeunes beurs . Il touche plus généralement les classes populaires . Car dans les cités , des enfants d' ouvriers ou d' employés français de souche ont également des difficultés à prendre en marche le train de la promotion sociale . Quant à leurs parents , souvent en proie au chômage ou aux dures réalités des familles éclatées , ils se sentent de plus en plus marginalisés . La frange de ces catégories populaires qui se réfugie dans l' abstention ou le vote protestataire , en opposition aux partis de gouvernement , traduit bien les carences de l' intégration . C' est donc bien vers ces populations en situation de précarité , quelle que soit la couleur de leur peau , que doivent se tourner prioritairement les politiques publiques . La fameuse « discrimination positive » doit s' exercer en direction de l' ensemble de ces catégories défavorisées , sinon elle risque d' accentuer le racisme . Ce n' est que lorsque les jeunes de banlieue pourront devenir préfets , sans que l' on s' interroge sur la couleur de leur peau , que le pari de l' intégration sera réellement gagné .