L'Humanité

Corpus:
Chambers-Rostand (E)
Filename:
L'Humanité
Contact:
Angela Chambers, Séverine Rostand, Université de Limerick, Irlande
Annotation tiers:
Annotation automatique
Annotation status:
automatique
Type:
presse écrite
Text type:
presse quotidienne nationale
Modality:
écrit
Sample address:
/annis-sample/chambers-rostand/1_H_E_201102.html
Text:
Utopiste debout ( La condamnation à la prison de José Bové est inadmissible , quelle que soit l' opinion que l' on ait sur ses modes d' action ) Le rejet du pourvoi en Cassation de José Bové , qui envoie en prison le leader syndicaliste pour quatorze mois , est d' une extrême gravité . Comment accepter un tel acharnement ? Des six condamnations prononcées contre José Bové depuis février 1998 , celle -là est de loin la plus lourde . Quatorze mois derrière les barreaux ... Qui veut -on briser ? L' homme , le syndicaliste , le militant altermondialiste ? Un peu tout cela à la fois , sans doute . L' ampleur de la peine est rarissime . Elle ravale l' action d' un militant au rang de celle d' un malfaiteur . C' est proprement inadmissible , et cela quelle que soit l' opinion que l' on ait sur les modes d' action de José Bové . Les militants anti-OGM justifient la destruction de plants de riz transgénique , à l' origine de cette condamnation , comme un acte de " légitime défense " , le " seul moyen de protester " contre une attitude qui place le monde paysan devant le fait accompli . D' autres , dont le PCF , plaident pour un moratoire mondial de la production et de la commercialisation des OGM . Une chose est sûre , un grand débat public et international est nécessaire dans la durée , et il n' existe pas vraiment , même si les actions entreprises l' ont en partie imposé sur les essais en plein champ en février 2002 . Personne ne peut prétendre régler ce problème en l' étouffant , en réduisant au silence les militants qui le portent sur le devant de la scène . La condamnation de José Bové est injustifiable , un point c' est tout . Elle doit d' autant plus soulever l' inquiétude qu' elle nourrit un dangereux climat de criminalisation de l' action syndicale et militante . Les noms d' Alain Hébert et d' Ahmed Meguini résonnent ici très fort . Mais ceux , également , des vingt militants altermondialistes italiens arrêtés ces jours derniers par la police de Berlusconi , à la suite du Forum social européen de Florence , pourtant exempt de tout incident violent . La décision de la Cour de cassation est à rebours de l' histoire . Au moment où le mouvement pour une autre mondialisation vient plus que jamais de s' imposer à Florence comme un des acteurs de la construction politique et citoyenne de nos sociétés , l' un des promoteurs de ce mouvement est jeté en cellule comme un vulgaire brigand . On voudrait briser l' élan engagé , diviser les forces rassemblées , caricaturer les unes en les présentant comme violentes et dangereuses tandis que les autres seraient appelées prétendument à la raison et finalement à la résignation , on ne s' y prendrait pas autrement . La combativité et le pacifisme de Florence dérangent . En France , où l' on accueillera dans un an le Forum social de Paris-Saint-Denis , les forces libérales qui tentent d' asseoir l' hégémonie libérale s' en inquiètent et sont prêtes à tout pour empêcher la résistance de se développer et de construire une alternative . Face à l' arbitraire , José Bové ne doit pas être seul . La solidarité humaine est la première et la plus évidente des attitudes à respecter . Chacun peut et doit lui témoigner soutien et fraternité . Mais , au-delà , l' unité doit s' élargir pour défendre le respect des libertés d' action syndicale . Et l' action doit se poursuivre pour conforter un mouvement ample , déterminé et ouvert de contestation du cours actuel de la mondialisation . En juillet dernier , un journaliste de l' Humanité avait réussi à dialoguer avec José Bové alors emprisonné à Villeneuve-lès-Maguelonne . Sur la photo qui accompagnait l' entretien , le leader paysan avait brandi une petite pancarte où deux mots étaient inscrits : " Utopiste debout " . Nous n' oublions pas ce clin d' oeil .