Le Monde

Corpus:
Chambers-Rostand (E)
Filename:
Le Monde
Contact:
Angela Chambers, Séverine Rostand, Université de Limerick, Irlande
Annotation tiers:
Annotation automatique
Annotation status:
automatique
Type:
presse écrite
Text type:
presse quotidienne nationale
Modality:
écrit
Sample address:
/annis-sample/chambers-rostand/1_M_E_041002.html
Text:
Salaires et actions ON DIT PARFOIS de la gauche qu' elle est en panne de doctrine économique et que les mutations présentes du capitalisme ont profondément ébranlé ses certitudes anciennes . Le constat n' est pas faux , mais il est partiel . Car on peut en dire tout autant de la droite française . Voici encore une dizaine d' années , celle -ci avait une vision économique du monde assez bien construite , dont l' actionnariat salarié était l' un des pivots essentiels . C' est Edouard Balladur qui l' avait , pour l' essentiel , conçue . Mettant en oeuvre les premières grandes baisses d' impôts et les premières vagues de privatisation , il avait défendu l' idée que ces cessions étaient un moyen privilégié de faire reculer l' emprise de l' Etat sur l' économie , mais aussi , en réservant systématiquement une part du capital des entreprises cédées à leurs salariés , de relancer la vieille idée gaulliste de la participation , rebaptisée " capitalisme populaire " . Or , aujourd'hui , force est de constater que les mutations économiques se sont accélérées , mais que personne , à droite , n' a fait l' effort de reconstruire une doctrine économique nouvelle . C' est ce qui donne le sentiment que la politique économique du gouvernement ne suit pas un cap bien déterminé . A quoi servent ainsi les privatisations , qui étaient hier la clé de voûte de la politique économique de la droite ? Le gouvernement ne le dit plus précisément . Pétrifié par la crise financière , il semble gérer les opportunités , prêt à mettre sur le marché une part complémentaire d' Air France , de la de la Snecma ou même de Gaz de France , si les marchés le permettent , mais ne semblant plus guère désireux de se presser pour ouvrir le capital d' EDF . Et à quoi sert l' actionnariat salarié ? Sur ce sujet , le gouvernement ne pilote pas même à vue : il est muet . Ce silence est incompréhensible . Au fil des ans , l' actionnariat est en effet devenu un élément -clé de la politique des revenus de nombreuses sociétés . La baisse de la Bourse pénalise donc fortement leurs salariés . Que doit faire Thierry Breton , qui arrive à la tête de France Télécom , pour compenser , en faveur des salariés , le recul boursier ? Si on devine qu' il aura assez d' imagination pour trouver une solution , il paraît curieux que le gouvernement n' ait pas d' avis public sur le sujet . L' actionnariat salarié a connu des bonheurs divers . Dans le cas de Vivendi Universal , par exemple , un plan actionnarial très agressif a été mis en place dès 1997 . En 1999 , la direction a donné dix actions à tous les salariés afin de les " associer au succès de l' entreprise " . Les fonds d' épargne salariaux étaient totalement investis en actions Vivendi . Les salariés des sociétés qui ont été intégrées par la suite dans le groupe , notamment ceux d' Havas puis de Canal + , ont vu toute leur épargne , constituée parfois depuis 1987 , reconvertie , sans qu' ils en soient informés en actions Vivendi . Aujourd'hui , ils n' ont aucun recours . Bref , le système a connu des dérives . Alors pourquoi nul ne semble-t- il s' en préoccuper , ni à la direction de nombreuses entreprises ni dans les sommets de l' Etat ?