Le Monde

Corpus:
Chambers-Rostand (E)
Nom de fichier:
Le Monde
Contact:
Angela Chambers, Séverine Rostand, Université de Limerick, Irlande
Niveaux d'annotation:
Annotation automatique
Statut de l'annotation:
automatique
Type:
presse écrite
Sous-type de texte:
presse quotidienne nationale
Modalité:
écrit
Sample address:
/annis-sample/chambers-rostand/1_M_N_040403.html
Texte:
Croissance , retraites , fonctionnaires : le casse-tête de M. Raffarin Jean-Pierre Raffarin devait intervenir jeudi 3 avril sur France 3 , pour accomplir un " devoir d' explication " vis-à-vis des Français . Cette émission intervient au soir de la journée de grève des fonctionnaires et des agents des entreprises publiques pour la défense de leurs retraites . Alors que la poursuite de la guerre en Irak assombrit l' horizon économique , le premier ministre devait confirmer qu' il garde le cap de sa politique , même s' il constate " une rupture de croissance " . Refusant d' augmenter la csg pour combler le déficit de l' assurance-maladie , il étudie un prolongement de la contribution au remboursement de la dette sociale au-delà de 2014 . La baisse de la tva sur la restauration n' est plus à l' ordre du jour pour 2004 . L' an prochain , la croissance en volume des dépenses publiques serait proche de zéro . Deux mois jour pour jour après sa dernière intervention télévisée , au cours de laquelle il avait ouvert le chantier de la réforme des retraites , Jean-Pierre Raffarin est de retour en prime time ... et en première ligne . Invité , jeudi 3 avril , d' une édition spéciale de " France Europe express " , sur France 3 , le chef du gouvernement devait s' y atteler , selon son entourage , à un " devoir d' explication " . Le principe d' une intervention télévisée de M. Raffarin était acquis depuis une dizaine de jours . La date en a été arrêtée au moment où il est apparu que " les sujets intérieurs commençaient à réexister dans le système d' information français " , indiquent les conseillers du premier ministre . " Rupture de croissance " ( l' expression a été employée le 31 mars par M. Raffarin ) , moral des ménages en berne , hausse du chômage et des déficits publics : à la dégradation forte de la conjoncture , accentuée par la guerre en Irak , s' ajoute un malaise social persistant , que devaient traduire la centaine de manifestations organisées , jeudi , dans le cadre de la journée nationale d' action sur les retraites . Dans ce contexte , le gouvernement apparaît plus que jamais écartelé entre les promesses de campagne de Jacques Chirac et le respect du pacte de stabilité européen . Pour le symbole , on retiendra que ces deux contraintes contradictoires sont réapparues à la veille de l' intervention de M. Raffarin . Lors d' un déjeuner avec des sénateurs , mercredi , le chef de l' Etat s' est dit " très hostile à toute idée de politique récessive " , rapporte l' un des convives . " Renoncer à la baisse des impôts serait une erreur " , aurait ajouté M. Chirac . Le même jour , la Commission européenne a justement critiqué , dans un rapport public , la politique française de baisses d' impôts , jugée partiellement responsable du dérapage des déficits . Si le premier ministre devait réaffirmer , sur France 3 , sa volonté de " garder le cap " des réformes , voire de les " intensifier " , ses conseillers travaillent depuis plusieurs semaines aux ajustements nécessaires . La maîtrise des dépenses publiques , après avoir été le parent pauvre de leur action depuis mai 2002 , est désormais au coeur de leur réflexion . Puisque les caisses sont vides et qu' il n' est pas question de mener une politique de " rigueur " , le gouvernement ne semble avoir d' autre choix que de s' imposer des économies . Du côté de l' Etat , les marges sont réduites , puisque , entre les salaires et les retraites des fonctionnaires ou encore le service de la dette , ce sont plus de 90 % du budget qui sont " rigides " - c' est-à-dire incompressibles sans mesures législatives spécifiques . Sur un budget de 273 milliards d' euros , seuls 20 milliards sont en fait " malléables " . M. Raffarin l' a répété à chacun des ministres qu' il a reçus en tête-à-tête , depuis le 24 mars , afin de préparer le budget 2004 . A tous , le premier ministre a suggéré de profiter du départ à la retraite de 40 % des agents de l' Etat d' ici à 2012 pour se réformer . Après avoir supprimé 1 089 postes de fonctionnaires en 2003 , M. Raffarin a pour objectif de ne remplacer que la moitié des 59 800 agents publics censés prendre leur retraite en 2004 . Le gouvernement est bien conscient que les fonctionnaires , dont les salaires sont gelés jusqu'à l' automne et dont les retraites devraient être moins généreuses , pourraient se mobiliser contre de tels arbitrages . Aussi rien n' est -il décidé à ce stade . Mais ces restrictions ne sauraient suffire à assainir les finances publiques . Si 30 000 postes de fonctionnaires étaient supprimés , l' économie ainsi dégagée ne représenterait que 500 millions d' euros en 2004 - selon l' estimation de Bercy - , avant de dépasser 4 milliards en 2008 . Le ministère des finances propose donc que les dépenses de l' Etat en 2004 restent stables en volume . Puisque les dépenses de pensions et le service de la dette doivent mécaniquement augmenter l' an prochain , une croissance zéro reviendrait à réduire d' autres postes de dépense . Matignon arbitrera fin avril . Même si M. Raffarin retenait cette option rigoureuse , il ne pourrait pas poursuivre significativement les baisses d' impôts . Près de 1 , 5 milliard de réductions des prélèvements ( 1 milliard de baisse des cotisations patronale , qui doit compenser la hausse prévue du smic , et 500 millions de mesures inscrites dans la loi Dutreil pour l' initiative économique ) sont déjà acquises pour l' an prochain . Pour l' affichage , le gouvernement pourrait faire un petit geste en direction des contribuables . " Mieux vaut donner un milliard d' euros aux Français qu' à l' administration " , commente -t-on à Matignon . En revanche , la baisse de la TVA sur la restauration , promise pendant la campagne présidentielle , n' est plus à l' ordre du jour - qui coûterait 3 milliards d' euros . L' autre engagement de M. Chirac , d' alléger de 30 % l' impôt sur le revenu en cinq ans , paraît de plus en plus difficile à honorer . Entre 2002 et 2003 , cet impôt n' a été réduit que de 6 % . Il faudrait donc pouvoir l' abaisser de 24 % supplémentaires de 2005 à 2007 ... Pour l' heure , M. Raffarin refuse d' envisager une hausse de la CSG qui pourrait endiguer la consommation des Français . D' autant que les contribuables vont déjà subir l' augmentation des cotisations au régime d' assurance-chômage de 2 , 4 milliards d' euros en 2003 et de 2 , 8 milliards en 2004 . Le premier ministre préfère envisager le transfert à la Caisse d' amortissement de la dette sociale ( Cades ) des déficits de l' assurance maladie de 2002 , 2003 et 2004 ( 15 milliards ) et prolonger jusqu'en 2019 la contribution au remboursement de la dette sociale ( CRDS ) - qui représente 0 , 5 % prélevés sur tous les revenus et qui doit théoriquement disparaître en 2014 . En attendant une réforme de l' assurance-maladie , prévue à l' automne . L' absence de réponse du gouvernement à la nouvelle donne économique ne manquerait pas de redonner de la voix aux libéraux . Un membre du gouvernement se dit partisan d' une " accélération des réformes " . " On pouvait diminuer la dépense de l' Etat dès le budget 2003 " , regrette celui -ci , expliquant ce renoncement par " le syndrome des polytraumatisés de 1995 - 1997 " - c' est-à-dire de l' ère Juppé : " Depuis l' accident , ils pensent que toute voiture est condamnée à aller dans le fossé . " Une grève approuvée par les Français 72 % des Français " soutiennent " ou " ont de la sympathie " pour le mouvement social organisé sur les retraites , selon un sondage CSA réalisé mercredi 2 avril auprès d' un échantillon de 1 000 personnes , et publié dans Le Parisien du 3 avril . 50 % des personnes interrogées estiment que le gouvernement Raffarin est " apte à apporter de bonnes réponses aux problèmes économiques et sociaux que la France connaît " , 45 % étant d' un avis contraire . Si 74 % des Français estiment que le premier ministre est " courageux " , et 70 % " sympathique " , ils ne sont plus que 48 % à le juger " capable de réformer le pays " . 53 % ( contre 44 % ) affirment qu' il n' est pas " suffisamment à l' écoute des Français " .